L’association Anticor, dont la spécialité est de signaler au parquet d’éventuels faits de corruption commis par des élus ou membres de l’administration de l’État, vient de saisir la Cour de la justice de la République (CJR) au sujet de l’application TousAntiCovid, financée entièrement par l’État en l’absence de tout appel d’offres.
Des marchés passés en méconnaissance des règles de la commande publique
Présentée au moment de son lancement comme ayant été développée à titre gratuit par pusieurs entreprises du secteur privé, l’application TousAntiCovid (anciennement StopCovid) coûte en réalité cher, très cher. Mais, problème : en dépit des coûts faramineux, aucun appel d’offre, aucune procédure de mise en concurrence n’avait été lancée. Pour l’association Anticor, nous sommes face à un délit de favoritisme.
Anticor, dont l’objet social est de « lutter contre la corruption et rétablir l’éthique en politique » mais aussi « réhabiliter le rapport de confiance qui doit exister entre les citoyens et leurs représentants politiques et administratifs », a donc choisi de saisir la Cour de la justice de la République (CJR). Dans sa plainte, Anticor rappelle que le gouvernement est tenu de procéder à un appel d’offres à partir de 139.000 euros HT pour les marchés de fournitures et de services, selon les règles de la commande publique. Chacun des postes de dépenses, qu’il s’agisse de la communication ou de l’exploitation de l’application, auraient dû faire l’objet d’un appel d’offres ou d’une procédure de mise en concurrence au regard de leurs montants.
TousAntiCovid : un marché de 6,5 millions euros/an, passé sans aucun appel d’offres
Alors, quels sont les montants en jeu ? Début juin 2020, L’Obs révélait que la maintenance et l’hébergement de l’application StopCovid étaient assurés par la société Outscale, filiale de Dassault Systèmes, pour un coût d’exploitation estimé à 200.000 à 300.000 euros par mois. Cet ordre de grandeur des montants engagés a par la suite été reconnu par Cédric O, secrétaire général chargé du numérique, lors d’une conférence de presse du 23 juin. Ce jour-là, il a évoqué 40.000 euros mensuels pour l’hébergement informatique, 40.000 à 80.000 euros par mois pour la maintenance et le développement de l’application, 50.000 euros par mois d’appui au support utilisateur et 30.000 euros par mois pour les frais de déploiement.
Mais selon Anticor, les coûts ont vite grimpé : 69.676 euros/an pour les licences, 720.000 euros/an pour le support utilisateur, 432.000 euros/an pour l’animation du déploiement, 576.000 euros/an pour l’hébergement et 2.793.000 euros/an pour la campagne de communication. Soit, en tout, un coût de 6,5 millions euros/an. Il est évident que passer un marché aussi important sans aucun appel d’offre est tout simplement illégal…