Comment aggraver une crise en deux leçons (1/2)

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Par Brendan Brown Modifié le 15 avril 2020 à 6h04
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110 MILLIARDS €Le plan d'urgence français contre le Covid-19 devrait mobiliser 110 milliards d'euros.

La crise du Covid-19 aurait pu se dérouler très différemment si les autorités avaient fait d’autres choix. Mais le pouvaient-elles vraiment ?

Une analyse contrefactuelle peut nous permettre de prendre conscience de l’énormité de la situation actuelle.

Ce qui aurait pu se dérouler

Supposons que la pandémie de Covid-19 se soit propagée à travers le monde dans le contexte d’un système monétaire sain, disons par exemple un régime d’étalon-or.

Dans ce scénario contrefactuel, il n’y aurait pas d’inflation excessive du prix des actifs, pas de Réserve fédérale prête à réduire les taux d’intérêt à zéro et à se lancer dans des programmes d’assouplissement quantitatif sans fin (et sans limites) – et il serait impossible de déployer un programme gouvernemental massif visant à garantir les dettes émises par les entreprises, dicté par la realpolitik du capitalisme de copinage.

Les gouvernements solvables, bénéficiant d’un haut degré de confiance à l’échelle mondiale dans leur volonté de maintenir la convertibilité de leur monnaie nationale en or, seraient en capacité de lancer de vastes programmes de couverture sociale pour aider leurs citoyens à faire face aux difficultés économiques provoquées par l’épidémie.

Une condition clé pour s’assurer du succès d’une telle politique est d’arriver à convaincre les investisseurs que des actions correctives seront mises en place après la pandémie pour rétablir la bonne santé des finances publiques, ce qui implique que les gouvernements n’auront pas recours à la dévaluation de leurs monnaies.

Et pour les pays moins solvables ?

Les pays qui ne bénéficient pas de la confiance des investisseurs risqueraient d’avoir plus de difficultés à étendre leurs programmes sociaux. Dans certains cas, cela entraînerait une hausse immédiate et brutale des taux d’intérêts, pendant que le grand public se précipiterait pour convertir ses devises en or, poussant les autorités à suspendre temporairement l’étalon-or et à financer le déficit par la création monétaire.

Même dans les pays qui bénéficient d’une situation financière solide, les préoccupations concernant la qualité de la dette, en particulier sur les dettes contractées par les ménages et les entreprises dans les secteurs les plus lourdement touchés, ainsi que concernant les retombées sur la solvabilité du système bancaire, entraîneraient une augmentation de la demande de « monnaie centrale » (les billets, les dépôts à la banque centrale et l’or).

En revanche, les autorités monétaires de ces pays auraient eu la capacité à augmenter l’offre de monnaie centrale non métallique et ainsi à remédier à tout risque de pénurie de liquidités (empêchant ainsi une augmentation brutale des taux d’intérêt).

Les mécanismes de rééquilibrage automatique qui caractérisent un système monétaire sain garantiraient que les liquidités injectées pour faire face à une situation d’urgence soient retirées du système une fois la crise passée. Les initiatives visant à contrecarrer ces mécanismes auraient pour effet de saper la confiance dans le maintien de la convertibilité de la devise en or.

Chocs et capacités

Oui, le marché du crédit serait agité. Des chocs d’offre, amplifiés par les mesures de confinement obligatoire, entraîneraient un effondrement des bénéfices de la plupart des entreprises, voir l’accumulation de pertes, en particulier dans l’épicentre du choc.

Cependant, dans un système monétaire sain, le contrat social qui caractérise le capitalisme de marché libre, d’après lequel la rémunération du capital est majorée au fil du temps d’une prime de risque en échange du fait d’assurer dans une certaine mesure les autres parties prenantes, en particulier les travailleurs, contre les chocs défavorables (qu’il s’agisse d’une récession, d’un changement dans les préférences des consommateurs ou encore de catastrophes naturelles), serait respecté.

Par conséquent, durant les périodes de prospérité, les entreprises auraient été en capacité de renforcer leurs réserves de fonds propres, ce qui leur aurait permis d’absorber l’impact du choc économique.

Bien entendu, le scénario actuel est tout différent, comme nous le verrons demain.

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Brendan Brown est l’un des associés fondateurs de Macro Hedge Advisors et chercheur au Hudson Institute. En tant qu’économiste spécialiste des questions monétaires et financières internationales, consultant, et auteur, il a notamment occupé le poste de directeur de la recherche économique chez Mitsubishi UFJ Financial Group. Il est également chercheur associé au Mises Institute et auteur de plusieurs ouvrages.

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