Pourquoi une vraie réforme fiscale est urgente

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Par Eric Verhaeghe Publié le 9 septembre 2016 à 9h10
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14%14 % de la TVA échappe au fisc français.

L’absence d’une vraie réforme fiscale sous François Hollande constitue l’une des taches majeures qui souille le quinquennat, même si certains se réjouiront de n’avoir pas vu la gauche s’occuper de ce sujet hautement sensible.

La réforme fiscale préemptée par Piketty

Il y avait en effet fort à craindre de la réforme fiscale que Thomas Piketty avait entendu inspirer ou influencer au moment où la gauche a préparé son programme, en 2011. Rappelons en effet que, dans l’esprit d’un Piketty, l’impôt est le seul moyen de lutte contre les inégalités et que la doctrine fiscale doit être dominée par une préoccupation de redistribution.

Les économistes ne soulignent pas assez que la première utilité de l’impôt n’est certainement pas de redistribuer les richesses, mais bien de financer les dépenses publiques. Dans cette visée, l’impôt doit être simple, juste et efficace. Et c’est bien aujourd’hui le principal vice de notre système fiscal que de ne pas parvenir à financer de façon satisfaisante et acceptable les dépenses du secteur public. Le déficit public le prouve.

Pour un impôt efficace

Là encore, rappelons des évidences et enfonçons des portes ouvertes. L’impôt, en France, est un mille-feuilles absolument inefficace, dont le coût de collecte est élevé (le budget de la DGFIP approche les 10 milliards€), avec des bizarreries qui en montrent l’absurdité. L’impôt sur le revenu n’est acquitté que par 45% des foyers fiscaux. Quant aux entreprises, elles sont assujetties à 233 impôts différents!

Mais l’affaire Apple a montré que, malgré cette variété d’impôts, les trous dans la raquette sont nombreux, et certaines activités très lucratives ne sont tout simplement pas taxées…

14% des recettes de TVA ne sont pas collectées

Ajoutons enfin qu’un rapport de la Commission européenne permet de savoir que, chaque année, en Europe, ce sont 160 milliards € de TVA qui ne sont pas collectés, dont plusieurs milliards en France. Autrement dit, la fraude fiscale, même dans le domaine de la TVA, est un élément important, chiffré, pour cette taxe en France, à 14% du potentiel fiscal (ce qui est dans la moyenne européenne). Preuve est donc faite que même la TVA n’atteint pas pleinement son objectif ni sa capacité à financer les dépenses publiques.

Pour un impôt simple

L’exemple de l’impôt sur les sociétés (qui est un impôt sur les bénéfices) rappelle la grande caractéristique de la débile fiscalité française: des taux élevés mais des assiettes restreintes. Manuel Valls a annoncé cet été une baisse de l’IS pour les PME qui devrait se traduire par la création d’un troisième taux d’imposition (en plus des 30% pour les grandes entreprises et des 15% pour les petites). Voici comment une réforme positive dans son esprit se transforme en un cauchemar pour les entreprises, dans la mesure où le patron craint autant la complexité que la taxation.

La simplicité fiscale est un objectif en soi, qui mériterait d’être foncièrement mis en exergue.

La mort du consentement à l’impôt

Faute d’une fiscalité simple qui finance efficacement les dépenses publiques, le consentement à l’impôt est désormais fortement vicié. Le baromètre Fiducial l’a montré, en soulignant la perception extrêmement négative que les patrons peuvent avoir de la fiscalité en France aujourd’hui. 68% des patrons jugent la fiscalité totalement confiscatoire.

Pour la démocratie, la mort du consentement à l’impôt constitue un véritable danger.

Pour une réforme urgente

Tout ceci plaide donc pour qu’une réforme vertueuse voit le jour rapidement. Cette réforme ne doit pas être obsédée par la question de la redistribution des richesses, mais plutôt par la question du financement des dépenses publiques. Son objectif doit être l’efficacité et la simplicité. Il faut donner à l’administration les moyens d’agir à travers un système de taxation que tous les Français comprennent et acceptent.

Les règles de cette réforme sont connues d’avance: il faut un moins grand nombre d’impôts mais qu’ils soient plus généraux. Il faut des taux moins élevés mais des assiettes plus larges.

Malheureusement, ce débat salutaire et cette vision d’avenir, nous savons tous qu’ils ne seront pas le fait de 2017.

Article écrit par Eric Verhaeghe pour son blog

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Né en 1968, énarque, Eric Verhaeghe est le fondateur du cabinet d'innovation sociale Parménide. Il tient le blog "Jusqu'ici, tout va bien..." Il est de plus fondateur de Tripalio, le premier site en ligne d'information sociale. Il est également  l'auteur d'ouvrages dont " Jusqu'ici tout va bien ". Il a récemment publié: " Faut-il quitter la France ? "

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