Le 13 août 2025, la Confédération suisse a revu sa prévision de déficit 2025 de 800 millions de francs à 200 millions. Cette amélioration, portée par des recettes d’impôt exceptionnellement élevées liées au négoce de matières premières, ne dissipe pas tous les risques pour le budget de l’État : la négociation commerciale en cours avec Washington et un ralentissement de la consommation pourraient rogner la TVA.
Le déficit suisse revu à la baisse

Mercredi 13 août 2025, le Conseil fédéral a pris acte d’une première extrapolation : la Suisse attend désormais un déficit de financement de 200 millions de francs pour 2025, loin des 800 millions inscrits au budget. Le Département fédéral des finances (DFF) attribue ce redressement avant tout à des recettes fiscales plus vigoureuses que prévu.
La Suisse revoit son déficit : une amélioration inattendue
Le cœur du signal tient en deux chiffres que tout observateur du budget suisse doit avoir en tête. D’abord, l’impulsion fiscale : les recettes ordinaires sont révisées à la hausse de 1,4 milliard, un montant suffisant pour transformer l’équilibre du compte ordinaire. Ensuite, le profil de dépenses : les charges ordinaires progressent de 200 millions par rapport au budget voté. Résultat : « Le budget ordinaire devrait présenter un excédent de financement de 700 millions, au lieu du déficit de 500 millions inscrit au budget », écrit swissinfo en citant le Conseil fédéral.
Cet excédent ordinaire vient compenser en partie la détérioration du compte extraordinaire, grevé par un versement unique de 850 millions destiné à stabiliser les finances des CFF, malgré un apport extraordinaire supérieur au budget grâce à un dividende supplémentaire de la BNS (+200 millions). En agrégat, l’État suisse maintient donc un déficit total de seulement 200 millions, soit un quarts de la valeur initialement prévue dans le budget 2025.
Cette inflexion favorable reste cohérente avec le frein à l’endettement et la trajectoire annoncée au printemps : la Confédération cherchait déjà à rééquilibrer ses finances publiques dès 2025, tout en prévenant que les dépenses structurelles (armée, retraites, climat) mettraient le budget sous tension dès la seconde moitié de la décennie.
Matières premières et budget : un moteur fiscal sous surveillance
Pourquoi, précisément, les recettes s’envolent-elles ? La réponse se trouve du côté du négoce de matières premières, où des profits élevés sur les années fiscales 2022 et 2023 – concentrés notamment dans le canton de Genève – gonflent le produit de l’impôt fédéral direct sur le bénéfice des entreprises. Boursorama, citant le Conseil fédéral et l’Administration fédérale des finances, note que l’impôt sur le bénéfice des sociétés de négoce de matières premières devrait générer « environ 900 millions » de francs en 2025. Le site rappelle que des négociants comme Vitol, Trafigura (centre opérationnel genevois) ou Glencore (Zoug) forment une base imposable sensible à la volatilité des prix des commodities.
La Suisse a d’ailleurs déjà prévenu que la TVA pourrait ressortir inférieure de 200 millions par rapport au budget prévisionnel, signe que le ralentissement de la croissance et la consommation plus molle pèsent sur une assiette plus large mais plus cyclique que l’impôt sur le bénéfice.
Au-delà des matières premières, la toile de fond internationale pèse sur le budget de la Suisse. Les négociations commerciales avec les États-Unis se sont tendues avec l’annonce de droits de douane additionnels de 39 % sur des exportations suisses. Berne a immédiatement réagi : « Le Conseil fédéral est déterminé à poursuivre les discussions avec Washington afin de faire diminuer au plus vite ces droits de douane additionnels sur les produits suisses », précise le communiqué du 7 août 2025.
Ce que cela change pour l’État suisse et la suite des négociations
À court terme, l’État suisse gagne de la marge. Un déficit de 200 millions, au lieu de 800 millions, réduit la contrainte immédiate sur le budget et facilite la mise en œuvre des priorités – investissements ciblés, négociation de dossiers sensibles, stabilisation d’entreprises publiques – sans compromettre le cadre du frein à l’endettement. Ce confort demeure toutefois conjoncturel : la Confédération répète que l’embellie vient d’une assiette étroite (le négoce), sujette aux cycles des matières premières, et que l’équilibre de long terme nécessitera des choix durables sur les dépenses et les recettes.
Le cadrage macroéconomique appelle donc de la prudence. Sur la recette, la TVA dépend de la demande intérieure et des prix à l’importation, deux composantes sensibles au cycle et à un environnement commercial moins porteur. Sur l’impôt sur le bénéfice, l’effet retardé des années fiscales 2022–2023 – favorable pour 2025 – s’estompera mécaniquement si les marges 2024–2025 dans le négoce se normalisent.
Même alors, la Suisse n’est pas démunie : l’État peut compter sur une base industrielle diversifiée, une structure fiscale stabilisée par le frein et une capacité de négociation éprouvée sur les dossiers commerciaux.
