Annoncée dans le budget 2026, la taxe sur les holdings patrimoniales est vertement contestée par Gabriel Zucman. L’économiste juge le dispositif trop étroit, insuffisamment rentable et structuré pour ménager les ultra-riches, malgré un affichage de lutte contre l’optimisation fiscale.
Gabriel Zucman flingue la taxe sur les holdings annoncée par le gouvernement

Le 14 octobre 2025, en dévoilant son projet de loi de finances, le gouvernement a confirmé une taxe sur les holdings patrimoniales, au taux annoncé de 2 %. Dans ce contexte, et alors que le gouvernement vise un déficit public à 4,7 % du PIB en 2026, Gabriel Zucman a formulé une critique ciblée : selon lui, l’impôt ainsi conçu ne fera pas payer davantage les ultra-riches.
Une taxe sur les holdings qui vise l’optimisation… mais protège les ultra-riches
Le projet présenté précise que la taxe sur les holdings patrimoniales a pour objet de « faire échec aux stratégies de contournement de l’impôt par la thésaurisation de revenus non distribués ». Cette formulation, reprise du texte budgétaire, met en avant une intention claire : cibler l’usage de holdings pour différer ou éviter l’impôt. Or, dans le même temps, le gouvernement exclut les biens affectés à l’activité professionnelle des holdings, ce qui restreint l’assiette taxable et, par voie de conséquence, le rendement. Selon les éléments communiqués le 14 octobre, le taux de 2 % s’appliquerait ainsi à un périmètre limité des holdings, avec un tri entre actifs professionnels et patrimoniaux, ce qui complexifie l’application et multiplie les zones grises.
Dans ses premières réactions publiques, Gabriel Zucman, qui a proposé la « taxe Zucman » sur les ultra-riches que le gouvernement ne veut pas appliquer, s’attaque précisément à cette architecture des holdings : pour lui, concentrer l’effort sur l’enveloppe juridique plutôt que sur le patrimoine global des ultra-riches revient à laisser intactes les stratégies principales. « Tout a été fait pour épargner Bernard Arnault et les milliardaires français », a-t-il fustigé sur X en visant un budget qui, malgré la taxe sur les holdings, demanderait surtout des efforts aux autres catégories.
Le cœur de la critique : un dispositif conçu pour rapporter peu
Au-delà des holdings, Zucman défend depuis des mois un impôt plancher de 2 % sur les patrimoines supérieurs à 100 millions d’euros (soit 1.800 ménages en France), sans exonérations, afin d’aligner la contribution effective des ultra-riches. Cette approche ne dépend pas de l’existence de holdings, puisqu’elle vise le patrimoine consolidé du foyer. En comparaison, la taxe du gouvernement sur les holdings est présentée comme une « version atténuée » ou un « ersatz » de la taxe Zucman : le rendement évoqué publiquement pour la taxe sur les holdings tourne entre 1 et 1,5 milliard d’euros, très en-deçà de l’ordre de grandeur avancé par Zucman pour un impôt plancher véritablement universel.
De ce point de vue, les paramètres retenus sur les holdings paraissent taillés pour limiter l’impact. D’une part, l’exclusion des biens professionnels dans les holdings retire une part substantielle des actifs, même quand ces actifs procurent contrôle et dividendes. D’autre part, la distinction des flux — revenus distribués, non distribués, plus-values latentes — laisse entière la possibilité d’organiser la trésorerie des holdings afin de minimiser l’impôt. Enfin, le contrôle effectif suppose un suivi fin des mouvements intragroupes entre holdings, ce qui requiert des moyens administratifs élevés et crée un risque de contentieux prolongés, alors que l’objectif affiché par le gouvernement est une recette rapide.
Pourquoi l’option « holdings » diverge de l’impôt plancher de 2 %
Dans l’architecture proposée par Gabriel Zucman, l’impôt plancher neutralise les arbitrages : si un foyer d’ultra-riches acquitte déjà l’équivalent de 2 % de son patrimoine en prélèvements, il ne doit rien ; sinon, il paie la différence. Le mécanisme ne dépend ni de la forme sociétaire, ni des holdings utilisées ; il agrège l’ensemble des actifs pour fermer les échappatoires. C’est précisément là que naît la critique : en ciblant les holdings, le texte gouvernemental ré-ouvre les débats d’assiette, d’évaluation et de frontières entre biens professionnels et patrimoniaux. En d’autres termes, l’efficacité diminue à mesure que croissent les exceptions, et les ultra-riches peuvent à nouveau arbitrer entre holdings françaises, étrangères, ou structures interposées pour diluer l’impôt. Des estimations de rendement d’environ 1 à 1,5 milliard d’euros circulent pour cette taxe, quand l’impôt plancher défendu par Zucman est décrit comme potentiellement beaucoup plus productif.
La taxe sur les holdings apparaît calibrée pour un compromis politique : elle affiche une action contre l’optimisation fiscale, mais préserve les actifs clés des holdings qualifiés de professionnels, réduisant mécaniquement le nombre d’entités assujetties. Dans cette logique, le gouvernement sécurise un symbole anti-optimisation sans toucher la structure de fortune des ultra-riches.
