Les propriétaires vont-ils devoir baisser leurs loyers à cause de la crise du Covid-19 ?

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Par Michel Léchenault Modifié le 24 avril 2020 à 13h27
Encadrement Loyers Paris Experimentation 1
@shutter - © Economie Matin
709 EUROSLe prix moyen d'un loyer en France est de 709 euros par mois.

À l'occasion de la sortie de notre baromètre des loyers, nous avons tenté de déterminer quelles conséquences la crise du Covid-19 pourrait avoir sur le marché locatif hexagonal. Confrontés à une baisse de revenus des locataires potentiels, les propriétaires de logements situés en zones détendues (B2, C) seront-il contraints de baisser leurs loyers ? Éléments de réponse.

Les loyers pourraient-ils être amenés à baisser ?

Pour trouver plus rapidement un locataire et limiter le risque d'impayé, le propriétaire d’un logement situé en zone tendue devra-t-il baisser son loyer de sorte que celui-ci soit en adéquation avec les capacités financières d’une locatèle locale fraîchement précarisée ? La réponse à cette question est susceptible de varier selon que le bien se trouve en zone tendue ou détendue. Louer un appartement à Paris est, par exemple, un véritable parcours du combattant. « Le marché locatif parisien est un marché bien spécifique » nous a répondu Alain L., propriétaire d’un studio dans le 9e arrondissement. « Il y a beaucoup plus de demande que d’offre et les petites surfaces sont encore plus demandées que les grands appartements. Donc à Paris, je sais que je trouverai facilement un locataire et que s’il est au prix du marché, je n’aurai pas à baisser mon loyer ».

Mais qu’en est-il en zone détendue ? « Je préférerais baisser mon loyer pour garder un locataire plutôt que pour en gagner un » explique Jacques D., propriétaire d’un appartement à Saint-Chamond, près de Saint-Étienne. « Mon loyer est déjà peu élevé mais je pourrais, le cas échéant, envisager de le baisser légèrement si ça pouvait m’aider à louer plus rapidement. Par contre, je serais plus enclin à faire un effort si un locataire, en place depuis quelque temps déjà et avec qui tout se passe bien, me disait qu’il a des fins de mois compliquées à cause de la crise du Covid-19 ». Il peut également être utile de rappeler que la Garantie Loyers Impayés (GLI) ou encore le dispositif Visale permettent aux propriétaires de se prémunir contre les impayés de loyers.

Face à la crise du Covid-19, le député LREM Aurélien Taché plaide, quant à lui, en faveur des mesures d’urgence et des réponses gouvernementales qui soient « pérennes ». Il suggère ainsi d'augmenter le fonds d'indemnisation des propriétaires pour éviter au maximum les expulsions locatives et de transférer ce budget au ministère du Logement afin d'élargir son périmètre d'intervention en vue de créer un fonds « zéro-expulsion ».

Un candidat à la location sur trois table sur une hausse des loyers

Il peut être intéressant de confronter les points de vue de deux acteurs essentiels du marché locatif hexagonal, à savoir, les propriétaires, d'une part et les locataires, d'autre part. À cet égard, l'étude que nous avons réalisée récemment : Observatoire du Moral Immobilier (OMI) auprès de plus de 1 600 Français ayant pour projet de louer un logement dans les 12 prochains mois, nous apprend qu'un sondé sur trois (31 %) table sur une hausse des loyers qui ne devrait toutefois pas excéder 10 %. Il ressort également de notre enquête que 21 % des candidats à la location interrogés anticipent une baisse des loyers et que 47 % d'entre eux pensent que les prix à la location se stabiliseront.

Le Covid-19 devrait amputer les finances des Français

L’offre et la demande locative sont le produit du comportement des propriétaires, d’une part, et des locataires, d’autre part. Comme nous l’avons vu, la conjonction d’une forte demande locative et d’une offre de logements ténue a donc pour conséquence une hausse des loyers. Pour autant, les loyers doivent être connectés avec la réalité économique locale. À cet égard, force est de constater qu’un fossé s’est creusé entre les loyers qui se sont envolés, notamment dans les grandes villes, et les revenus des Français. Mais cet écart préexistait à la crise du Covid-19… et à l’heure où nous écrivons ces lignes, 10,2 millions de Français - soit plus d’un salarié du privé sur deux - sont en chômage partiel. Ils ne touchent – sauf à ce que leur employeur ait les moyens de compléter la différence – donc plus que 84 % de leur salaire net. Contraints de puiser dans leur épargne (s’ils en ont une), de restreindre leurs dépenses au maximum pour s’en tenir à l’essentiel et/ou de faire jouer la solidarité familiale, bon nombre de locataires éprouvent ainsi des difficultés pour payer leurs factures mais aussi leurs loyers.

À l’issue du confinement, des aides financières seront toutefois accordées aux familles bénéficiant du RSA et de l’Allocation de Solidarité Spécifique (ASS), lesquelles recevront 150 € chacune, plus 100 € par enfant. Pour les familles qui touchent les APL, l’aide se montera à 100 € par enfant. « Une mère de trois enfants qui vit en région parisienne et qui paye 700 € de loyer par mois recevra, à la mi-mai, un versement de 300 €, en plus de ses APL de 200-250 € » a indiqué Julien Denormandie, le Ministre chargé de la Ville et du Logement. Les classes moyennes ne seront toutefois pas éligibles à ces aides…

En zone tendue, des loyers 36 % plus élevés qu’en zone détendue

En France, différents niveaux de tension s’observent selon que l’offre locative couvre – on non – la demande de logements. Dans les zones dites « tendues » (A bis, A, B1), la demande locative dépasse l’offre de logements disponibles. En revanche, dans les zones dites « détendues » (B2, C), l’offre locative répond aux besoins en logements. Or, comme l’exige la loi de l’offre et de la demande, plus l’offre de logements est conséquente, plus la compétition est rude entre les propriétaires et moins les loyers sont élevés. Alors qu'à l’inverse, plus l’offre se raréfie, plus les locataires sont en concurrence les uns avec les autres et plus les loyers augmentent. Dans les zones détendues, c’est cette disproportion entre une offre abondante et une faible demande qui tire non seulement les prix de vente mais aussi les loyers vers le bas. D’après les données qu’a compilées le baromètre des loyers SeLoger, en zone tendue, les loyers mensuels avoisinent, en moyenne, les 875 € contre 639 €, en moyenne, en zone détendue. Les loyers des biens situés dans une zone tendue sont, par conséquent, 36 % plus élevés qu’en zone détendue.

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Responsable éditorial du Groupe SeLoger.

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