Flamanville : l’ASNR dénonce la gestion de crise « insuffisante » d’EDF

Depuis le 19 juin 2025, l’EPR de Flamanville (Manche) est à l’arrêt à cause d’un défaut sur plusieurs soupapes du pressuriseur, élément clé du circuit primaire. Ce contretemps fragilise le calendrier industriel et a suscité une réaction ferme de l’ASNR (Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection). Dans son rapport d’inspection, l’autorité estime qu’EDF ne dispose pas des moyens opérationnels suffisants pour garantir une gestion de crise efficace.

Stephanie Haerts
By Stéphanie Haerts Published on 11 septembre 2025 17h00
Flamanville : l’ASNR dénonce la gestion de crise « insuffisante » d’EDF
Flamanville : l’ASNR dénonce la gestion de crise « insuffisante » d’EDF - © Economie Matin

Soupapes défectueuses : origine et conséquences de l’arrêt principal

Le blocage de l’EPR de Flamanville remonte au 19 juin 2025, date à laquelle des défauts ont été identifiés au moins sur une soupape du pressuriseur du circuit primaire dont l’étanchéité n’était pas conforme aux exigences. Ces équipements assurent la régulation de la pression et la protection du cœur du réacteur. Trois soupapes du pressuriseur ont fait l’objet de vérifications, avec usinage de pièces, ce qui a repoussé le redémarrage prévu initialement au 13 août 2025.

Comme l’a indiqué l’AFP citée par Boursorama début juillet, l’usinage de nouvelles pièces était nécessaire avant toute remise en marche. Ces opérations de reprise technique soulignent l’importance stratégique des soupapes, positionnées en haut du pressuriseur, pour maintenir le niveau de sûreté requis. L’ASNR rappelle dans sa lettre de suite du 3 septembre que le bon fonctionnement de ces organes est vital en cas de perte d’alimentation électrique ou de nécessité de refroidissement d’urgence.

Gestion de crise : ce que l’ASNR reproche à EDF

Le 20 août 2025, les inspecteurs de l’ASNR ont mené un contrôle surprise sur l’EPR de Flamanville. L’exercice visait à tester un moyen local de crise (MLC 005), censé réalimenter des batteries via un raccordement électrique alternatif en cas de perte totale d’alimentation. D’après la lettre officielle du 3 septembre, EDF n’a pas été en mesure d’effectuer cette manœuvre, pourtant cruciale pour la sûreté. L’autorité précise, dans des propos partagés par Reporterre, que « l’organisation de l’EPR de Flamanville concernant la gestion et les moyens de crise apparaît insuffisante ».

Les inspecteurs notent que les gammes d’intervention étaient trop imprécises, obligeant les techniciens à improviser à plusieurs reprises. De plus, le suivi des formations s’avère lacunaire, empêchant une vision claire de la capacité réelle à mobiliser les équipes de crise. La critique ne s’arrête pas là. Certains matériels exigés par le prescriptif n’ont pas été présentés aux inspecteurs, et les règles de stockage comme de traçabilité des équipements n’étaient pas respectées. Ce constat renforce les doutes sur la préparation d’EDF à faire face à une situation extrême sur le site de Flamanville.

Quelles conséquences financières pour EDF

Au-delà de la sûreté, les conséquences économiques sont lourdes. Pour EDF, chaque mois de retard à Flamanville alourdit la facture. Les coûts de maintenance, l’immobilisation des équipes et la perte de revenus électriques s’ajoutent à une pression accrue sur les marchés de l’énergie. L’électricien national, déjà endetté, doit assumer l’impact d’un EPR toujours non opérationnel, alors qu’il devait symboliser le renouveau du nucléaire français. Mais l’enjeu dépasse la seule performance industrielle.

En cas de prolongation des retards, l’ASNR pourrait conditionner le redémarrage à la résolution intégrale des manquements constatés. L’entreprise doit donc démontrer rapidement sa capacité à corriger les faiblesses de gestion de crise, à former ses agents et à garantir la disponibilité effective des équipements de sûreté. Sans quoi la confiance des pouvoirs publics et du grand public dans l’avenir de Flamanville et, plus largement, du programme nucléaire français, pourrait s’éroder encore davantage.

Stephanie Haerts

Rédactrice dans la finance et l'économie depuis 2010. Après un Master en Journalisme, Stéphanie a travaillé pour un courtier en ligne à Londres où elle présentait un point bourse journalier sur LCI. Elle rejoint l'équipe d'Économie Matin en 2019, où elle écrit sur des sujets liés à l'économie, la finance, les technologies, l'environnement, l'énergie et l'éducation.

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