Rénovation énergétique : le défi n’est plus seulement thermique, il est humain

Alors que la France vise plusieurs centaines de milliers de rénovations énergétiques d’ici 2030, une réalité s’impose sur le terrain : le manque d’artisans qualifiés freine la transition.

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By Sylvain Gruelles Published on 14 décembre 2025 5h47
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Rénovation énergétique : le défi n’est plus seulement thermique, il est humain - © Economie Matin
32%Seuls 32% du parc de maisons individuelles a fait l’objet de travaux de rénovation.

Cette crise de compétences est désormais le véritable goulet d’étranglement du secteur.

On a multiplié les aides, les réglementations et les objectifs, mais on a oublié de se demander : qui va réellement faire les travaux ?

Une tension structurelle sur les compétences

Selon France Stratégie et la DARES, il faudra entre 170 000 et 250 000 emplois supplémentaires d’ici 2030 pour atteindre les objectifs de rénovation énergétique des bâtiments.
Or, sur le terrain, la filière peine déjà à recruter et à retenir des professionnels qualifiés.

Le label RGE – Reconnu Garant de l’Environnement, indispensable pour bénéficier des aides publiques, illustre cette tension :

  • Le nombre d’entreprises certifiées RGE est passé de 65 000 en 2022 à environ 61 000 en 2024, selon les chiffres de l’ADEME et de la CAPEB.
  • Une étude spécialisée estime même qu’à peine 55 000 entreprises RGE réalisaient effectivement des chantiers de rénovation au début de 2024.

Ces artisans sont aujourd’hui une ressource rare, parfois introuvable dans certaines régions. Sans eux, aucune rénovation performante n’est possible.

Un contexte économique fragilisé

À cette pénurie s’ajoutent des difficultés structurelles :

  • 48 % des entreprises du bâtiment déclarent subir des retards de paiement, selon Batiactu (2025).
  • Les délais de règlement dépassent en moyenne 14 jours au-delà des échéances légales, aggravant la trésorerie et la capacité d’investissement des petites structures.
  • Parallèlement, les ajustements budgétaires autour de MaPrimeRénov’ fragilisent encore la visibilité des professionnels, alors même que la demande des ménages reste forte.

Résultat : des chantiers qui se décalent, des coûts qui augmentent, et une perte de confiance pour les particuliers.

L’artisan-maître d’œuvre : un maillon stratégique

Le maître d’œuvre et artisan incarne une génération d’acteurs capables de coordonner, diagnostiquer et garantir la qualité globale d’un chantier. Pour lui, la réussite de la rénovation énergétique repose sur l’humain avant tout :

La performance énergétique ne dépend pas uniquement des matériaux, mais de la compétence de celles et ceux qui les mettent en œuvre.

Je plaide pour :

  • Un investissement massif dans la formation et la revalorisation des métiers artisanaux.
  • Une meilleure coordination entre maîtres d’œuvre, artisans et collectivités.
  • Une simplification des dispositifs RGE, pour redonner envie aux artisans de s’y engager.

Un enjeu de société

Derrière les objectifs de transition écologique, c’est tout un modèle économique et humain qu’il faut repenser.
L’artisanat du bâtiment représente plus de 99 % des entreprises du secteur et constitue un pilier de l’économie locale et patrimoniale. Le défi de la rénovation française ne se jouera pas dans les laboratoires, mais sur les chantiers.

Sans artisans qualifiés, la transition énergétique restera un vœu pieux.

Sgruelles

maître d’œuvre et artisan expert

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