En janvier, la grande distribution a engagé les négociations avec ses fournisseurs sur les prix des produits alimentaires pour l’année 2025. Cette période est souvent marquée par des tensions et des augmentations de tarifs. Certains industriels ont ainsi proposé des hausses que les distributeurs jugent déconnectées de la réalité économique. Ces discussions pourraient avoir un impact significatif sur le pouvoir d’achat des consommateurs français.
Grande distribution : un bras de fer des prix tendu pour 2025

Une bataille sur les prix
Chaque année, entre décembre et mars, la grande distribution entame un marathon de négociations avec ses fournisseurs. « C'est maintenant que ça se joue pour savoir à quel prix on va payer ses courses sur l'année 2025 », rappelle Thierry Cotillard, président des Mousquetaires/Intermarché, dans un entretien sur Franceinfo. Ces discussions déterminent en effet le prix des produits alimentaires qui seront proposés dans les rayons des supermarchés tout au long de l'année.
Bien que ces négociations aient lieu entre début décembre et fin février, c'est durant ce mois de janvier que les tensions sont les plus vives. D'un côté, les grandes surfaces cherchent à maintenir les prix accessibles pour leurs clients, sans trop rogner sur leurs marges, de l'autre, les industriels demandent des augmentations pour couvrir leurs propres coûts de production, souvent en hausse.
Si certains petits producteurs restent raisonnables avec des augmentations limitées à 3%, les grandes marques, notamment dans l'agroalimentaire, avancent des hausses beaucoup plus conséquentes. C’est particulièrement le cas de certaines multinationales, dont les augmentations oscillent de 6 à 8%, un niveau jugé « totalement décorrélé de la réalité économique » par Thierry Cotillard. « Les demandes de hausses sont souvent excessives, notamment de la part de grandes entreprises comme celles des produits de grande consommation », souligne-t-il.
Des hausses jugées excessives par la grande distribution
Ces hausses de prix réclamées par les industriels ne sont pas toutes uniformes. Certaines entreprises, comme le groupe Mondelez, propriétaire de marques phares comme LU, Milka et Côte d'Or, se distingue ainsi par ses demandes particulièrement élevées. Selon des sources proches des négociations, le géant américain a proposé des augmentations de 24% par rapport à l'année précédente. Ce chiffre, largement supérieur à celui des autres fournisseurs, a été confirmé par un distributeur anonyme qui l’a jugé « hors normes ».
Face à l’ensemble de ces hausses, les acteurs de la grande distribution expriment leur mécontentement. Michel-Édouard Leclerc, patron du groupe E.Leclerc, n'a pas hésité à dénoncer ce qu'il considère comme un abus de la part de certaines marques, qu’il accuse, dans une interview sur BFM TV, d’avoir « vraiment déconné ». Même son de cloche du côté de Dominique Schelcher, PDG du groupe Système U. « Avec certains industriels majeurs, on peut parler de hausses de l'ordre de 8%, c’est clairement disproportionné par rapport aux réalités économiques », a-t-il déclaré sur RMC. Il évoque même des augmentations à « deux chiffres », sans citer nommément Mondelez.
Pour justifier ces nouveaux tarifs, les industriels pointent la hausse des coûts de production, notamment des matières premières comme le cacao, mais aussi des prix de l'énergie et des coûts de transport. Mondelez, par exemple, a expliqué que ses augmentations étaient un « dernier recours », nécessaires pour maintenir ses marges face à la pression des coûts. « Nous avons soigneusement étudié ces hausses afin de maintenir la qualité de nos produits tout en répondant aux attentes des consommateurs », indique le groupe dans un communiqué
L’impact sur le pouvoir d'achat des consommateurs
Les négociations actuelles sont d'une importance capitale pour le pouvoir d'achat des Français. Après une période de hausse continue des prix, Thierry Cotillard espérait des « prix plus raisonnables » pour 2025. « On visait de la déflation, mais ce n’est pas gagné », a-t-il admis. Ces demandes d'augmentation de prix viennent ainsi contrarier cette perspective, et pourraient représenter, pour les consommateurs, une charge supplémentaire sur un budget alimentaire déjà grevé par l’inflation de ces dernières années.
Si les négociations entre distributeurs et industriels ne préjugent pas des prix finaux en rayon, les grandes surfaces conservent un pouvoir décisionnaire sur les tarifs qui seront effectivement appliqués. La pression reste forte, et l’issue de ces discussions incertaine. Ces prix finaux, qui seront décidés d’ici le 1er mars, pourraient donc encore fluctuer, mais une hausse semble plus que probable, à moins d’un retournement de situation durant les négociations.