Pourboires défiscalisés : la fin d’un avantage salarial en 2026 ?

Alors que la loi de finances a reconduit le régime de faveur pour une année supplémentaire, l’incertitude plane déjà sur 2026. Pour les salariés du secteur de la restauration, les pourboires défiscalisés pourraient bien vivre leur dernière année d’existence si les arbitrages budgétaires du gouvernement évoluent. Le débat s’intensifie.

By Alix de Bonnières Published on 21 septembre 2025 17h00
pourboires défiscalisés
Pourboires défiscalisés : la fin d’un avantage salarial en 2026 ? - © Economie Matin
150Les pourboires représentaient en moyenne entre 150 et 250 euros mensuels pour un serveur en zone urbaine à forte fréquentation touristique.

Depuis le 1er janvier 2022, les pourboires remis volontairement par les clients aux salariés en contact avec le public sont exonérés d’impôt sur le revenu, à condition que ces derniers perçoivent une rémunération inférieure à 1,6 SMIC. Cette mesure temporaire, instaurée pour renforcer le pouvoir d’achat dans les secteurs en tension, a été prolongée jusqu’au 31 décembre 2025. Un répit bienvenu pour de nombreux travailleurs, notamment dans la restauration.

Une manne pour l'État

D’après les précisions du Conseil national des entreprises de coiffure, cette prorogation a été entérinée dans la loi de finances pour 2025, définitivement adoptée en mars dernier. Le dispositif concerne non seulement l’exonération fiscale, mais également une exonération de cotisations sociales sur les pourboires perçus via les terminaux de paiement ou en espèces, tant que leur versement est volontaire et correctement tracé. Un double avantage pour les employés modestes, qui bénéficient d’un gain net plus significatif.

Or, cette situation pourrait ne pas perdurer. Le ministère de l’Économie et des Finances travaille actuellement sur l’élaboration du budget 2026. Dans ce cadre, les pistes de suppression ou de révision du régime de défiscalisation sont à l’étude. Selon une enquête relayée par Europe 1 le 4 septembre 2025, le gouvernement envisage de réintégrer ces revenus dans le droit commun fiscal dès le 1er janvier 2026. La mesure permettrait, selon les projections internes de Bercy, de dégager plusieurs centaines de millions d’euros sur une année pleine.

La fin de la défiscalisation des pourboires menacerait-elle l’attractivité des métiers de service ?

Dans un contexte de pénurie de main-d'œuvre, la remise en cause de la défiscalisation des pourboires inquiète fortement les professionnels. Le secteur de la restauration, déjà fragilisé par des difficultés de recrutement persistantes, redoute un effet repoussoir supplémentaire. « On va revenir au black », s’est alarmé Thierry Marx, président de l’Union des Métiers et des Industries de l’Hôtellerie (UMIH), dans une déclaration à RMC/BFMTV datée du 3 septembre 2025. Pour lui, ce retour à la fiscalisation inciterait les employeurs et les salariés à privilégier les paiements non déclarés.

Laurent Barthélémy, président de la branche saisonniers de l’UMIH, réclame quant à lui « un statu quo pérenne pour l’ensemble des salariés ». Il met en garde contre les effets d’une politique fiscale trop rigide sur la fidélisation des employés, alors que 41 % d’entre eux envisageraient de quitter la profession en cas de suppression de l’exonération, selon une étude citée par Europe 1.

Un calendrier budgétaire serré

Une proposition de loi enregistrée sous le numéro 1813 a été déposée à l’Assemblée nationale le 16 septembre 2025. Elle vise à prolonger de deux ans le dispositif d’exonération sur les pourboires, tant sur le plan fiscal que social. Mais à ce jour, le texte n’a pas encore été débattu en séance ni inscrit à l’ordre du jour prioritaire du gouvernement. Sa trajectoire parlementaire reste donc incertaine.

Le calendrier budgétaire, quant à lui, est serré. Le projet de loi de finances pour 2026 doit être présenté en Conseil des ministres début octobre, avant d’être soumis à l’examen du Parlement. Si aucune disposition spécifique n’est votée d’ici là pour maintenir l’exonération, celle-ci prendra fin au 31 décembre 2025. Dans ce cas, les pourboires redeviendraient automatiquement imposables à compter du 1er janvier 2026.

La question dépasse la simple technique fiscale. Pour de nombreux salariés payés à peine au-dessus du minimum légal, les pourboires représentent un complément de revenu substantiel. Le retour à une imposition complète réduirait significativement leur pouvoir d’achat. En 2024, selon les données de l’UMIH, les pourboires représentaient en moyenne entre 150 et 250 euros mensuels pour un serveur en zone urbaine à forte fréquentation touristique.

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