Management : être direct sans être brutal, c’est possible

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Par Philippe de Lapoyade Publié le 8 juin 2016 à 5h00
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Tout le monde souhaite que l’on soit direct avec lui. Et pourtant, quand vous demandez à ce quelqu’un d’être plus direct, il vous dit souvent « ah mais je ne peux pas dire ça ! C’est brutal… ». C’est parce qu’il y a confusion entre direct et brutal. D’ailleurs on dit souvent d’une personne que l’on a trouvée abrupte qu’elle a est « très directe ».

Penser que l’on sera brutal en étant direct est communément admis et n’est plus complètement faux : managers, négociateurs, commerciaux ont reçu la même éducation que leurs interlocuteurs, ils partagent avec eux les mêmes règles sociales et la même susceptibilité. On nous a tellement dit « est-ce que je pourrai éventuellement…» comme une manière de dire « j’ai besoin que…» que l’on s’est habitué à lire entre les lignes et à opérer à distance les uns des autres. Le risque que l’autre se sente brutalisé quand est plus direct existe puisqu’il n’y est pas habitué. Cette confusion est entretenue par les systèmes éducatifs et d’ailleurs de nombreuses formations.

Alors, que fait-on ? Déjà, le fait que ce soit comme ça n’est pas une raison pour que ça le reste. Ensuite, préférez-vous pêcher par défaut (au risque de toujours rester à distance et d’être dans la politesse convenue et souvent hypocrite) ou par excès (au risque de devoir parfois vous excuser et reculer mais en ayant produit de la proximité) ? Je sais quel camp je choisis.

Enfin, il ne s’agit pas non plus d’une impossibilité. L’affirmation « Tu es bête » est très directe mais aussi particulièrement brutale et arrogante, car elle exprime un jugement de valeur. Le rapport de force est alors inévitable. Etre direct dans une relation verbale, consiste au contraire à dire ce que l’on pense en procédant depuis soi. C’est toute la différence entre :
« Tu as tort » et « J’ai un point de vue différent »
« Tu es incohérent » et « Je suis perdu »
« Tu mens » et « J’ai du mal à te croire »
« Il est malhonnête » et « Je ne lui fais pas confiance »

Les premiers propos parlent de l’autre et de la vérité que je pense détenir le concernant (qui suis-je pour penser la détenir?). Les propos qui suivent parlent de moi et de ma vérité du moment. La vérité est contestable. Ma vérité ne l’est pas. Que l’autre ait tort et que j’ai raison ou qu’il mente ou qu’il dise la vérité n’ont au fond aucun importance. La seule chose qui compte au niveau de la relation est que je ne partage pas le même point de vue et que j’ai du mal à le croire. C’est une toute autre vision du monde et de nos relations avec les autres dont il s’agit.

Ce qui rend un propos brutal (et non conforme à la façon dont on aime que l’on nous parle) est donc autant ce qui est dit que ce qui ne l’est pas. Etre direct implique d’être capable de parler depuis soi, donc d’être capable de s’écouter. Petit à petit, mot par mot, échange par échange, jour après jour faisons un effort de discipline personnelle pour à la fois trouver le courage de dire aux autres ce que l’on pense et la rigueur pour le dire avec respect. Bref, revenons à des relations simples pour être plus efficaces, plus respectueux et ainsi se sentir un peu mieux tous les jours.

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Philippe de Lapoyade, fondateur et PDG du cabinet Interactifs

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