Smartphone trop tôt : un risque bien réel pour la santé mentale des enfants

Le Journal of Human Development and Capabilities a publié, le 22 juillet, une étude d’envergure menée auprès de plus de 100 000 jeunes âgés de 18 à 24 ans à travers le monde. Selon elle, une exposition trop précoce au smartphone affecte profondément la santé mentale à l’âge adulte. Et en France, où les enfants reçoivent leur premier appareil aux alentours de 11 ans, la sonnette d’alarme est plus que jamais justifiée.

Stephanie Haerts
By Stéphanie Haerts Published on 30 juillet 2025 9h30
Smartphone cancer
Les enfants sont les plus exposés : l’Anses recommande un usage encadré et raisonné. - © Economie Matin

Des effets tangibles sur la santé mentale : agressivité, détachement, mal-être

Outil de communication, gage de sécurité, moyen d’intégration sociale : le smartphone s’est imposé dans le quotidien des collégiens. Pourtant, les données recueillies par l’organisation à but non lucratif Sapien Labs montrent un revers préoccupant. Les jeunes ayant reçu leur premier téléphone portable avant l’âge de 13 ans présentent des signes marqués de baisse d’estime de soi, de moindre résilience émotionnelle et de déconnexion affective.

« Nos données indiquent que la possession précoce d’un smartphone, et l’accès aux réseaux sociaux qu’elle implique souvent, est liée à un profond changement dans la santé mentale et le bien-être au début de l’âge adulte », déclare Tara Thiagarajan, fondatrice de Sapien Labs dans des propos rapportés par le Huffington Post. Les résultats sont sans équivoque. Plus l’enfant est jeune au moment de la première utilisation, plus les troubles sont accentués. Les répondants ayant reçu un téléphone avant 13 ans rapportent des sentiments d’agressivité, des épisodes d’hallucinations, un sentiment de vide et, dans les cas les plus graves, des pensées suicidaires.

Les filles en première ligne

L’étude révèle également une disparité de genre saisissante. Parmi les jeunes femmes ayant reçu un smartphone entre 5 et 6 ans, 48 % déclarent avoir été confrontées à des pensées suicidaires. Chez leurs homologues masculins, le chiffre atteint 31 %. La vulnérabilité émotionnelle semble particulièrement marquée chez les filles, avec une confiance en soi réduite, un sentiment d’insécurité intérieur, et une exposition plus forte aux dynamiques toxiques des réseaux sociaux.

Le Global Mind Project, sur lequel s’appuie cette étude, révèle que l’indicateur de santé mentale (Mental Health Quotient) chute dramatiquement avec l’âge d’acquisition du téléphone : d’un score de 30 pour un premier appareil à 13 ans, il tombe à 1 lorsque l’enfant l’obtient à 5 ans. Une dégradation d’autant plus préoccupante qu’elle reste souvent invisible aux yeux des parents.

Les réseaux sociaux, catalyseurs de mal-être et de tensions familiales

L’étude pointe du doigt l’accès anticipé aux réseaux sociaux comme facteur déterminant. Selon les données recueillies, l’utilisation précoce de ces plateformes augmente de 13 % les risques de conflits familiaux, de 10 % le cyberharcèlement, et de 12 % les troubles du sommeil. Ces effets cumulatifs forment un terrain fertile à l’émergence de pathologies mentales durables.

Pour Tara Thiagarajan, cité par le Huffington Post, il est temps d’adopter une régulation stricte, à l’image de celles encadrant la consommation d’alcool ou de tabac : « Nous exhortons les décideurs à adopter une approche préventive [...] en limitant l’accès aux smartphones pour les moins de 13 ans, en rendant obligatoire l’éducation aux technologies numériques et en renforçant la responsabilité des entreprises ».

En France, une généralisation inquiétante dès le CM2

Dans l’Hexagone, le smartphone devient un cadeau presque systématique dès l’entrée au collège. Selon l’Observatoire de la parentalité et de l’éducation numérique, l’âge moyen d’obtention se situe autour de 11 ans. Une étude Médiamétrie signalait même un abaissement à 9 ans et 9 mois en 2023.

Si la logique parentale repose souvent sur la sécurité ou la socialisation, l’étude incite à reconsidérer cette stratégie. Les experts préconisent un accompagnement renforcé, une discussion systématique avec l’enfant sur les usages numériques et, surtout, un report de l’achat au-delà de 14 ans.

Stephanie Haerts

Rédactrice dans la finance et l'économie depuis 2010. Après un Master en Journalisme, Stéphanie a travaillé pour un courtier en ligne à Londres où elle présentait un point bourse journalier sur LCI. Elle rejoint l'équipe d'Économie Matin en 2019, où elle écrit sur des sujets liés à l'économie, la finance, les technologies, l'environnement, l'énergie et l'éducation.

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