Investir dans le leadership féminin après la pandémie

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Par Stéphane de Jotemps Modifié le 10 octobre 2020 à 9h25
Entreprise Place Femmes Direction
@shutter - © Economie Matin
21%Dans le secteur de la cybersécurité, les femmes sont payées 21% de moins que les hommes, d'après la Cybersecurity Workforce Study réalisée par ISC.

Selon les données actuelles, les pays dans lesquels les femmes occupent des postes de leadership ont enregistré six fois moins de décès dus au COVID-19 que les pays dont les gouvernements sont dirigés par des hommes. Cependant, bien que les gouvernements dirigés par des femmes se soient révélés plus efficaces dans la lutte contre l’épidémie, dans la plupart des entreprises, le pouvoir de décision demeure encore majoritairement concentré entre les mains des hommes. Après la mise en garde de l’ONU, selon laquelle l’épidémie de coronavirus pourrait faire reculer d’un demi-siècle les progrès économiques réalisés par les femmes – l’avenir de nombreuses entreprises demeure plus qu’incertain.

Cependant, certaines équipes de direction ont prouvé leur potentiel. Une étude récente réalisée par l’entreprise de gestion McKinsey a révélé que les entreprises appartenant au peloton de tête en termes de diversité des genres et diversité ethnique sont 35% plus susceptibles d’avoir des rendements financiers supérieurs à la moyenne de leur secteur. En effet, la diversité est un atout avéré en termes d'image de marque, mais également en ce qui concerne la satisfaction des clients, des actionnaires et des employés.

Alors pourquoi les inégalités persistent-elles ?

Combattre les attitudes misogynes à l'égard du leadership féminin

En 2019, les entreprises du FTSE 350 ont été critiquées pour leurs commentaires à l’égard du leadership féminin. Ces commentaires ont été cités dans un rapport préparé pour la revue Alexander-Hampton, un organisme indépendant œuvrant à ce qu'au moins un tiers des membres du conseil d'administration et des postes de direction du FTSE 350 soient occupés par des femmes d'ici 2020. Les cadres de ces entreprises auraient déclaré :

- « Je ne pense pas que les femmes s'intègrent aisément dans l'environnement du conseil. »

- « Il n'existe pas beaucoup de femmes possédant les qualifications et l'expérience requises pour siéger au conseil d'administration - les questions traitées sont extrêmement complexes. »

- « La plupart des femmes fuient les problèmes ou la pression auxquels sont confrontés les membres d’un conseil d’administration. »

Ces citations illustrent de manière éclatante - et décevante - les attitudes de certains cadres dirigeants à l'égard du leadership féminin. Bien qu’un nombre croissant de femmes ont d’ores et déjà prouvé fait leur leadership. C’est le cas d’Emma Walmsley, PDG de GlaxoSmithKline (GSK) depuis 2010 et de Dame Sharon White qui a pris la tête du John Lewis Partnership plus tôt cette année. Ces femmes qui connaissent le succès restent pourtant victimes de préjugés dépassés appartenant à un autre temps, selon lesquels les femmes ne disposeraient pas d’un esprit stratégique ou n’auraient pas leur place au sein d’un conseil d'administration, règnent encore aujourd'hui.

Travailler au service du changement

Les entreprises qui continuent de sous-estimer l'importance de la diversité du leadership en ressentiront les effets à long terme. La création d'équipes de direction hétéroclites devrait être la priorité absolue des entreprises, qui se doivent de développer un bassin de talents féminins pour concrétiser le plein potentiel des femmes travaillant pour elles. Les entreprises d'aujourd'hui doivent offrir à tous les employés – peu importe leur genre - des opportunités de développement bien définies, au service de leur épanouissement professionnel et de la progression de leur carrière.

Si votre organisation est dévouée à changer et souhaite promouvoir la diversité du leadership, la mise en œuvre des trois étapes suivantes devrait constituer un bon point de départ :

1. Éradiquer les écarts de rémunération fondés sur le genre à tous les niveaux

Les femmes doivent être placées sur un pied d'égalité avec leurs collègues masculins, les inégalités de salaires devant dès lors être éradiquées. Il appartient aux entreprises de calculer l’écart de rémunération entre les hommes et les femmes de l’organisation et, si nécessaire, d’augmenter les salaires des femmes en conséquence. Lors du recrutement, les entreprises veilleront à ce que les femmes et les hommes soient placés sur un pied d'égalité dès le départ et, pour les postes de base, s'abstiendront de proposer des rémunérations différentes. Pour ceux rejoignant l’entreprise en justifiant d’une expérience antérieure, assurez-vous que le niveau de rémunération de toute personne soit calculé en fonction de ses compétences et de son expertise, plutôt que de son salaire actuel, qui pourrait être le fruit de préjugés ou d’inégalité appartenant au passé.

2. Éduquer les mentalités sur les préjugés inconscients

Les préjugés fondés sur le genre sont susceptibles d’avoir un impact sur les décisions d’embauche et de promotion. Chez certains cadres, ces biais sont parfois inconscients, les décisions étant prises sur le fondement d'hypothèses sous-jacentes. La formation sur les préjugés inconscients destinée aux personnes qui sont des acteurs des processus de rémunération et de promotion fait partie intégrante du processus d'égalité des chances. Une fois que les entreprises ont identifié les hypothèses sous-jacentes, les processus peuvent être modifiées pour devenir utiles et précis. Les hypothèses fondées sur le genre doivent être identifiées, mises à l’épreuve et recadrées. Les personnes occupant des postes de direction doivent être conscientes des atouts de la diversité et s’assurer qu’elles n’accordent pas seulement des promotions ou des augmentations de salaire aux personnes les plus bruyantes.

3. Identifier et contribuer au développement les femmes talentueuses

Il est essentiel d'identifier les femmes qui ont du talent ainsi que les meilleures trajectoires professionnelles qui renforceront leur croissance et leur impact. De nombreuses entreprises sont convaincues qu'elles progressent en matière de diversité des genres en créant des listes de planification de la relève qui ne comprennent que quelques candidats féminins. Cependant, quand aucune femme n’est là pour remplacer, les entreprises devraient identifier les causes d’une telle situation et charger quelqu’un d’y remédier. Cela consiste notamment à proposer des programmes dédiés à l'identification, au soutien et au développement des femmes qui ont du talent. Atos en est un excellent exemple, son programme de relève et de learning ciblé ayant déjà contribué à augmenter la représentation des femmes au sein des organes de direction. Si vous constatez que les hommes dominent votre équipe de direction, une stratégie robuste de planification de la relève pourrait vous permettre de faire en sorte que, dans les années à venir, votre conseil d’administration sera l’incarnation de l'égalité des sexes.

En fin de compte, avoir un conseil d'administration dominé par les femmes est bénéfique aux résultats d'une entreprise. Pour embrasser ce changement, la direction et ses cadres - qui entretiennent souvent des préjugés injustes et inconscients - devront prendre conscience de leurs propres processus décisionnels et y apporter les changements nécessaires. En mettant en place une stratégie au service d’un bassin de femmes talentueuses, les entreprises seront mieux armées pour faire face à l’avenir et bénéficieront des bienfaits inhérents à un pool de talents plus diversifié - ce qui est primordial alors que nous nous préparons à vivre une « nouvelle normalité ».

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Stéphane de Jotemps est VP Sales chez Skillsoft France.