Budget 2026 : pourquoi les députés ont dit « non » en commission

Le rejet du Budget 2026 par la commission des finances de l’Assemblée nationale plonge le gouvernement dans une situation politique tendue. En refusant la première partie consacrée aux recettes, les députés de tous bords, à l’exception des proches du Président, ont fragilisé la trajectoire budgétaire de la France.

Paolo Garoscio
By Paolo Garoscio Published on 23 octobre 2025 6h29
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Budget 2026 : pourquoi les députés ont dit « non » en commission - © Economie Matin
4,7%Le gouvernement ambitionne de ramener le déficit public à 4,7 % du PIB l’an prochain.

Dans la nuit du 22 au 23 octobre 2025, la commission des finances a examiné la première partie du projet de Budget de l’État pour 2026, celle qui détermine les recettes. Après plusieurs heures de débat, les députés ont largement rejeté le texte.

Le rejet massif du Budget en commission des Finances

Les faits sont clairs : la commission des finances de l’Assemblée nationale a rejeté la première partie du projet de loi de finances 2026, celle consacrée aux recettes. Selon Le Monde, 37 députés ont voté contre, tandis que 11 ont voté pour, principalement issus du groupe Renaissance. Tous les autres groupes, des Républicains (LR) au Rassemblement national (RN) en passant par les écologistes et les socialistes, ont dit non. Même les députés MoDem et Horizons, pourtant membres de la majorité présidentielle, se sont abstenus.

Le rapporteur général du Budget, Philippe Juvin (LR), a pointé la faiblesse de la copie gouvernementale : « Le Budget tel qu’il est n’est pas un budget crédible », a-t-il déclaré dans Le Monde. Selon lui, les amendements votés au fil de l’examen ont amputé près de 6 milliards € sur les 13 milliards € de recettes nouvelles initialement prévues, détaille LCP. Ce constat illustre la division des députés, mais aussi le manque de cohérence d’un texte que plusieurs élus jugent « vidé de sa substance ».

Ce rejet en commission n’est pas anodin. La première partie du Budget fixe la ligne générale des recettes fiscales et non fiscales de la France. Elle conditionne la suite de la discussion parlementaire. En d’autres termes, si la majorité échoue à réunir un consensus, la trajectoire budgétaire de l’État pour 2026 pourrait être profondément remise en cause, d’autant que le gouvernement ambitionne de ramener le déficit public à 4,7 % du PIB l’an prochain.

Un signal politique fort… mais rien n’est joué car l’Assemblée nationale a le dernier mot

Ce revers est d’abord un signal politique. Le rejet du volet « recettes » signifie que les députés ne font plus confiance à la méthode budgétaire du gouvernement. Pour les groupes d’opposition, le texte manquait de clarté et de réalisme : la suppression d’exonérations fiscales ciblées, la hausse de certaines taxes sur les entreprises et la révision des abattements sur les retraites ont nourri un front commun du refus.

Plusieurs mesures emblématiques ont cristallisé la contestation. L’abattement fiscal de 10 % sur les pensions de retraite, pour un coût estimé à 1,2 milliard euros, a été supprimé. De même, la taxe dite « Zucman » visant les patrimoines supérieurs à 100 millions d’euros (soit 1800 ménages seulement en France) a été écartée, tout comme la mesure de gel de la première tranche de l’impôt sur le revenu, dont le coût atteignait 700 000 euros selon les estimations du ministère des Finances.

Derrière ce vote, c’est aussi la question du cap économique de la France qui se pose. Les oppositions, y compris au sein de la droite, dénoncent un texte sans cohérence . Les députés socialistes ont critiqué une politique de recettes jugée « injuste », tandis que LR a estimé que les économies proposées étaient insuffisantes pour compenser les baisses de fiscalité engagées depuis 2022.Pour la majorité, ce rejet reste symbolique, car la décision de la commission ne bloque pas encore le processus budgétaire. Cependant, il envoie un avertissement clair avant le passage en séance publique.

Une suite sous haute tension pour le Budget 2026

La suite du calendrier parlementaire s’annonce délicate. Le texte revient dans l’Hémicycle à partir du vendredi 24 octobre 2025, pour un vote solennel prévu le 4 novembre, rappelle RFI. Le gouvernement défendra alors la version initiale du projet, c’est-à-dire avant les amendements de la commission, conformément à la procédure. Mais après un tel revers, la question du recours à l’article 49.3 de la Constitution plane déjà sur le débat budgétaire même si le Premier ministre Sébastien Lecornu a promis de ne pas l’utiliser.

D’un point de vue économique, le rejet du volet recettes rend l’équation financière plus fragile. Les recettes fiscales prévues pourraient s’éroder d’environ 6 milliards d’euros si le texte amendé n’est pas rétabli. Cette diminution compromettrait l’objectif de stabilisation du déficit à 4,7 % du PIB, voire son amélioration.

Paolo Garoscio

Rédacteur en chef adjoint. Après son Master de Philosophie, il s'est tourné vers la communication et le journalisme. Il rejoint l'équipe d'EconomieMatin en 2013.   Suivez-le sur Twitter : @PaoloGaroscio

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