Redémarrage économique après-covid : les dix secteurs où la France peut exceller

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Par Thibault de La Tocnaye Modifié le 6 mai 2020 à 10h20
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8%La récession en France pourrait être de 8% en 2020.

Sur l’échiquier de l’économie planétaire, la France a des forces et des faiblesses. Avec la crise, sanitaire et économique, que nous traversons, il est encore plus facile de détecter les choix prioritaires à effectuer pour conforter et améliorer notre rang au niveau mondial. Une stratégie économique victorieuse devrait s’opérer à trois niveaux.

1. Tout d’abord, notre ambition de conquête des marchés mondiaux doit évidemment s’appuyer sur nos domaines d’excellence pour lesquels nous sommes souvent leader mondial ou tout au moins dans les top 3 ou 5. Il y a d’abord le nucléaire où, avec la thermo-fusion nucléaire et la transmutation par laser (prix Nobel décerné au Français Gérard Mourou en Octobre 2018), nous sommes en pointe. Il est clair que cette filière reste et doit rester pour nous un dispositif-clé de notre stratégie au sein de la transition énergétique. Pour mémoire, les Chinois, les Russes et les Indiens ne se gêneront pas pour essayer de nous doubler dans ce domaine. Ce n’est pas encore le cas aujourd’hui. Il y a ensuite l’aéronautique et l’industrie de défense. Il s’agit également de priorités absolues. Malgré les turbulences actuelles pesant sur Airbus, notre objectif constant doit être de demeurer, respectivement, dans le top 2 et dans le top 5 de ces secteurs à très forte valeur ajoutée et à retombées technologiques (spin off) inégalées.

La France, traditionnellement performante, voire leader, dans les sciences de la terre, des sols et de la mer (géologie-géotechnique, vulcanologie, océanologie,…), l’est aussi dans la construction et la maîtrise des volumes dans l’espace (fondations spéciales, bâtiment, ouvrages d’art,…). En fait, elle est le numéro un mondial incontesté du BTP. Ceci est doublement intéressant pour l’avenir car : a) cela correspond à un chiffre d’affaires énorme et b) ce marché sera couplé avec des innovations qui l’amplifieront de façon significative : domotique, matériaux composites de construction, recyclage des matériaux,… Autre secteur d’excellence hexagonale, connexe au précédent et très stratégique : le traitement de l’eau qui est dominé au niveau mondial par les groupes français. Quant au traitement des déchets, également complémentaire à la construction et au traitement de l’eau (fortes synergies), nous sommes en passe de devenir premier mondial. Pour être assez complet dans cette recension de l’excellence française il faut bien sûr citer avec une mention particulière la double filière agricole et agro-alimentaire où nous sommes 2e européen et 5e mondial mais en perte de vitesse…. pour le moment... et cela devra changer ! En effet, cette dégradation constante à est à imputer avant tout aux gouvernements qui se sont succédé sans aucune vision et aucun volontarisme stratégiques en matière de ré-industrialisation et de reconquête de l’espace agricole et rural. Mais les Français ne l’acceptent plus. C’est un des enseignements de la crise actuelle. Sans oublier enfin le luxe, spécificité française, où nous sommes solide leader mondial et dont les passerelles sont nombreuses avec le tourisme, autre source importante de revenu mais par définition non exportable.

2. Parallèlement, il est capital de bien prendre en compte les ruptures technologiques qui se profilent à moyen et long terme et qui vont entraîner une recomposition des rapports de force industriels et économiques mondiaux. Cela doit être une opportunité pour nous. Je veux parler d’innovations scientifiques, techniques et industrielles majeures, comme il en existe deux ou trois par siècles, en l’occurrence l’intelligence artificielle (IA), le stockage et le traitement des données (Data) et l’informatique quantique.

Au sein de ces champs d’investigation d’avenir, qui sont d’ailleurs imbriqués, malgré une certaine avance de la Chine et des Etats-Unis, la France a plusieurs points forts et rien n’est joué. En intelligence artificielle (IA), elle peut compter sur une école de mathématique, en pointe niveau mondial, apte à toutes les révolutions ainsi que sur le tout récent supercalculateur Jean Zay (Janvier 2020) qui nous met dans la cour des grands. Sur le plan de l’accumulation des Données, « matériau » de base de l’intelligence artificielle, la France est probablement leader mondial pour les applications de celle-ci dédiées au « B2B » (industrie) grâce à la collecte de Data dans ses secteurs d’excellence que sont l’énergie, le nucléaire et l’aérospatial. Cela peut constituer un sérieux contrepoids au leadership de la Chine et des EU dans l’IA « grand public ». Quant aux ordinateurs quantique, qui déclencheront une rupture technologique plus importante encore que celle apportée par les nanotechnologies, la photonique, les IRM et laser, la France a tous les atouts pour rattraper la Chine, les EU et le Royaume-Uni, ayant l’ensemble de la panoplie scientifique adéquate à sa disposition (excellence unique de notre recherche en physique et intrication quantiques, photonique, calcul quantique et cryptographie) dans un processus qui en est encore au stade de la recherche.

3. Enfin, notre stratégie de conquête économique mondiale, en même temps que de recouvrement de souveraineté nationale, ne doit pas exclure - bien au contraire - l’activation (ou l’accélération), face à la concurrence chinoise et américaine, de grands projets européens de coopération sur des chantiers qui se chiffrent en dizaine de milliards, donc assez difficilement portables au seul niveau français. En revanche, il sera judicieux de sélectionner et privilégier les programmes où le haut degré de qualification de la France est avéré ! Nous en connaissons un certain nombre, totalement fondamentaux sur l’échiquier de la concurrence mondiale (Chine, Etats-Unis, Russie et demain Inde, Corée, Brésil,…) : la poursuite du projet en cours ITER (thermo-fusion nucléaire préindustrielle) ; le lancement d’un avion supersonique de transports de passagers ; la construction absolument stratégique d’unités de production européenne de semi-conducteurs à taille mondiale (à partir, par exemple, du franco-italien STMicroelectronics) ainsi que de micro-processeurs, véritables cerveaux de tout équipement électromécanique; l’élaboration d’un moteur de recherche pouvant égaler Google et Baidu; la relance de la conquête spatiale, la recherche sur le vivant et les biothérapies;… Ces grands programmes européens auront pour effet d’orchestrer et d’amplifier les secteurs de prédilection de la recherche française tant fondamentale que préindustrielle.

En définitive, deux dernières filières à fort débouché devraient se dégager en tant que locomotives, en sus des huit secteurs français cités plus haut (nucléaire, aéronautique, armement, BTP, eau, déchets, agro-alimentaire, luxe), qui consolideraient notre place au niveau mondial : d’une part, un secteur « transversal », les matériaux composites (nouvelles générations durables, produits bio-sourcés, fabrication additive, matériaux pour aéronautique, automobile, construction,…) et d’autre part un secteur qui doit redevenir une priorité française, le biomédical-santé (biologie moléculaire et cellulaire, recherche médicale clinique, biothérapies, bio-contrôle animal et végétal, santé digitale,…).

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Ingénieur centralien, dirigeant-fondateur d'entreprises industrielles et high-tech Membre du bureau National du RN, Directeur de l'Institut de Formation des Elus   Conseiller régional PACA

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