Micmac gouvernemental à propos de l’objectif de déficit à 3%

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Par Christopher Dembik Publié le 7 avril 2014 à 7h11

En nommant Manuel Valls Premier ministre, le Président de la République n'a pas répondu aux appels de sa base électorale, largement démobilisée et désenchantée depuis plusieurs mois par la politique gouvernementale, mais a, en revanche, réaffirmé son biais réformiste.

Son discours à l'issue du résultat des municipales s'inscrit parfaitement dans celui du 14 janvier dernier au cours duquel il s'était clairement posé en partisan d'une politique de l'offre pour la France. Jusque-là, on est donc tenté de dire que le cap est maintenu.

C'était sans compter la composition du gouvernement. Le choix d'un Bercy « à l'allemande », loin de la tradition française, peut déjà soulever quelques doutes mais c'est surtout le tandem qui le compose qui laisse perplexe.

D'un côté, Michel Sapin, de l'autre Arnaud Montebourg. Les deux ont des profils très différents : le premier est plutôt réformiste tandis que l'ancien chantre de la démondialisation est d'une tendance plus dirigiste et moins favorable à l'Europe telle qu'elle est aujourd'hui.

Résultat : le gouvernement n'a pas tardé à envoyer des signaux contradictoires, à la fois aux investisseurs mais surtout à Bruxelles. Pierre d'achoppement : le respect de l'objectif de déficit à 3% d'ici 2015.

Pour tous les observateurs un peu avisés, il semble évident que le délai imparti ne sera en aucune façon respecté. Le Président l'a d'ailleurs laissé entendre. Le nouveau gouvernement aura donc la tâche difficile de négocier avec l'UE un nouveau délai dans les prochains mois, en pleine période d'élections européennes et de changements à la tête de l'exécutif bruxellois. Il est fort probable que ce ne sera pas avant 2017 que les 3% seront atteints.

Dans le même temps, les nouvelles mesures pour soutenir la croissance se heurtent à une marge de manœuvre budgétaire déjà extrêmement étroite. Il s'agit à la fois des anciennes promesses, comme le pacte de responsabilité, et des nouvelles, à l'instar du pacte de solidarité et des investissements non définis encore souhaités par l'exécutif dans l'éducation et le capital humain.

A tort, la France a dernièrement mis en avant l'inflexion de politique économique en Italie pour soutenir sa démarche. C'est cependant oublier que de l'autre côté des Alpes, les réformes structurelles douloureuses ont été effectuées par Mario Monti, au prix d'une récession, et que désormais Rome affiche un déficit dans les clous, à hauteur de 2.6% du PIB. Il est donc possible pour l'Italie de faire de la relance budgétaire.

La France est encore à mi-chemin. L'agenda réformiste tant attendu en 2012 se résume au pacte de responsabilité, dont la mise en œuvre s'avère chaque jour plus compliquée, mais nul autre projet n'est sur la table. Ni la réforme de l'allocation-chômage, bloquée par les partenaires sociaux, ni la refonte durable du système des retraites.

A vouloir à tout prix contenter tout le monde - les entreprises, les ménages et Bruxelles – le gouvernement risque de ne satisfaire personne et surtout de ne pas remplir ses engagements. La consolidation budgétaire, loin d'être terminée, ne peut en aucune façon être remise à plus tard au risque pour notre pays de perdre la confiance de nos partenaires. C'est le message d'ailleurs qu'a fait passer sans ambiguïté le président de la BCE, Mario Draghi, cette semaine.

On peut espérer que le discours de politique générale du Premier ministre Manuel Valls, prévu mardi 8 avril, va permettre à la France d'avoir une feuille de route plus concrète pour la fin du quinquennat. N'oublions pas, enfin, que comparé à d'autres pays européens, les efforts demandés aux Français ont été encore faibles. Il n'y a eu ni rigueur ni austérité en France depuis le début de la crise.

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Christopher Dembik est économiste chez SaxoBank.

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