L’accessibilité des services clients des entreprises et administrations

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Par Jean-Charles Correa Publié le 21 octobre 2018 à 6h47
Sourds
4 MILLIONSIl existe pas moins de 4 millions de sourds et malentendants en France.

L'accessibilité des services clients des entreprises et administrations pourrait bien être un petit pas pour les personnes sourdes et malentendantes, mais un grand pas pour la société. Explications.

Alors qu’il n’existe pas moins de 4 millions de sourds et malentendants en France *, il aura fallu attendre la loi pour une République numérique pour que la question de l’accessibilité des services clients soit réellement une obligation pour les administrations publiques et les entreprises.

Si la question de l’accessibilité est une problématique quotidienne pour la communauté sourde, cette situation est également un enjeu pour certaines entreprises, qui à défaut d’avoir un dispositif adapté, se retrouvent coupées d’une partie de leur clientèle... Le 7 octobre, le volet de la Loi pour une République Numérique qui a trait à l’accessibilité des personnes sourdes ou malentendantes aux services clients des entreprises et aux accueils à distance des services publics est entrée en vigueur et mettra fin, à terme, à ces inégalités. Réelle avancée pour les personnes sourdes ou malentendantes, en quoi l’obligation d’accessibilité est-elle une opportunité unique pour les entreprises ? Et pour la société en général ?

De la prise en compte des besoins réels des personnes sourdes ou malentendantes…

Si toute entreprise est accessible via un numéro de téléphone qui permet à un client de la joindre, tous les clients ne sont malheureusement pas égaux pour accéder à ce service. En effet, lorsqu’il s’agit de contacter un service client, les personnes sourdes ou malentendantes sont souvent démunies... et confrontées à des situations complexes. Ces dernières doivent donc toujours anticiper leurs démarches et doivent souvent solliciter un proche.

Avec l’article 105 de la nouvelle loi, les personnes sourdes ou malentendantes pourront enfin retrouver un semblant d’équité avec les personnes entendantes, notamment grâce aux avancées technologiques qui permettent désormais aux entreprises de rendre accessible leur numéro aux personnes handicapées.

Force est de reconnaitre que le secteur privé a été précurseur en matière d’accessibilité. D’abord initiées par des publics internes, des collaborateurs sourds ont encouragé, dès le début des années 2000, des expériences de services clients accessibles comme à la Macif ou encore EDF. Nous étions alors aux prémices de l’accessibilité où la bonne volonté l’emportait parfois sur la qualité de service.

De fil en aiguille, la nécessité de répondre aux besoins réels et constatés des personnes sourdes et malentendantes se fait de plus en plus entendre. Dès 2010, des formations émergent pour faciliter le contact avec des entreprises et organismes publics. Une porte s’est ouverte, car il s’agit bien de cela : à travers la promotion de l’accessibilité, qui est à l’évidence une cause éthique et légitime, c’est également l’autonomie et l’employabilité des personnes sourdes qui est soutenue. Et donc l’économie !

… A la prise en compte d’un véritable potentiel économique et sociétal

Dans notre pays, il existe près de 4 millions de personnes sourdes ou malentendantes, mais seulement 450 interprètes en langue des signes en activité ! Il apparait donc évident qu’au-delà des solutions d’accessibilité privilégiant l’intermédiation d’interprètes pour traduire des échanges entre un client sourd et un conseiller entendant, ou les solutions techniques de transcription, une véritable filière-métier devra être mise en œuvre pour répondre aux besoins qui ne vont pas manquer d’apparaitre.

Plusieurs milliers d’entreprises assujetties à l’obligation vont devoir trouver des solutions qui passeront déjà par un changement de regard sur le handicap. En effet, plutôt que de considérer ce nouveau public comme une contrainte, parfois même comme un problème à adresser, celles-ci vont pouvoir y voir une solution. Le recrutement et la favorisation de l’employabilité d’un collaborateur sourd ou malentendant pourra être un moyen de respecter deux obligations : celle de l’accessibilité rendue obligatoire par la loi, mais également celle de l’employabilité de travailleurs handicapés, qui doit attendre 6% des effectifs...

Finalement, une des réussites de cette loi, si elle atteint ses objectifs, réside dans le fait de mettre en avant les sourds, en tant que consommateurs, clients, collaborateurs, citoyens, mais également en tant qu’acteurs de l’accessibilité. Ce faisant, la place des sourds dans la société en sera irrémédiablement changée. La contrainte de la loi va se transformer en opportunité pour les sourds et les entreprises, ce qui constituera, il faut l’espérer, un changement majeur en France.

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Jean-Charles Correa, fondateur de DEAFI,  fait partie de ces entrepreneurs qui ont choisi de combiner accessibilité, employabilité et équité en créant DEAFI,  le 1er centre de relation client au monde, dédié aux personnes sourdes et malentendantes. Après 20 années passées dans le secteur informatique à l’international, Jean-Charles Correa décide de quitter fin 2009 son poste de directeur de zone export chez Sybase/SAP pour fonder DEAFI. Son expérience des nouvelles technologies de l’information le convainc d’aider les personnes sourdes ou malentendantes à devenir conseillers clientèle. L’enjeu ? Favoriser l’inclusion économique des personnes en situation de handicap, durement touchées par le chômage.

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