Avec une levée de fonds exceptionnelle de 500 millions d’euros, Brevo franchit le seuil symbolique de la licorne. Au-delà du signal fort pour la French Tech, cette opération soulève des enjeux économiques majeurs, entre création de valeur, compétitivité internationale et effets d’entraînement sur l’écosystème français.
Brevo devient licorne : un pari économique pour la French Tech

Le 4 décembre 2025, Brevo, société issue de la French Tech spécialisée dans le marketing digital et le CRM, a levé 500 millions d’euros auprès de plusieurs investisseurs internationaux. Cette opération, qui la valorise à plus d’un milliard d’euros, consacre son passage au statut de licorne. Mais ce jalon n’est pas seulement symbolique : il révèle une dynamique économique à plusieurs niveaux, dans un contexte de tension sur les marchés du capital-risque.
Une opération à 500 millions qui redéfinit l’échelle de la French Tech
Le ticket injecté dans Brevo est exceptionnel pour un acteur non coté du numérique français. Selon Le Monde, la société a levé 500 millions d’euros, avec une valorisation supérieure à un milliard d’euros, seuil permettant d’atteindre le rang de licorne. Cette opération figure parmi les plus importantes levées de fonds jamais enregistrées dans l’écosystème tech national.
Le tour de table implique notamment General Atlantic et Oakley Capital, deux poids lourds anglo-saxons, avec la participation renouvelée de Bpifrance et Bridgepoint. Selon La Tribune, cette structuration capitalistique traduit une volonté stratégique : soutenir une ambition mondiale depuis l’Europe, sans céder au rachat.
Dans un contexte marqué par la contraction des investissements dans la tech (baisse de 45 % en Europe selon Pitchbook sur le premier semestre 2025), cette levée fait figure d’exception. Elle confirme également l’intérêt persistant pour les solutions SaaS orientées marketing et CRM, un marché estimé à 157 milliards de dollars en 2025 selon Gartner.
Des retombées économiques directes et une stratégie d'investissement ciblée
L’impact immédiat de cette levée est double : accélération du recrutement, notamment dans la tech, et renforcement de la R&D centrée sur l’intelligence artificielle. Selon FrenchWeb, Brevo prévoit d’investir 50 millions d’euros sur cinq ans dans le « Brevo AI Lab », basé à Paris. Ce pôle doit permettre le développement d’agents conversationnels et d’outils de personnalisation automatisée, en conformité avec le RGPD.
En 2024, l’entreprise affichait un revenu récurrent annuel (ARR) de 179 millions d’euros, en croissance de 32 % par rapport à l’année précédente. Ces résultats témoignent d’un modèle économique robuste, avec une répartition équilibrée : 70 % du chiffre d’affaires réalisés hors de France, dont 15 % aux États-Unis.
L’offre dédiée aux grands comptes, lancée récemment, représente déjà un quart de l’activité et croît deux fois plus vite que le reste du portefeuille. D’un point de vue économique, cette diversification renforce la résilience de l’entreprise face aux cycles du marché.
Brevo compte aujourd’hui 800 salariés, répartis entre ses bureaux de Paris, Berlin, Seattle et New Delhi. À moyen terme, la société prévoit d’augmenter ses effectifs de 30 % pour soutenir sa montée en gamme. L’effet d’entraînement sur l’emploi qualifié est donc tangible.
Un levier de rayonnement économique pour la France
Au-delà de Brevo, cette levée agit comme un signal pour l’ensemble de la French Tech. Elle montre qu’une société issue du tissu entrepreneurial français peut attirer des capitaux à l’échelle mondiale sans délocalisation ni dilution de sa base opérationnelle.
D’un point de vue macroéconomique, cette réussite illustre la montée en gamme du tissu technologique français. À l’inverse des « scale-up zombies » souvent critiquées pour leur dépendance aux subventions, Brevo affiche une trajectoire de rentabilité maîtrisée. Cela légitime le soutien public initial — notamment via Bpifrance — comme levier d’amorçage économique efficace.
La perspective d’une introduction en bourse, envisagée dans un horizon de trois à cinq ans, pourrait également générer des retombées fiscales pour l’État français en cas de création de valeur sur le territoire. En parallèle, le positionnement RGPD-compatible de Brevo constitue un avantage économique dans un contexte où la souveraineté numérique devient un critère stratégique.
Enfin, cette licorne pourrait encourager d’autres acteurs français à viser des marchés globaux sans se faire racheter prématurément. C’est une logique de chaîne de valeur ascendante qui se joue ici : du capital à l’innovation, de l’innovation à l’emploi, de l’emploi à la compétitivité.