Le démarchage téléphonique bientôt interdit ?

Photo Jean Baptiste Giraud
Par Jean-Baptiste Giraud Modifié le 25 septembre 2013 à 9h47

"Allo oui bonjour, monsieur Dupont ? Je vous appelle pour vous proposer de - changer vos fenêtres - souscrire une assurance-vie- vous abonner à notre revue - (rayer les mentions inutiles). Retraités mères au foyer et travailleurs à domicile connaissent bien cette rengaine qui peut les déranger parfois jusqu'à deux fois par jour.

Or, un amendement discret voté à l'initiative des sénateurs du groupe RDSE (radicaux) il y a dix jours pourrait bouleverser le monde du télémarketing. L'amendement a été ajouté dans un coin du projet de loi Hamon relatif à la consommation, qui a déjà fait couler beaucoup d'encre. Ce projet de loi crée des class-actions à la française, une liste des consommateurs surendettés, permet de résilier les assurances n'importe quand ou institue la tarification à la minute dans les parkings en 2016... Mais aussi donc une liste positive de consommateurs acceptant le démarchage téléphonique !

La mort du télémarketing ?

Ainsi donc, pour pouvoir vous appeler, toute entreprise basant son développement commercial pour tout ou partie sur le démarchage téléphonique devra avoir préalablement obtenu votre accord. Tel que l'amendement est rédigé, on comprend en fait qu'une "liste positive de consommateurs" disposés à être sollicités serait constituée. Exactement le contraire de ce qui existe à ce jour ! Pour l'instant, un abonné au téléphone fixe comme mobile doit faire la démarche auprès de son opérateur pour que celui-ci l'inscrive dans la liste anti-prospection, autrefois appelée liste orange, et débaptisée depuis que France Telecom est devenu... Orange.

Si l'on tient compte du fait que sur 100 appels, moins de 2 % aboutissent à un contact utile, avec un commencement de début d'acte de vente (qu'il faut après confirmer, sachant que la loi interdit déjà la vente directe, instituant un délai d'une semaine entre les deux appels pour permettre au consommateur de réfléchir) on comprend la logique de cette liste positive. Sauf que le télémarketing emploie des dizaines de milliers de personnes à l'étranger certes, mais de plus en plus souvent en France également.

La relocalisation des centres d'appels mise à mal

Arnaud Montebourg et Fleur Pellerin n'ont-t-il pas incité l'an dernier les opérateurs téléphoniques et les acteurs du télémarketing à relocaliser leurs centres d'appels dans l'Hexagone ? Une grande réunion avait même été montée à Bercy en juillet 2012 pour les menacer de sanctions fiscales s'ils n'obtempéraient pas... Urban Call, qui vient de créer un centre d'appel en Ile-de France et créer 300 emplois suite à une relocalisation, s'est le premier inquiété de ce projet de liste positive ""cette position témoigne de l’aberration des politiques publiques menées en France : alors que le législateur a enjoint les entreprises françaises à relocaliser leurs centres d’appels, elle veut maintenant leur interdire d’exercer" affirme Urban Call dans un communiqué envoyé mercredi 25 septembre aux médias.

Prochaine étape, dans quelques semaines, l'examen en deuxième lecture par les députés du projet de loi Hamon sur la consommation dans lequel est intégré cette "liste positive" des consommateurs acceptant le démarchage téléphonique. On saura alors si les députés en maintiennent le principe, ou désavouent les sénateurs.

Le marché du télémarketing pèse en France 7,3 milliards d'euros, dont 1,7 milliard externalisés, le reste étant le coût supporté en interne par les entreprises pour leurs relations téléphoniques avec leurs clients. En 2011, 250 000 personnes travaillaient en France dans un centre d'appel ou de relation clientèle, contre seulement 30 000 à l'étranger dans des centres d'appels francophones.

Photo Jean Baptiste Giraud

Jean-Baptiste Giraud est le fondateur et directeur de la rédaction d'Economie Matin.  Jean-Baptiste Giraud a commencé sa carrière comme journaliste reporter à Radio France, puis a passé neuf ans à BFM comme reporter, matinalier, chroniqueur et intervieweur. En parallèle, il était également journaliste pour TF1, où il réalisait des reportages et des programmes courts diffusés en prime-time.  En 2004, il fonde Economie Matin, qui devient le premier hebdomadaire économique français. Celui-ci atteint une diffusion de 600.000 exemplaires (OJD) en juin 2006. Un fonds economique espagnol prendra le contrôle de l'hebdomadaire en 2007. Après avoir créé dans la foulée plusieurs entreprises (Versailles Events, Versailles+, Les Editions Digitales), Jean-Baptiste Giraud a participé en 2010/2011 au lancement du pure player Atlantico, dont il est resté rédacteur en chef pendant un an. En 2012, soliicité par un investisseur pour créer un pure-player économique,  il décide de relancer EconomieMatin sur Internet  avec les investisseurs historiques du premier tour de Economie Matin, version papier.  Éditorialiste économique sur Sud Radio de 2016 à 2018, Il a également présenté le « Mag de l’Eco » sur RTL de 2016 à 2019, et « Questions au saut du lit » toujours sur RTL, jusqu’en septembre 2021.  Jean-Baptiste Giraud est également l'auteur de nombreux ouvrages, dont « Dernière crise avant l’Apocalypse », paru chez Ring en 2021, mais aussi de "Combien ça coute, combien ça rapporte" (Eyrolles), "Les grands esprits ont toujours tort", "Pourquoi les rayures ont-elles des zèbres", "Pourquoi les bois ont-ils des cerfs", "Histoires bêtes" (Editions du Moment) ou encore du " Guide des bécébranchés" (L'Archipel).

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