La compétitivité de la France recule encore. Nos exportations s’effondrent

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Par Charles Sannat Modifié le 1 février 2018 à 10h10
Commerce International Etats Specialisation Secteurs
13,6%La part de la valeur ajoutée manufacturière française dans celle de la zone euro a encore légèrement diminué en 2017, pour atteindre 13,6 %

Je rappelle aux « zoptimistes » béats qui ne veulent entendre, par confort, que les bonnes nouvelles, que depuis l’antiquité, on ne coupe plus la tête des messagers même si les nouvelles ne sont pas bonnes, ou ne sont pas celles que l’on attendait ou que l’on espérait.

Le dernier rapport de Rexecode, un institut d’analyse économique français aussi sérieux que réputé, est sans ambiguïté.

« La conjoncture s’améliore mais la compétitivité de la France recule encore »

Je cite le résumé de ce rapport exhumé pour vous. Il vient tout juste de sortir et de paraître et doit, dans vos réflexions, faire immédiatement écho aux records de croissance officielle qui assaillent notre pays. N’oubliez pas que jusqu’au dernier jour et malgré les rayons vides, l’agence TASS (celle qui abreuvait la Pravda soviétique de ce qui devait être dit) « informait » le bon peuple des succès toujours plus brillants et fulgurants de l’URSS qui chaque année battait la production de blé de l’année précédente. Chaque année, dans les rayons, il y avait de moins en moins de pains.

Pour résumer rapidement, nous nous sommes appauvris collectivement de 1 700 milliards d’euros de manque à gagner, notre compétitivité ne s’améliore pas franchement sans pour autant accélérer sa dégradation, et comme je l’ai dit plusieurs fois, c’est aussi logique que prévisible dans la mesure où la compétitivité est chose relative et dépend évidemment de ce que font aussi les « autres ». Enfin, nos produits sont mauvais et coûteux, et donc… ils ne se vendent pas et les exportations françaises s’effondrent. Si nos produits ne sont pas assez innovants, ce n’est pas la faute de nos « salariés » mais de nos patrons « sans vision ».

L’un de nos problèmes est aussi celui d’avoir un mauvais patronat et trop peu de leaders charismatiques. C’est assez logique. La France dégoûte les entreprenants, et ceux qui restent ont vraiment la « foi ». Le débat autour de la richesse de l’un de nos milliardaires est totalement à l’image de notre pays qui décourage l’effort individuel pour encenser les forcément-gentils-pauvres qui se battent pour un pot de Nutella (volontairement caricatural).

Nous ne devons pas avoir peur de la richesse et du succès. Nous devons renouer avec la culture de l’effort, du courage, de la réussite et de l’ambition aussi bien individuelle que collective. La médiocrité ne doit pas être notre choix.

« Le rattrapage des pertes des parts de marché accumulées par la France par rapport aux autres pays européens depuis le début des années 2000 n’est pas encore amorcé et le recul de la position française s’est même légèrement accentué en 2017. La traduction en termes de gains de parts de marchés et de réindustrialisation de l’amélioration récente de la compétitivité-coût prendra du temps.

• Les parts de marché à l’exportation se sont encore dégradées en 2017

La part des exportations françaises de biens et services dans celles de la zone euro a légèrement reculé en 2017. Elle s’établit en valeur à 12,9%, après 13,2% en 2016. Si la part de marché de la France dans la zone euro était restée à son niveau de 2000 (17,0%), le montant des exportations françaises serait accru de 210 milliards € en 2017.

Le manque à gagner cumulé depuis 2000 atteint désormais de 1 700 milliards €.

Le déficit de la balance des transactions courantes devrait s’élever à 1,1% du PIB en 2017, un niveau historique. La balance des échanges de services s’est en revanche légèrement redressée en 2017 (+0,3 point de PIB), grâce au tourisme, mais sans rattraper les pertes enregistrées depuis 2012.

• Une amélioration de la compétitivité-coût sur la période récente

– Depuis 2012, la progression du coût horaire du travail dans les secteur marchand a été plus modérée en France qu’en zone euro (+5,4 % contre +7,1 % en zone euro) et en particulier qu’en Allemagne (+11,4 %). Si l’on observe le coût salarial unitaire – qui tient compte de la productivité –, l’amélioration est également sensible. Dans l’ensemble de l’économie, le CSU a progressé en France au même rythme qu’en zone euro (+1,1 %) en 2017, et plus modérément qu’en Allemagne (+1,5 %).

– L’écart substantiel accumulé depuis 2000 entre la France et l’Allemagne n’a cependant été réduit que de 25 % par le CICE et les réductions de cotisations familiales. Dans l’industrie manufacturière, le CSU baisse en France en 2017 (-0,4 %), alors qu’il est stable en zone euro. Les entreprises industrielles françaises ont stabilisé leurs prix à l’exportation en 2017 alors qu’ils augmentent de 1,0 % en moyenne en zone euro.

• Un recul continu de la base industrielle française en Europe

– L’amélioration récente de la compétitivité-coût a contribué au redressement des marges des entreprises, sans enrayer toutefois la contraction de la base industrielle, elle-même fortement liée au recul des parts de marché. La part de la valeur ajoutée manufacturière française dans celle de la zone euro a encore légèrement diminué en 2017, pour atteindre 13,6 %. Elle était de 17,3 % en 2000.

La hausse au cours des années 2000 des coûts supportés par l’industrie (coûts salariaux directs, mais aussi ceux des secteurs fournisseurs) a progressivement éliminé les entreprises les moins productives. Les autres ont réduit leurs marges pour maintenir leur compétitivité-prix, au détriment de leur capacité à investir et à monter en gamme. Un cercle vicieux s’est installé : les pertes de parts de marché réduisent les débouchés et le recul relatif de la base industrielle réduit les capacités exportatrices et la variété de l’offre française.

• Des produits français perçus comme de qualité mais pas assez innovants et toujours trop chers

L’édition 2017 de l’enquête auprès des importateurs européens sur leur perception du positionnement des produits français par rapport à leurs principaux concurrents confirme ce diagnostic : la qualité des biens d’équipement et des biens intermédiaires français est jugée moyenne, voire médiocre, par rapport au prix de vente. »

Comme le dit un slogan publicitaire actuel, « alors là, on est mal patron » ! En attendant, on voit de la croissance partout. Ne soyez pas dupes ni naïfs.

Il est déjà trop tard, mais tout n’est pas perdu. Préparez-vous !

Article écrit par Charles Sannat pour Insolentiae

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Charles SANNAT est diplômé de l'Ecole Supérieure du Commerce Extérieur et du Centre d'Etudes Diplomatiques et Stratégiques. Il commence sa carrière en 1997 dans le secteur des nouvelles technologies comme consultant puis Manager au sein du Groupe Altran - Pôle Technologies de l’Information-(secteur banque/assurance). Il rejoint en 2006 BNP Paribas comme chargé d'affaires et intègre la Direction de la Recherche Economique d'AuCoffre.com en 2011. Il rédige quotidiennement Insolentiae, son nouveau blog disponible à l'adresse http://insolentiae.com Il enseigne l'économie dans plusieurs écoles de commerce parisiennes et écrit régulièrement des articles sur l'actualité économique.

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