Défense : le fonds souverain norvégien se désengage d’Israël

Le plus grand fonds souverain du monde remet ses curseurs. En cédant des participations dans onze entreprises israéliennes et en rapatriant en interne la gestion de tous ses placements locaux, la Norvège transforme un débat éthique en décision de gestion.

Paolo Garoscio
By Paolo Garoscio Published on 12 août 2025 6h15
Israël
Défense : le fonds souverain norvégien se désengage d’Israël - © Economie Matin
2000 MILLIARDS $Le fonds souverain norvégien gère 2000 milliards de dollars d'actifs

Le 11 août 2025, Norges Bank Investment Management (NBIM), gestionnaire du Government Pension Fund Global, a détaillé une révision rapide de son périmètre israélien. D’après le communiqué officiel, le fonds détenait 61 sociétés israéliennes à la fin du premier semestre. Les onze cessions ont visé des titres hors indice actions de référence défini par le ministère des Finances, tandis que tous les mandats délégués à des gérants externes en Israël sont résiliés, les positions étant désormais gérées en interne. Reuters précise que le mouvement s’inscrit dans une revue déclenchée début août, à la suite d’interrogations publiques sur certaines expositions.

Gaza au centre de l’affaire : le fonds souverain norvégien prend position

Le message de NBIM est aussi financier que prudentiel. « Ces mesures ont été prises en réponse à des circonstances extraordinaires. La situation à Gaza est une grave crise humanitaire. Nous sommes investis dans des entreprises qui opèrent dans un pays en guerre, et les conditions en Cisjordanie et à Gaza se sont récemment détériorées. En réponse, nous allons renforcer encore notre diligence raisonnable. Les mesures que nous prenons vont simplifier la gestion de nos investissements sur ce marché et réduire le nombre d’entreprises que nous, ainsi que le Conseil d’éthique, devons surveiller », déclare Nicolai Tangen, directeur général de NBIM, dans le communiqué du 11 août 2025.

Ce recentrage a plusieurs implications financières. D’abord sur la construction de portefeuille. En se limitant aux valeurs de l’indice de référence en Israël, NBIM réduit la part d’« active risk » attribuable à des paris spécifiques hors benchmark. Cela a tendance, toutes choses égales par ailleurs, à diminuer la variance relative du portefeuille national vis-à-vis de son indice et à clarifier l’attribution de performance. NBIM rappelle par ailleurs qu’il n’a « pas vocation à être investi dans toutes les sociétés de l’indice », ce qui préserve une marge d’exclusion lorsque la matérialité de certains risques non financiers est jugée trop élevée.

Les gérants tiers dans le viseur

La résiliation des mandats externes en Israël et l’internalisation des positions témoignent d’une stratégie d’optimisation des frais et de standardisation des contrôles. Reuters souligne que l’épisode a ravivé le débat norvégien sur l’usage de gérants tiers et la cohérence du dispositif de filtrage éthique. En ramenant l’intégralité de la gestion locale « inhouse », NBIM supprime un étage d’intermédiation, homogénéise ses seuils d’éligibilité et, potentiellement, réalise des économies d’échelle sur la compliance et l’audit des investissements.

Le ministère des Finances a formellement demandé à Norges Bank de revoir la mise en œuvre du mandat de gestion, de passer au crible les investissements israéliens et de proposer des mesures complémentaires, avec une réponse attendue avant le 20 août 2025. Le fonds rappelle qu’il suit de près les entreprises en zone de conflit et qu’il a intensifié ses attentes en 2022 puis 2024. Le recentrage actuel n’implique pas un désengagement total d’Israël, mais une limitation de l’univers d’investissement et une surveillance accrue.

Paolo Garoscio

Rédacteur en chef adjoint. Après son Master de Philosophie, il s'est tourné vers la communication et le journalisme. Il rejoint l'équipe d'EconomieMatin en 2013.   Suivez-le sur Twitter : @PaoloGaroscio

No comment on «Défense : le fonds souverain norvégien se désengage d’Israël»

Leave a comment

* Required fields