La DGCCRF a infligé de lourdes amendes à plusieurs banques françaises pour avoir entravé le droit des emprunteurs à changer librement leur assurance. Ces sanctions rappellent qu’en matière de crédit immobilier, la loi encadre strictement les pratiques bancaires.
Assurance emprunteur : trois nouvelles banques épinglées pour non-respect du droit

Le 15 octobre 2025, la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) a annoncé avoir sanctionné plusieurs banques pour non-respect des règles relatives à l’assurance emprunteur. Ces décisions, rendues publiques sur le site du ministère de l’Économie, concernent notamment le CIC Est, la BRED Banque Populaire, la Caisse d’Épargne Île-de-France et le Crédit Agricole Paris Île-de-France. En cause : des retards répétés et des entraves dans le traitement des demandes de résiliation ou de substitution d’assurance, pourtant prévues par la loi Lemoine.
Trois banques écopent d’amendes record pour des pratiques illégales
La DGCCRF a confirmé avoir sanctionné quatre banques françaises pour non-respect du délai légal de dix jours ouvrés imposé pour traiter les demandes de changement d’assurance emprunteur. Selon le communiqué officiel publié sur Economie.gouv.fr, la BRED Banque Populaire a écopé d’une amende de 298 000 €, tandis que la Caisse régionale de Crédit Agricole Paris Île-de-France devra s’acquitter de 323 518 €. La Caisse d’Épargne Île-de-France, elle, a été condamnée à 80 000 €. Enfin, le CIC Est (groupe Crédit Mutuel) a été sanctionné à hauteur de 196 000 € pour avoir dépassé ce même délai. Les sanctions sont administratives : elles ne concernent pas le montant des prêts eux-mêmes, mais le non-respect des délais et obligations d’information envers les emprunteurs.
Ces montants, bien qu’importants, traduisent selon l’autorité un problème récurrent : certaines banques continuent d’ignorer la réglementation, malgré les rappels successifs. La DGCCRF précise que les contrôles ont été menés par les directions départementales, notamment dans le Bas-Rhin, où le CIC Est a été épinglé. Selon La Tribune de l’Assurance, une enquête réalisée entre août 2023 et mai 2024 a mis en évidence « des dépassements importants du délai légal de dix jours ouvrés ». « Cette sanction confirme que des comportements persistent de la part des banques, au détriment du pouvoir d’achat des Français et de la bonne application de la loi Lemoine », a déclaré Éric Maumy, membre fondateur de l'APCADE et Président d'APRIL. "Ces premières amendes montrent une volonté très claire des pouvoirs publics de mettre fi n à ces pratiques, mais restent faibles en regard des gains réalisés chaque année par les banques sur ce marché, l’UFC-Que Choisir évoquant des marges de 70% sur l’assurance emprunteur, soit plus de 5 milliards d’euros de profi ts chaque année sur les 7,6 milliards d’euros de primes encaissées par les banquiers !"
Assurance emprunteur et loi Lemoine : Une réglementation stricte pour protéger les consommateurs
Depuis l’entrée en vigueur de la loi Lemoine en septembre 2022, les banques doivent permettre aux clients de résilier à tout moment leur assurance emprunteur, sans frais ni pénalité. Ce texte consacre un principe de liberté pour les consommateurs, en renforçant la concurrence sur le marché de l’assurance. La réglementation impose également que chaque demande soit traitée sous dix jours ouvrés et que la banque délivre rapidement un avenant au contrat de prêt.
Or, selon la DGCCRF, certaines banques ont tardé à répondre ou n’ont pas transmis les avenants nécessaires, bloquant de fait le processus de substitution. L’enquête menée entre octobre 2022 et décembre 2023 a montré que la BRED n’avait pas respecté ces obligations pour « un nombre significatif de dossiers ». L’administration a rappelé que toute entrave constitue une violation du droit du consommateur.
Une précédente enquête de la DGCCRF sur le crédit immobilier, publiée en 2023, avait déjà relevé que sur 144 établissements bancaires contrôlés, 11 % présentaient des anomalies, notamment dans la transmission d’informations sur les assurances proposées.
Les droits des emprunteurs : un rappel nécessaire
Ces sanctions rappellent que les emprunteurs disposent de droits clairement définis par la loi Lemoine. Tout client peut substituer librement son contrat d’assurance, à condition que le nouveau contrat présente des garanties équivalentes à celui de la banque. En cas de refus, l’établissement doit motiver sa décision par écrit.
La DGCCRF insiste : les banques ne peuvent pas modifier le taux du prêt, les frais de dossier ou les conditions du financement si l’emprunteur choisit une autre assurance. Elles ont également l’obligation d’informer l’assuré des conséquences d’un défaut de paiement et de notifier le prêteur en cas de non-paiement du nouveau contrat.
Cependant, plusieurs associations de consommateurs estiment que la réglementation, bien que claire, reste difficile à faire appliquer. Pour Éric Maumy, président de l’APCADE, « ces sanctions devraient encourager les banques à se conformer davantage à la loi, mais leur effet reste limité sur le terrain ». Le gouvernement, via la DGCCRF, promet néanmoins de poursuivre les contrôles. En 2023-2024, 100 établissements ont déjà été inspectés dans le cadre de la surveillance des pratiques bancaires, confirmant une vigilance accrue en matière de réglementation financière.
