Le cinéma français est-il trop subventionné ?

Le cinéma français est-il trop subventionné ? Le dernier rapport de la Cour des comptes suscite un vif débat en questionnant la pertinence et l’efficacité des aides d’État à l’industrie cinématographique.

Axelle Ker
Par Axelle Ker Publié le 21 septembre 2023 à 16h00
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Le rapport de la Cour des comptes bouscule la scène cinématographique

La Cour des comptes, dans son rapport du 20 septembre 2023, s'est penchée sur plus de dix ans de gestion du Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC). Si elle reconnaît l'apport substantiel du CNC, avec près de 700 millions d'euros de ressources annuelles, pour la survie du cinéma durant la pandémie, elle recommande néanmoins « une réforme approfondie des aides ». La principale recommandation est qu'il ne devrait pas nécessairement y avoir moins de films, mais « moins de films qui ne rencontrent pas leur public », et ce, malgré la fin de la crise sanitaire, a précisé Pierre Moscovici, Premier président de la Cour des comptes.

Pierre Moscovici profite de la publication du rapport, pour rappeler aux acteurs et réalisateurs, comme Justine Triet entre autres, Palme d'Or du festival de Cannes de 2023, qui n'avait pas hésité à cracher dans la soupe, malgré avoir reçu à quatre reprises, des subventions de l'État. Elle avait accusé, lors de son discours de remise de prix, « le gouvernement néo-libéral » de « casser l’exception culturelle » et de sacrifier l'aide aux jeunes auteurs. « Sur 821 millions d'euros, 778 millions proviennent de taxes, faisant du CNC le quatrième établissement public bénéficiant de taxes », précise ainsi le Premier président de la Cour des comptes.

Cinéma français : plus de films mais moins de public en salle

Les aides au cinéma continuent de croître, avec notamment une hausse des crédits d'impôts pour le cinéma atteignant 160 millions d'euros en 2022. De plus, la part d'argent public dans le cinéma français est passée de 15,6% à 22,3% entre 2012 et 2018. Ces chiffres sont d'autant plus critiqués que l'industrie semble ne pas répondre aux attentes du public. En effet, alors que 12 nouveaux films sont proposés chaque mercredi dans nos salles de cinéma et que le nombre de films français produits chaque année a augmenté (+ 40% en 18 ans), plus d’un tiers des films font moins de 20 000 entrées ! Autre constat alarmant, c'est le recul de l'exportation de notre cinéma. Comme l'avaient indiqué dès 2020 nos confrères de Causeur, les données d'Unifrance montrent une baisse de 47% des entrées à l'international en 2018. Un cinéma autrefois reconnu mondialement semble désormais confiné à un « public de niche ». Des voix se lèvent pour déplorer un cinéma qui aurait tendance à trop se focaliser sur des thématiques jugées « woke », et qui, par sa nature élitiste, s'éloignerait du grand public. En effet, selon le rapport, seulement 2% des films sont rentabilisés en salle.

De l'autre côté, Dominique Boutonnat, président du CNC, regrette que la Cour se concentre uniquement sur le succès des films en salle, arguant que l'institution travaille aussi sur d'autres aspects, comme l'éducation à l'image ou le soutien aux festivals. Pierre Moscovici, appuyé par Matignon, a répondu : « Le CNC est là pour que le cinéma puisse échapper à cette logique de l’argent, mais une rationalisation pour plus d’efficience est souhaitable ».

Le débat est loin d'être clos, mais une chose est certaine : la remise en question est nécessaire pour redonner à notre 7ème art ses lettres de noblesse.

Axelle Ker

Diplômée en sciences politiques et relations internationales, journaliste chez Économie Matin & Politique Matin depuis septembre 2023.

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