Internet ralentit à cause d’un incident en mer Rouge

La fragilité d’Internet vient de se rappeler aux utilisateurs : des câbles sous-marins sectionnés en mer Rouge entraînent des ralentissements et des coupures régionales. Microsoft et NetBlocks confirment des perturbations majeures, rappelant que la vie quotidienne des internautes repose sur des infrastructures invisibles mais vulnérables.

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By Adélaïde Motte Published on 8 septembre 2025 16h30
Internet Ralentit A Cause D Un Incident En Mer Rouge
Internet ralentit à cause d’un incident en mer Rouge - © Economie Matin

Le 6 septembre 2025, Microsoft a signalé que plusieurs câbles sous-marins essentiels à l’acheminement du trafic Internet international avaient été sectionnés en mer Rouge, au large de Djeddah. L’incident provoque des ralentissements notables en Asie et au Moyen-Orient, alors que NetBlocks confirme une « série de pannes de câbles » dégradant la connectivité dans plusieurs pays. Ce choc technique met en lumière les conséquences directes sur l’usage quotidien d’Internet par les citoyens, qu’il s’agisse de télétravail, de streaming ou de transactions bancaires.

Des câbles vitaux sectionnés en mer Rouge

Microsoft, par le biais de sa division Azure, a annoncé samedi que « le trafic réseau traversant le Moyen-Orient peut connaître une latence accrue ». Cette déclaration confirme l’ampleur de l’incident et souligne le rôle central de ces câbles dans la fluidité de l’Internet mondial. NetBlocks, organisation indépendante spécialisée dans la surveillance des réseaux, a pour sa part indiqué que « des pannes multiples de câbles sous-marins en mer Rouge dégradent la connectivité dans plusieurs pays, notamment l’Inde, le Pakistan et les Émirats arabes unis ».

Ces câbles constituent une véritable colonne vertébrale invisible reliant continents et utilisateurs. Sans eux, le trafic Internet ne peut circuler efficacement entre l’Asie, le Moyen-Orient et l’Europe. Leur coupure provoque non seulement des lenteurs mais aussi des interruptions localisées.

Selon les premières analyses, l’incident a affecté les systèmes de câbles SMW4 (South East Asia–Middle East–Western Europe 4) et IMEWE (India-Middle East-Western Europe). Ces infrastructures, exploitées par des consortiums internationaux, passent toutes par la mer Rouge, un point de passage stratégique mais également fragile.

Zones et usages directement impactés

La carte des perturbations s’étend largement. Les ralentissements d’Internet ont été constatés aux Émirats arabes unis, en Inde et au Pakistan. La Pakistan Telecommunication Company a confirmé des dégradations du débit, plus sensibles encore aux heures de pointe. En Inde, les utilisateurs ont rapporté des problèmes d’accès aux plateformes de streaming et aux services de paiement en ligne.

Dans ces pays, l’Internet est devenu une ressource économique cruciale. Les retards dans les services cloud ralentissent des millions d’entreprises et de particuliers. Microsoft Azure a reconnu que « des retards minimes pouvaient affecter certains utilisateurs », tout en précisant que du trafic avait été réacheminé pour limiter l’impact. Cette mesure technique, fréquente en cas d’incident, permet de détourner une partie du flux vers d’autres routes numériques, mais elle ne supprime pas les effets de congestion.

Au-delà des professionnels, c’est la vie quotidienne des citoyens qui se retrouve perturbée. Les appels vidéo connaissent des coupures, les transactions bancaires mettent plus de temps à s’exécuter, et les plateformes de divertissement perdent en fluidité. Autrement dit, des gestes devenus banals grâce à Internet rappellent soudain leur dépendance à une infrastructure méconnue.

Un rappel brutal de la vulnérabilité d’Internet

Les câbles sous-marins transportent environ 99 % du trafic intercontinental. Cette statistique, rappelée par le Comité international de protection des câbles, illustre à quel point l’Internet repose sur ces installations. Chaque année, entre 150 et 200 pannes sont recensées à travers le monde, dues le plus souvent à des causes accidentelles : ancres de navires, chalutages ou mouvements géologiques.

La localisation des dégâts, en mer Rouge, accroît la complexité de l’intervention. Les experts évoquent la possibilité qu’une ancre ait arraché une portion de câble dans une zone côtière peu profonde, notamment au large du Yémen. Dans ce cas, la réparation ne se limite pas à une opération technique : elle requiert des autorisations de navigation et une coordination entre plusieurs juridictions, ce qui peut prolonger la durée de rétablissement. Un précédent similaire avait exigé environ six mois de travaux avant retour à la normale, selon un spécialiste interrogé.

La répétition de ces incidents rappelle que l’Internet, souvent perçu comme immatériel, repose en réalité sur des infrastructures physiques vulnérables. Ces câbles, posés à plusieurs milliers de mètres de profondeur, sont soumis à des tensions géopolitiques, à des aléas climatiques et à des risques industriels.

Les conséquences stratégiques et économiques

Au-delà des désagréments pour les particuliers, les coupures en mer Rouge soulèvent des enjeux stratégiques. Cette zone est l’un des corridors numériques les plus fréquentés du globe. Elle relie l’Asie du Sud et le Golfe à l’Europe via le canal de Suez. Chaque ralentissement affecte la fluidité des échanges commerciaux, financiers et scientifiques.

Les géants technologiques comme Microsoft, Google ou Meta dépendent directement de ces routes pour assurer leurs services. Une interruption prolongée met en péril la compétitivité régionale et rappelle aux gouvernements la nécessité de sécuriser ces infrastructures. Dans un contexte de tensions maritimes, les câbles sous-marins deviennent un enjeu géopolitique au même titre que les pipelines énergétiques.

Pour les économies émergentes comme l’Inde ou le Pakistan, l’impact est encore plus lourd. Ces pays, dont l’écosystème numérique est en pleine croissance, voient leur crédibilité internationale affaiblie par la moindre panne. Chaque heure de ralentissement d’Internet représente une perte économique difficile à chiffrer, mais bien réelle, notamment dans le secteur des services délocalisés.

Microsoft face à la crise

Microsoft a tenté de rassurer ses clients en affirmant que des routes alternatives avaient été activées et que l’impact resterait limité. Néanmoins, les experts préviennent que la réparation complète prendra du temps. NetBlocks, qui surveille en continu l’accessibilité d’Internet, insiste sur le caractère inédit de la panne par son ampleur régionale et souligne la nécessité d’investissements supplémentaires dans la redondance des réseaux.

La fragilité de l’Internet mondial face à ce type d’accidents devrait nourrir les débats internationaux sur la sécurité des câbles. Plusieurs initiatives visent déjà à diversifier les routes de communication, en contournant la mer Rouge ou en renforçant les câbles terrestres. Toutefois, ces projets demandent des investissements colossaux et des années de mise en œuvre.

Dans l’immédiat, les internautes devront composer avec un Internet plus lent dans certaines régions. Et l’incident illustre un paradoxe : plus le monde s’appuie sur le numérique, plus il dépend de câbles discrets posés au fond des mers.

Ade Costume Droit

Diplômée en géopolitique, Adélaïde a travaillé comme chargée d'études dans un think-tank avant de rejoindre Economie Matin en 2023.

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