Les heures supplémentaires payées plein pot : une grave erreur

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Par Guillaume Cairou Modifié le 20 juillet 2012 à 2h11

Revenir sur la défiscalisation des heures supplémentaires est un triple non-sens : économique, budgétaire et fiscal.

Cette mesure, prise sans concertation, alourdit le coût du travail, fragilise notre compétitivité et va coûter plus de 500 euros à 9 millions de salariés. Comment peut- on sincèrement la défendre dans un contexte ou les marchés sont si illisibles, le futur chaque jour plus imprévisible ?

Les salariés des petites entreprises sont les premiers touchés.

L'excédent brut d'exploitation n'est que de 27 % en France contre 41 % en Allemagne et 38 % dans la zone euro.

Quant à la trésorerie des entreprises, elle n’a jamais été aussi faible depuis 1985. En plus de ne créer aucun emploi, cette mesure contribue à la rigidification extrême de notre économie, déjà parmi les plus rigides de l’Europe tout en affaiblissant les salariés les plus fragiles. Va-t-on sérieusement continuer à prétendre que ceux qui font des heures supplémentaires volent le travail des demandeurs d'emploi ? Ne va-t-on décidemment jamais sortir de l’utopie du partage du travail ? Les 35 heures n’ont-telles pas suffit à démontrer les désastres d’une monumentale erreur de raisonnement économique ? Ce sont pourtant les salariés les plus fragiles de nos entreprises qui continuent chaque jour à en payer les conséquences.

Concrètement, nos gouvernants oublient une fois de plus que quand dans une entreprise 80 % des effectifs sont rémunérés au Smic comme c’est le cas dans quelques grandes entreprises, les heures supplémentaires constituent le seul moyen pour les salariés d’augmenter leurs revenus.

Il faut arrêter maintenant d’entamer chaque jour davantage le pouvoir d'achat de nos salariés, employés et ouvriers.

La solution ?

Ouvrir les yeux, sortir de l’incantatoire et bannir le dogmatisme idéologique. L'Autriche exonère d'impôt sur le revenu ces heures supplémentaires depuis 1996. En Belgique, c’est depuis 2005. Le Luxembourg, enfin, prévoit depuis début 2008 des exonérations pour les heures effectuées au-delà de la durée légale. Continuions à faire confiance à ceux qui commentent l’économie plutôt qu’à ceux qui la vivent et nous nous aurons de plus en plus de mal à contourner le mur qui se dresse sur le chemin du redressement économique français.

Quand autant de décideurs politiques en Europe ont été convaincus, il faut se poser des questions. Mais le coût du travail en France reste plus élevé que chez nos concurrents directs.

Fin 2009, le coût horaire de la main d’œuvre était en France de 33,2 euros par heure, contre 30,6 en Allemagne, 28,2 euros dans la zone euro et 24,3 euros dans l’ensemble de l’Union européenne. C’est à cause de la mise en place des 35 heures que la situation s’est autant aggravée depuis 10 ans. Pendant que nos concurrents continuaient à accroitre leur compétitivité, nos entreprises s’épuisaient à compenser le surcoût lié aux 35h.

Quel en est le résultat ?

Une accélération insupportable et inacceptable des délocalisations. Entre 2000 et 2007, nous avons ainsi perdu 12% de nos emplois industriels ! N’oublions pas que l’écart entre le coût du travail et le salaire net est grandissant, qu’il est temps que nos salariés touchent les fruits de leur travail dans nos entreprises. Ne nous leurrons pas, cela correspond avant tout à la dérive des dépenses sociales et renvoie donc à la problématique de leur financement qu’il s’agit de surmonter. Les hausses de cotisations sociales intervenues sur la période 1980 – 2000, ont conduit à une quasi-stagnation du salaire net sur cette période. La comparaison avec l’Allemagne est saisissante puisqu’à coût équivalent pour l’entreprise, un ouvrier aura un salaire net 20% plus important en Allemagne qu’en France.

C’est cette réalité, sans détour, sans tabou qu’il s’agit de regarder en face aujourd’hui. Elle doit nous pousser à ne plus repousser encore davantage les décisions essentielles qui s’imposent pour défendre notre compétitivité !

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Fils d’ouvrière d’origine serbe, autodidacte, éducateur puis enseignant en banlieue, c’est au chômage à 30 ans que Guillaume Cairou crée Didaxis, pionnier du portage salarial. Aujourd’hui 15e recruteur français, classé dans le Fast 500 européen des entreprises par Deloitte, il a permis à plus de 10 000 personnes de créer durablement leur emploi.

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