Mais quelle mouche vient donc de piquer Patrick Artus, le directeur de la recherche économique de Natixis qui n’est tout de même pas le Politburo ni un repère de crypto-communistes ?
Voilà qu’il donne raison à Karl Marx… Mais ne confondons pas tout : faire le parallèle entre la situation économique et les théories marxistes n’est pas aussi absurde qu’il n’y paraît et puis il ne faut mélanger théorie marxiste et application avec le succès que l’on sait dans les ex-pays communistes bien vite convertis à l’économie de marché.
Voilà ce qu’écrit Artus donc, dans son dernier papier d’analyse.
« La dynamique du capitalisme est aujourd’hui bien celle qu’avait prévue Karl Marx.
On observe bien aujourd’hui dans les pays de l’OCDE la succession d’évolutions que Karl Marx avait prévues :
1- la baisse de l’efficacité des entreprises (ralentissement de la Productivité Globale des Facteurs), toutes choses égales par ailleurs, impliquerait une baisse du rendement du capital des entreprises ;
2- les entreprises réagissent à cette évolution en réduisant les salaires (en déformant le partage des revenus en faveur des profits) ;
3- mais cette stratégie a une limite, atteinte quand les bas salaires deviennent trop faibles (égaux au salaire de subsistance) et les « capitalistes » se lancent alors dans des activités spéculatives qui font apparaître des crises financières.
La logique de cette dynamique du capitalisme est assez implacable et on retrouve bien dans les évolutions récentes la dynamique du capitalisme décrite par K. Marx :
– recul de l’efficacité des entreprises qui pourrait réduire le rendement du capital ;
– réaction à la baisse du rendement du capital par la déformation du partage des revenus en faveur des profits et au détriment des salariés ;
– quand cette déformation atteint sa limite, utilisation d’activités spéculatives pour accroître la rentabilité du capital.
Cette dynamique aboutit nécessairement d’une part à la hausse des inégalités de revenu, d’autre part à des crises financières. »
Artus confond les explications théoriques marxistes et les effets déflationnistes de la mondialisation et du capitalisme !
Pour tout vous dire, j’ai été assez surpris par cette sortie qui pourrait sembler séduisante de prime abord, car effectivement nous pouvons tous nous accorder sur la baisse de l’efficacité des entreprises.
Là où nous pouvons logiquement diverger c’est sur les causes de cette baisse.
Pour Patrick Marx, c’est comme l’avait dit Karl. Point. Pas d’explication… Juste pauvres salariés qui n’ont pas leur juste part des profits… Soit ! Mais pourquoi !!!
Pour ma part, je pense que le capitalisme est génétiquement déflationniste puisqu’il vise à faire chaque fois un peu mieux avec un peu moins. Cela veut dire que tendanciellement, la productivité augmente et elle a considérablement augmenté depuis le Moyen Âge. Je ne vais pas vous refaire l’histoire, mais entre les tracteurs dans les champs, le train à vapeur devenu électrique, la révolution industrielle qui a justement accouché de Karl Marx, sans oublier les progrès sans précédent de l’après-Seconde Guerre mondiale pour finir par l’avènement des ordinateurs et d’Internet, la productivité a considérablement augmenté.
Le capitalisme a bien réussi à faire manger beaucoup plus de gens avec beaucoup moins d’agriculteurs, à habiller des milliards d’individus avec de moins en moins d’ouvriers, bref, à faire beaucoup mieux avec beaucoup moins. C’est dans sa nature, et la seule manière d’aller vers une augmentation des profits.
Philosophiquement, cette augmentation des profits n’est pas mal en soi. Au contraire, c’est cette recherche permanente du mieux avec moins pour avoir plus qui explique le processus d’évolution humain. Or ce processus d’évolution n’est que la suite logique du processus de création par essence divin.
Ce qui est mal, c’est lorsque cette volonté de profit vient se faire au détriment de notre environnement et que nous mettons en place un système non-soutenable à terme.
Je pense surtout qu’Artus oublie de parler des facteurs déflationnistes de la mondialisation qui sont à la base de la crise d’endettement actuelle et qui sont d’ailleurs directement la conséquence de l’insertion dans une économie globalisée des anciens pays… communistes et donc marxistes, à commencer par le plus gros d’entre eux, la Chine, qui conserve tout de même quelques vieux restes non-négligeables de marxisme.
Pourquoi payer plus un petit Français ou un Espagnol alors que je peux avoir pour le même prix 10 ou 20 petits Chinois ! Il ne faut, pour le moment, pas aller chercher plus loin que la concurrence entre les pays et la course au moins-disant social.
C’est avant tout la mondialisation qui explique la baisse des salaires et des revenus des gens, bien plus que la baisse de la productivité qui n’est, jusqu’à preuve du contraire, que ponctuelle.
La productivité des entreprises va considérablement augmenter avec la robotique et la convergence des nouvelles technologies.
Au bout du compte, nous serons capables de produire sans aucun recours ou presque aux « masses laborieuses ».
La question sera alors de savoir comment répartir la valeur ajoutée créée et si nous souhaiterons même la répartir.
Les principes marxistes sont totalement dépassés.
Néanmoins, il se posera rapidement une question incontournable. Comment répartir la richesse si cette répartition ne passe plus par les salaires, c’est-à-dire par le travail ?
À ce jour, personne n’a de réponse, même pas Karl Marx. D’ailleurs, les communistes, avec le « Stakhanovisme », n’ont jamais cherché à « supprimer » le travail.
Il est déjà trop tard, mais tout n’est pas perdu. Préparez-vous !
Article écrit par Charles Sannat pour Insolentiae