Brexit – Hotel California

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Par Stéphane Déo Modifié le 16 novembre 2018 à 10h28
Brexit Theresa May Position Commune 2
7,4%La croissance attendue des bénéfices futurs sur le long terme est de 7,4% par an.

Il est possible, en regardant les prix des marchés, de savoir quelle est la croissance attendue des bénéfices sur le long terme. Les lecteurs intéressés par les détails techniques peuvent se reporter à l’annexe en fin de ce commentaire.

Point de marché : qu’est ce qui est attendu en termes de croissance ?

L’ordre de grandeur que nous obtenons semble correct :

  • 7,4% par an : la croissance attendue des bénéfices futurs sur le long terme d’après notre modèle.
  • 8,9% par an : la croissance moyenne des bénéfices depuis 2010.
  • 5,7% par an : celle depuis 2000, donc en incluant les deux dernières récessions.

Les mouvements récents vont bien de pair avec une révision à la baisse des attentes de croissance des bénéfices. La correction semble toutefois mineure.

Cet exercice montre que l’optimisme des marchés est effectivement tempéré depuis cet été et que les craintes sur la trajectoire de la croissance, et donc des bénéfices, ont joué dans la période de volatilité récente. Toutefois, le marché reste sur un scénario relativement positif qui correspond à une croissance se stabilisant à un niveau proche de son potentiel.

Les anticipations sont plus modestes mais on est très loin d’anticiper un accident sur la croissance.

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Hotel California

« You can check out any time you like, But you can never leave » chantaient les Eagles dans Hotel California. Les Britanniques s’aperçoivent que la sortie de l’UE est plus difficile que certains bonimenteurs ne l’avaient dit.

Rappelons toutefois que la situation est meilleure qu’il y a une semaine : l’accord entre le gouvernement et la Commission annoncé mardi est une bonne nouvelle même s’il était attendu. Il y a une volonté forte d’éviter un « hard Brexit » de la part des deux négociateurs. Ce n’était pas gagné, loin s’en faut, et même si l’issue heureuse était attendue c’est un incontestable pas en avant.

La démission de ministre ne devrait pas non plus être une surprise majeure. Les dissensions sont fortes et tout accord doit comporter des choix. Comme nous l’écrivions il y a quelques jours, les dommages collatéraux étaient plus que probables.

Le vrai sujet c’est l’accord du Parlement. Les membres du DUP (parti unioniste irlandais) sont furieux, les durs du parti conservateur ne décolèrent pas, les membres du labour ont annoncé depuis longtemps qu’ils ne voteraient pas l’accord. On est donc dans la partie la plus compliquée pour Theresa May. Un vote de ratification au parlement, qui reste malgré tout le scénario central, est tout sauf garanti.

Voici l’état des troupes :

  • 316 élus conservateurs, dont un bon tiers d’Eurosceptiques convaincus. Une majorité qui ne tient qu’à un fil, en l’occurrence grâce aux 9 élus du DUP.
  • Il est donc très peu probable que Theresa May fasse le plein des voix dans sa majorité. Les estimations sur le nombre de rebelles vont d’une grosse douzaine à une centaine.
  • Il faut donc trouver du support parmi les autres partis. Une bonne douzaine de travaillistes, pro-Euro, voteront probablement l’accord, leur nombre peut aller jusqu’à la cinquantaine. Il faut aussi ajouter les 6 élus indépendants qui peuvent aider.
  • Deux détails à garder à l’esprit, et qui peuvent s’avérer cruciaux en cas vote très serré :
    • par tradition, le président du parlement et ses adjoints sont non partisans : ils ne prennent pas part au vote, sauf en cas d’égalité parfaite. Ce sont quatre conservateurs qui occupent ces postes.
    • les 7 élus du Sinn Féin s'abstiennent systématiquement de siéger.

Bref c’est serré, très serré même. « L’ordre, une fois qu’il a été bouleversé, ne peut être restauré qu’en faisant l’expérience du chaos » écrivait Henry Kissinger. Il faut espérer que la peur des conséquences d’une sortie sans accord permette à Thereza May de trouver une majorité.

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Une petite dernière citation : Oscar Wilde « Je peux résiste à tout sauf à la tentation ». Nous n’avons pas résisté à la tentation de mettre à jour notre graphique sur le stress de marché.

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Stéphane Déo est stratégiste chez La Banque Postale Asset Management. Il est diplômé d'HEC, a un DEA en économie à l'Ehess (Ecole des hautes études en sciences sociales) et un doctorat en finances à HEC. Il a effectué des études post-doctorales à l'université de Berkeley (Californie). Après l’OCDE et Goldman Sachs, il travaille chez UBS en 2001 comme économiste puis stratégiste jusqu’en 2015. Il poursuit son expérience chez Empirical Research Partners comme stratégiste actions globales.

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