Pouvoir d’achat : l’argument absurde du gouvernement pour contredire l’Insee

Paolo Garoscio
Par Paolo Garoscio Modifié le 21 décembre 2017 à 6h48
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0,3%Le pouvoir d'achat des Français baissera de 0,3% selon l'Insee en 2018.

L’Insee a frappé fort mardi 19 décembre 2017. l’Institut de statistiques a calculé l’impact sur le pouvoir d’achat des Français des hausses de taxes et impôts prévues en 2018 et était tombé sur ce chiffre qui n’a pas manqué de faire scandale : une baisse de pouvoir d’achat de 4,5 milliards d’euros. De quoi écorner l’image du gouvernement qui avait promis, au contraire, d’augmenter le pouvoir d’achat des ménages.

Sans surprise, la polémique a enflé et le gouvernement a réagi : le 20 décembre 2017 Benjamin Griveaux, porte-parole du gouvernement, a donné la réponse des équipes d’Edouard Philippe.

L’Insee à tort : le calcul a été fait à « consommation équivalente »

L’argument donné par Benjamin Grivieux pour répondre à la polémique lancée par l’Insee a de quoi étonner mais, économiquement, il est valable : l’Insee n’a pas prix en compte le changement dans les habitudes de consommation des ménages. L’Institut de statistiques a calculé la somme de 4,5 milliards d’euros de perte de pouvoir d’achat « à consommation équivalente ».

Pour le gouvernement, ce calcul est faux : « le raisonnement est fait à consommation équivalente, or la fiscalité indirecte notamment sur le tabac et sur le diesel a pour vocation de changer les comportements » a déclaré le porte-parole du gouvernement.

L’Insee lui a partiellement donné raison le 20 décembre 2017 dans une note d’éclaircissement : « pour lever toute ambiguïté à ce sujet, il convient de rappeler que si par exemple la consommation de tabac baisse du fait de la hausse de son prix, les recettes fiscales en seront réduites d'autant » avant d’ajouter toutefois que « l'effet estimé sur l'inflation et donc sur le pouvoir d'achat des ménages ne tient pas compte de cette évolution de la consommation dans la mesure où les indices de prix sont toujours calculés selon la structure de consommation de l'année précédente ».

L’Insee répond en gros que le gouvernement a raison si ce qu’il prévoit se révèle vrai mais que son calcul est juste selon les règles statistiques.

« Si tu consommes moins ici tu pourras consommer plus là-bas »

L’argument du gouvernement pour contredire l’Insee relève presque du sophisme :

La hausse de la fiscalité sur le diesel vise à faire passer les Français roulant au Diesel à l’essence ou à l’électrique. Or, déjà, l’essence est plus chère que le Diesel donc passer à l’essence, pour un automobiliste, lui coûtera plus cher. Sans compter qu’il doit changer de voiture.

Mais le meilleur argument est probablement celui sur le tabac : la hausse du prix des cigarettes vise à faire arrêter de fumer les Français. Le gouvernement dit donc tout simplement que « si les Français arrêtent de fumer, alors l’argent qu’ils auraient dépensé dans des clopes ils pourront le dépenser ailleurs ».

Cet argument est absolument vide puisqu’il se résume à « si tu n’achètes pas ceci tu pourras acheter cela », ce qui tombe sous le sens. Mais, surtout, il peut être utilisé pour augmenter la fiscalité d’absolument tous les produits qui ne sont pas de première nécessité.

Paolo Garoscio

Après son Master de Philosophie, Paolo Garoscio s'est tourné vers la communication et le journalisme. Il rejoint l'équipe d'EconomieMatin en 2013.   Suivez-le sur Twitter : @PaoloGaroscio

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