Amazon rêvait de faire décoller la livraison par drone en Italie. Pourtant, après des années de tests, d’annonces et de négociations réglementaires, le projet s’est brutalement arrêté fin décembre 2025. Derrière cet échec, Amazon invoque une révision stratégique. En réalité, l’arrêt révèle les limites économiques, réglementaires et politiques de la livraison automatisée par drone en Europe.
Amazon renonce à la livraison par drone en Italie après des années de tests

Le 27 décembre 2025, Amazon a officiellement suspendu son projet de livraison par drone en Italie. Ce projet, porté par le programme Prime Air, devait faire du pays le premier terrain d’expérimentation commerciale d’Amazon dans l’Union européenne.
Amazon et le projet de livraison par drone en Italie : une ambition européenne freinée
Le projet de livraison par drone d’Amazon en Italie s’inscrivait dans une stratégie globale lancée il y a plus d’une décennie. Dès 2013, Amazon présentait Prime Air comme une révolution logistique. Toutefois, en Europe, l’Italie représentait une exception stratégique. Amazon avait choisi la commune de San Salvo, dans les Abruzzes, pour tester ses drones de livraison, en partenariat étroit avec l’autorité aéronautique nationale, l’ENAC.
Dans ce cadre, Amazon a mené des essais techniques avancés. Les drones, notamment le modèle MK30, étaient conçus pour transporter des colis jusqu’à 2,5 kilogrammes sur un rayon maximal de 12 kilomètres, selon RaiNews. Cette configuration répondait aux standards définis par Amazon pour la livraison rapide de petits produits, tout en respectant les contraintes aériennes italiennes.
Le lancement effectif des livraisons par drone était envisagé pour le printemps 2026, comme l’indiquait le quotidien régional Il Centro. L’Italie était alors le seul pays de l’Union européenne inclus dans l’expérimentation Prime Air, selon Wired Italia. Cette singularité renforçait le rôle stratégique du pays pour Amazon.
Cependant, malgré ces avancées, le projet n’a jamais dépassé le stade expérimental. Certes, Amazon avait obtenu des signaux réglementaires positifs. Mais le cadre européen, combiné aux réalités économiques locales, compliquait la transition vers une exploitation commerciale durable.
Amazon lâche l’Italie et sa livraison par drones
Lorsque Amazon annonce l’arrêt du projet, le groupe évoque officiellement une « revue stratégique ». Dans une déclaration transmise à l’agence Reuters, Amazon explique avoir décidé de stopper ses plans de livraison commerciale par drone en Italie après cette évaluation interne. Selon l’entreprise, malgré des progrès avec les autorités aéronautiques italiennes, le cadre global des affaires et de la régulation ne soutenait plus ses objectifs à long terme. Amazon insiste alors sur son engagement historique en Italie, rappelant avoir investi environ 25 milliards d’euros dans le pays en quinze ans et employer près de 19 000 salariés répartis sur plus de 60 sites logistiques.
En parallèle, le contexte fiscal et judiciaire pèse lourd. RaiNews rapporte qu’Amazon a récemment conclu un accord fiscal avec l’administration italienne pour un montant de 723 millions d’euros. Même si Amazon ne lie pas officiellement cet accord à l’arrêt du projet drone, plusieurs sources institutionnelles évoquent des « événements financiers récents » ayant influencé la décision, comme le souligne l’ENAC dans une déclaration citée par Il Sole 24 Ore.
L’autorité aéronautique italienne qualifie la décision d’Amazon d’« inattendue ». Selon l’ENAC, Amazon a non seulement suspendu le projet Prime Air à San Salvo, mais également interrompu la procédure de certification comme opérateur LUC, indispensable pour opérer des drones de manière autonome à grande échelle. Ce retrait administratif confirme que l’arrêt dépasse une simple pause technique. De surcroît, l’ENAC précise qu’Amazon envisage désormais de poursuivre le lancement de ses opérations commerciales de livraison par drone dans un autre État membre de l’Union européenne.
Amazon, l’échec du projet drone et les limites structurelles de la livraison automatisée
L’échec du projet de livraison par drone d’Amazon en Italie illustre des difficultés plus larges. D’abord, la viabilité économique reste incertaine. La livraison par drone nécessite des investissements lourds en infrastructures, en certification et en maintenance. Or, en Italie, le déploiement commercial aurait concerné des zones à densité moyenne, réduisant les économies d’échelle promises par Amazon.
Ensuite, la complexité réglementaire européenne ralentit l’innovation. Même si l’Italie s’apprêtait à lancer le premier U-Space européen à San Salvo dès le 1er janvier 2026, selon Il Sole 24 Ore, ce dispositif vise surtout à organiser la cohabitation entre drones et aviation traditionnelle. Il ne garantit pas, à lui seul, la rentabilité d’un service de livraison par drone opéré par Amazon.
Cet échec italien intervient alors qu’Amazon continue d’expérimenter Prime Air aux États-Unis et au Royaume-Uni. La comparaison est révélatrice. En Europe continentale, la densité réglementaire, les contraintes urbaines et les exigences environnementales rendent la généralisation de la livraison par drone plus complexe. Ainsi, le retrait d’Amazon en Italie apparaît moins comme un accident isolé que comme un signal stratégique.
