Économie : des annonces incomplètes et des chiffres à prendre avec des « pincettes »…

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Par Jacques Martineau Publié le 11 février 2022 à 6h33
Croissance France Troisieme Trimestre 1
115,6%La dette de la France fin 2021 a atteint 115,6% du PIB.

« Aujourd’hui en France, tout va bien… » Que faut-il en penser, surtout quand on relève le tapis ? C’est d’économie que l’on parle. On accumule les records ! Jamais nous n’avons atteint de telles performances : croissance, chômage, pouvoir d’achat, inflation, coût de l’énergie, etc. Nos gouvernants sont exceptionnels et jamais excessifs ? Prenons quelques chiffres et quelques affirmations avec des « pincettes ».

A propos d’une croissance de 7% en 2021, elle est confirmée par l’INSEE. Un chiffre qui montre que l’économie a tenu le « coût » et que les résultats en termes de PIB sont proches (-1%) de retrouver la situation de 2019, après une chute en 2020 de 8%. Parler de record de taux de croissance depuis 52 ans n’a aucun sens. Mais, c’est dit !

Un taux de chômage en forte baisse à 7,8% ! La meilleure performance depuis une décennie ! Cette baisse constatée sur un an, fin 2021, est de 12,6%, plus de 450.000 créations d’emplois enregistrés. Faut-il tout même faire attention à cet emballement. Pourquoi ne pas préciser que seuls sont comptés les chômeurs indemnisés de catégorie A, que plus des 2/3 des emplois proposés sont des CDD de courte durée (< 3 mois) et qu’il y a plus de 6 millions de chômeurs, de demandeurs d’emploi et de sans emploi. Au sens du Bureau International du Travail (BIT), la façon de compter est différente : c’est le taux d’activité qui est mesuré par rapport au nombre d’actifs potentiels. La lecture n’est plus la même !

Quant à l’inflation à 2,8%, il n’est pas nécessaire d’insister. D’après le FMI, après quelques rebonds, l’inflation mondiale devrait se situer en 2022 autour de 4% pour les pays avancés et de 6% pour les pays émergents. On nous annonce que l’inflation en France reste maîtrisée avec une moyenne 2021 de 2,8%, dit l’INSEE ! L’Allemagne (6%), zone euro (5%) et États-Unis (7%). Trouver l’erreur ! Premières atteintes sur les cours de l’euro et sur les taux d’intérêt Outre-Atlantique (Fed) et dans l’Union européenne (BCE). Au fait que dit-on du pouvoir d’achat de l’augmentation des salaires et des coûts réels à la consommation dans le calcul de l’indice des prix ? Tel qu’il est calculé, on en est presque à affirmer que les prix n’ont pas augmenté en France ?

C’est oublier les coûts de l’énergie. Pour le pétrole, le baril continue de monter à environ 90$. C’est sans parler des cours du gaz qui eux aussi ont enregistré des hausses vertigineuses, entraînant dans leur sillage les prix de l’électricité. La France bloque l’augmentation du gaz prévue de 40% en février à 4% jusqu’en avril ! Qui paiera ensuite ? Quant à la production d’énergie électrique par le nucléaire, sur les 100% fournis, 20% sont déjà dédiés au tarif minimum à une fausse concurrence franco-française, imposée par Bruxelles.

Désormais pour limiter les hausses de tarifs d’électricité, produite par des centrales à gaz, EDF doit produire 20% de plus d’électricité nucléaire et alii (100 > 120%) et les vendre aux partenaires européens à prix coutant pour faire baisser les prix ! Sachez que tous ces bénéficiaires peuvent vous revendre cette électricité au prix du marché ! Pour les 16 milliards de perte imposés par l’État à EDF, il faut savoir que 8 sont censés freiner l’augmentation du prix du marché ; 8 autres milliards correspondent à la perte pour EDF d’approvisionner la concurrence européenne au prix coûtant au lieu du prix du marché ! C’est vrai que le démantèlement de l’EDF est à l’ordre du jour de la Commission européenne...

Un dernier point à évoquer, le déficit et la dette en France. Certes le « quoiqu’il en coûte » a contribué à limiter l’effondrement de l’économie du pays. Mais les glissements abusifs ont plombé le déficit (-7% au lieu de -8,4%). Désormais c’est d’une dette d’État de 115,6% du PIB fin 2021 dont il s’agit ! C’est-à-dire de 2850 Md€ ! Il est vrai qu’avec des taux négatifs, on finira bien par réduire la dette à en croire Bercy !

Il est difficile de rester sans réaction devant des séries d’affirmations et de communiqués officiels sans y apporter quelques nuances. La « politique » des chiffres, des statistiques et des comparaisons n’est pas destinée à convaincre les « initiés » mais à faire passer un message simple aux « non-initiés » à savoir qu’en matière économique, la France est compétitive, que les progrès n’ont jamais été aussi importants. Que ce soit confirmé ou non !

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Après un long parcours scientifique, en France et outre-Atlantique, Jacques Martineau occupe de multiples responsabilités opérationnelles au CEA/DAM. Il devient DRH dans un grand groupe informatique pendant 3 ans, avant de prendre ensuite la tête d'un organisme important de rapprochement recherche-entreprise en liaison avec le CNRS, le CEA et des grands groupes du secteur privé. Fondateur du Club Espace 21, il s'est intéressé aux problèmes de l'emploi avec différents entrepreneurs, industriels, syndicalistes et hommes politiques au plus haut niveau sur la libération de l'accès à l'activité pour tous. Il reçoit les insignes de chevalier de l'Ordre National du Mérite et pour l'ensemble de sa carrière, le ministère de la recherche le fera chevalier de la Légion d'Honneur.

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