La pression est de plus en plus forte sur les labos pour qu'ils lèvent les brevets sur leurs vaccins contre la Covid-19. Mais pour le patron de Moderna, il s'agirait d'une « erreur stratégique majeure ».
Moderna, un des laboratoires ayant développé un vaccin contre la Covid, voit d'un mauvais œil la pression internationale sur la levée des brevets. Une soixantaine de pays, dont la Chine, la Russie et même les États-Unis sont à la manœuvre au sein de l'Organisation mondiale du commerce pour une exemption des brevets anti-Covid 19. Le Parlement européen a aussi demandé à l'Union européenne de se lancer dans cette bataille. Mais cette levée pourrait avoir l'effet contraire à celui désiré, soutient le patron de Moderna.
Moderna défend les brevets
Stéphane Bancel explique au Journal du dimanche que la levée de ces brevets ne changerait rien pour la campagne vaccinale en 2021 puisque la machine industrielle n'est pas prête. « Pfizer-BioNTech construit un outil industriel pour fabriquer 4 milliards de doses et nous, 3 milliards supplémentaires. Sept milliards, c’est assez pour vacciner la planète entière avec une première dose », indique-t-il. Construire à partir de rien un outil industriel complexe demande du temps et des investissements qui ne seront peut-être pas au rendez-vous sans brevets.
Des millions de doses pour les pays pauvres
Car sans brevets, pas d'investisseurs, selon le dirigeant. « Sans eux, Moderna n’aurait pas pu lever 5 milliards de dollars depuis sa création, dont 1,8 milliard pour la seule année 2020. Comme BioNTech, nous n’aurions jamais existé sans les brevets ». La question qui se pose est celle de la vaccination dans les pays pauvres : Moderna est partenaire du programme mondial Covax qui fournit ces pays gracieusement. Le labo commencera à livrer 34 millions de doses d'ici la fin de l'année, puis 466 millions d'ici 2022. « Les 3 milliards de doses que nous produirons l’an prochain sont destinées non aux pays riches – dont la population est d’environ 1 milliard d’individus – et qui n’auront besoin que d’un rappel, mais bien à ces pays-là », ajoute Stéphane Bancel.