Téléphone, vélo électrique, console, voiture hybride, sèche-cheveux : derrière ces objets du quotidien, il y a des aimants puissants… et donc des terres rares. Or l’Union européenne importe l’essentiel de ces métaux critiques. Quand les prix grimpent ou que la Chine serre le robinet, la facture finit souvent dans notre panier.
Terres rares : elles sont partout, et elles ne viennent pas de France, ni même d’Europe !

Les terres rares sont au cœur d’une tension mondiale qui pèse directement sur l’Union européenne. Les importations se concentrent chez un petit nombre de fournisseurs, la Chine en tête, tandis que les prix s’emballent après des chocs d’offre récents. L’oxyde de néodyme-praséodyme, crucial pour les aimants, a bondi d’environ 63 à 88 dollars/kg en Chine après l’arrêt d’expéditions d’un fournisseur américain, un plus haut de plus de deux ans. Cette flambée rappelle à quel point la sécurité d’approvisionnement en terres rares conditionne nos produits du quotidien.
Terres rares et Union européenne : qui tient les clés des importations ?
L’Union européenne importe la majorité de ses terres rares. Elle a acheté 5 984 tonnes à la Chine en 2024, devant la Russie (3 676 t) et la Malaisie (2 579 t) ; viennent ensuite le Japon, le Royaume-Uni, le Vietnam, les États-Unis ou la Norvège. Autrement dit, les importations de terres rares restent concentrées, donc vulnérables aux décisions d’un petit nombre de capitales. L’UE a bien fixé un garde-fou : éviter que plus de 65 % d’une matière critique ne provienne d’un seul pays tiers, afin de réduire le risque d’otage géopolitique.
Surtout, la Chine ne domine pas seulement les importations européennes de terres rares ; elle tient la chaîne mondiale. Elle concentre environ 90 % des capacités de raffinage et près de 70 % de la production minière, ce qui lui donne un levier décisif sur l’offre, donc sur les prix payés en Union européenne. L’arrêt d’envois de MP Materials vers la Chine a supprimé 7–9 % des flux d’oxydes alimentant les usines chinoises ; il a laissé « un grand vide » pour les fabricants d’aimants, observe l’analyste Ryan Castilloux, cité par Reuters. Par conséquent, la moindre secousse se répercute vite sur les importations et sur le coût des terres rares dans l’UE.
Terres rares et importations : quels produits, quels effets pour le consommateur ?
Les terres rares servent à fabriquer des aimants permanents ultra-performants pour moteurs électriques, éoliennes, disques durs, haut-parleurs et drones. Ainsi, un choc d’offre pèse sur toute la chaîne. L’oxyde de NdPr a grimpé d’environ 63 à 88 dollars/kg en quelques semaines. En parallèle, les flux d’aimants bougent vite : les exportations chinoises d’aimants en terres rares vers les États-Unis ont atteint 619 tonnes en juillet 2025, soit +75,5 % sur un mois, ce qui témoigne de la sensibilité des marchés. De fait, quand la priorité change ailleurs, l’Union européenne subit la contrainte sur ses importations.
Cette situation est aussi politique. La perspective de 200 % de surtaxes américaines sur les aimants en terres rares ajoute une tension supplémentaire sur les importations mondiales. Dans le même mouvement, Donald Trump annonce des soutiens massifs à la filière américaine : 400 millions de dollars du Pentagone pour MP Materials, un prix plancher et des contrats d’achat garantis, « Il nous faut un projet Manhattan pour les terres rares », résume Joshua Ballard, directeur général d’USA Rare Earth. Concrètement, ces annonces peuvent détourner des volumes, faire grimper les prix et, finalement, renchérir certains produits finis en Union européenne.
Terres rares et Chine : comment l’Europe se protège-t-elle, et que fait la France ?
L’Union européenne s’emploie à desserrer l’étau de la Chine sur les terres rares en diversifiant ses importations et en bâtissant des capacités internes. L’UE est en effet dépendante des importations chinoises, malgré les nouveaux outils de politique industrielle. Par ailleurs, les objectifs européens visent à développer l’extraction, renforcer le recyclage et éviter des dépendances excessives vis-à-vis d’un seul fournisseur, afin de sécuriser l’accès aux terres rares le long des chaînes de valeur.
Côté français, des gisements de terres rares sont identifiés sur le territoire, mais ils ne sont pas exploités aujourd’hui, notamment pour des raisons environnementales et d’acceptabilité locale ; la stratégie privilégie donc une filière de recyclage des aimants et des composants, qui émerge progressivement. Autrement dit, la France parie d’abord sur l’économie circulaire des terres rares, même si ces volumes ne suffiront pas à court terme à couvrir la demande. En attendant, l’Union européenne reste exposée aux cycles de prix et aux arbitrages de la Chine sur ses importations, ce qui appelle des choix d’achat plus durables côté consommateurs et des investissements soutenus côté industriels.
