Résidences secondaires : le délai d’exonération sur la plus-value réduit à 17 ans

Un amendement récemment voté à l’Assemblée nationale entend réduire de cinq années le délai de détention nécessaire pour bénéficier de l’exonération de la plus-value liée à la vente des résidences secondaires. Cette mesure s’inscrit dans une logique de fluidification du marché du logement dans les zones tendues.

Ade Costume Droit
By Adélaïde Motte Published on 4 novembre 2025 9h09
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Résidences secondaires : le délai d’exonération sur la plus-value réduit à 17 ans - © Economie Matin

Les députés ont voté un amendement réduisant de cinq ans le délai d’exonération fiscale sur la plus-value immobilière lors de la revente des résidences secondaires. Une mesure qui vise à relancer un marché figé et à encourager la mise en vente de biens, dans un contexte où le logement reste sous tension dans de nombreuses régions.

Un amendement pour dynamiser un marché atone

Adopté le 3 novembre 2025 dans le cadre du projet de loi de finances pour 2026, l’amendement réduit de vingt-deux à dix-sept ans le délai de détention nécessaire pour bénéficier d’une exonération totale sur la plus-value réalisée à la revente des résidences secondaires. Jusqu’à présent, un propriétaire devait conserver son bien pendant plus de deux décennies pour échapper à toute imposition sur cette plus-value. Ce changement s’appliquerait aux ventes réalisées à partir de l’entrée en vigueur de la loi, sous réserve de validation définitive par le Sénat.

Selon le député Corentin Le Fur, à l’origine de la proposition, cette réduction du délai permettra de « libérer des biens détenus depuis longtemps et de fluidifier un marché aujourd’hui paralysé ». La mesure a toutefois suscité des réserves du côté du ministère des Comptes publics, qui craint un effet d’aubaine et des pertes fiscales non négligeables pour l’État. La commission des finances a également évoqué la nécessité d’une phase de transition pour éviter des disparités de traitement entre contribuables.

Une fiscalité lourde sur les résidences secondaires

Les résidences secondaires sont soumises à une imposition spécifique lors de leur revente, à la différence des résidences principales, dont la plus-value est totalement exonérée. En l’état actuel, les gains réalisés sont taxés à hauteur de 19 % pour l’impôt sur le revenu, auxquels s’ajoutent 17,2 % de prélèvements sociaux, soit un taux global de 36,2 %. À cela s’ajoute, le cas échéant, une surtaxe sur les plus-values supérieures à 50 000 euros.

Pour atténuer cette charge, un abattement progressif est appliqué en fonction de la durée de détention du bien. Cet abattement atteint l’exonération totale après vingt-deux ans pour l’impôt sur le revenu et trente ans pour les prélèvements sociaux. En réduisant la première de ces durées à dix-sept ans, les députés espèrent inciter davantage de propriétaires à vendre avant la fin de la troisième décennie. L’objectif affiché est double : fluidifier le marché et augmenter la circulation des biens dans les zones touristiques saturées.

Un marché immobilier figé dans les zones touristiques

Dans plusieurs régions françaises, notamment sur le littoral atlantique, en Bretagne ou dans les Alpes, la part des résidences secondaires dépasse parfois 40 % du parc immobilier. Dans certaines communes comme Saint-Malo, Biarritz ou Annecy, la pression foncière s’accentue d’année en année, tandis que les ménages locaux peinent à accéder à la propriété. Cette rétention de biens contribue à la raréfaction de l’offre et au blocage du marché, phénomène encore aggravé par la hausse continue des taux d’intérêt depuis 2022.

Selon les données du Conseil supérieur du notariat, le nombre de transactions dans l’ancien a chuté de près de 25 % en deux ans, et les résidences secondaires ne font pas exception à cette tendance. Beaucoup de propriétaires hésitent à vendre avant d’avoir atteint le seuil d’exonération, préférant patienter plusieurs années pour éviter une imposition lourde. En réduisant ce délai, le gouvernement espère que la mesure permettra de relancer la rotation du parc immobilier et, indirectement, d’augmenter les recettes fiscales liées aux transactions.

Des effets économiques attendus, mais des limites évidentes

Cette réforme pourrait encourager certains propriétaires à céder plus rapidement leurs résidences secondaires, notamment ceux proches du nouveau seuil d’exonération. Elle permettrait aussi d’accélérer la libération de logements dans des territoires où la tension locative est forte. Le député Corentin Le Fur estime que cette mesure pourrait « redonner le sourire à des propriétaires qui se sentaient piégés » par une fiscalité trop rigide.

Cependant, de nombreux économistes rappellent que dix-sept ans demeure un délai long pour générer un impact réel sur le marché. Certains redoutent un effet limité, la mesure profitant essentiellement aux détenteurs de biens déjà anciens, sans réelle incidence sur l’offre immédiate de logements à vocation principale. D’autres soulignent le risque de creuser l’écart entre zones rurales, peu concernées par la spéculation, et zones touristiques à forte valeur, où les ventes risquent de se concentrer.

Un équilibre entre incitation et responsabilité budgétaire

La question du coût budgétaire reste en suspens : chaque année, les plus-values immobilières sur les résidences secondaires rapportent plusieurs centaines de millions d’euros à l’État. Réduire le délai d’exonération pourrait diminuer ces recettes, sauf si la hausse du nombre de transactions compense la perte. Cette logique de « choc d’offre » est d’ailleurs au cœur de la stratégie du gouvernement pour tenter de réanimer un secteur en crise.

Reste à savoir si cette réforme, encore soumise à l’examen du Sénat, sera retenue dans la version finale du budget 2026. Elle s’inscrit dans un débat plus large sur la fiscalité du patrimoine et la place des résidences secondaires dans la politique du logement. Car au-delà de la question fiscale, c’est bien l’équilibre entre équité territoriale, recettes publiques et dynamisme du marché immobilier qui se joue.

Ade Costume Droit

Diplômée en géopolitique, Adélaïde a travaillé comme chargée d'études dans un think-tank avant de rejoindre Economie Matin en 2023.

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