Coup dur dans le Calvados : SNEC (groupe Lactalis) met fin à l’activité de Cibem, fabricant de boîtes de camembert à Saint-Pierre-en-Auge. Malgré 25 M€ investis depuis 2011, 104 emplois sont menacés. Calendrier, raisons économiques, réactions locales et avenir de la filière.
Boîtes de camembert : l’usine normande qui les fabrique ferme ses portes

Le 30 septembre 2025, SNEC, filiale de Lactalis, a annoncé la fermeture de l’usine Cibem de Saint-Pierre-en-Auge, connue pour ses boîtes de camembert en bois. 104 emplois sont concernés et un arrêt effectif est envisagé en 2026, possiblement dès le premier semestre. Cette décision, justifiée par une baisse de compétitivité et des commandes en recul, soulève des questions industrielles, sociales et d’approvisionnement pour la filière fromagère normande.
Pourquoi Cibem s’arrête-t-elle ?
La fermeture de Cibem sanctionne une équation économique devenue intenable. D’après la communication rapportée localement, l’entreprise qui fabrique notamment les célèbres boîtes de camembert a connu une situation déficitaire persistante malgré 25 millions d’euros d’investissements depuis 2011 pour moderniser l’outil industriel. Or, la compétitivité s’est érodée au fil des années, tandis que les commandes diminuaient. Selon la direction, la combinaison de ces facteurs rend l’activité non viable.
Elle précise toutefois accompagner chaque salarié, via des solutions de reclassement et la recherche d’un repreneur confiée à un cabinet indépendant, une démarche déjà engagée. Ces éléments ont été communiqués aux représentants du personnel dans le cadre d’une procédure d’information-consultation. Cibem produisait des boîtes en bois alimentaires pour camembert, livarot, brie ou fromages de chèvre, cœur historique de son portefeuille. Selon la direction citée, « la direction s’engage à accompagner chaque salarié » et poursuit la recherche d’opportunités externes parallèlement aux pistes internes.
En pratique, la fermeture ne sera pas instantanée. Les sources locales évoquent un horizon 2026, sans date précise, certaines parlant du premier semestre. Entre-temps, l’entreprise doit gérer les commandes résiduelles, sécuriser l’outil, et négocier les mesures d’accompagnement (formation, mobilité, indemnisation). Bien que l’outil soit spécialisé (boîtes en peuplier agrafées ou collées, barquettes et contreplaqué), des acteurs tiers peuvent techniquement reprendre des volumes, moyennant qualifications sanitaires et spécifications client. Ce temps de bascule sera important pour les marques et appellations, qui s’attachent à la boîte en bois comme marqueur d’identité, en particulier pour le camembert.
Qui est touché par la fermeture de l'usine des boîtes à camembert ?
Le site compte 104 salariés. Dans une commune et un bassin d’emploi à dominante agroalimentaire, ce choc social est majeur. « C’est un nouveau drame industriel », a réagi François Aubey, président de Lisieux Normandie, qui a annoncé aller à la rencontre des équipes. Dans le même temps, les élus locaux indiquent que la direction de SNEC vise des reclassements dans le Calvados. La presse régionale rapporte la promesse que chaque ouvrier et salarié se verrait proposer un CDI dans le département, ce qui, si cela se concrétise, atténuerait l’impact social direct.
Dans l’immédiat, la négociation avec les représentants du personnel déterminera l’architecture des mesures d’accompagnement : formation, aide à la mobilité, congé de reclassement, primes spécifiques. La recherche d’un repreneur de l'entreprise de boîte de camembert par un cabinet indépendant est un signal positif, même si l’actif est très spécialisé. Le calendrier joue ici un rôle déterminant : plus la visibilité est donnée tôt sur la date d’arrêt des lignes, plus un projet industriel ou logistique alternatif peut émerger. Enfin, pour la filière bois locale et certains sous-traitants, l’arrêt de Cibem peut provoquer une contraction temporaire de commandes. Les collectivités suivront, car la perte de 104 emplois se répercute sur la consommation et les recettes locales.
La logistique après Cibem et le casse-tête industriel
La boîte de camembert en bois n’est pas un simple packaging : c’est un vecteur d’image et un outil logistique. D’un point de vue industriel, remplacer un fabricant nécessite d’aligner dimensions, épaisseurs, tenue mécanique, migration et aptitude au contact alimentaire, avec des tests et des qualifications selon chaque fromagerie. Les donneurs d’ordres devront sécuriser des fournisseurs alternatifs, en France ou à l’étranger, capables d’absorber les volumes et d’assurer la régularité du peuplier déroulé.
Compte tenu des délais, une période de coexistence entre anciens et nouveaux flux de boîtes de camembert est plausible, avec un risque de surcoûts logistiques et de délais additionnels le temps d’atteindre le niveau de service requis.
SNEC, Lactalis, Cibem : qui fait quoi et que deviennent les actifs ?
SNEC est le maître d’ouvrage industriel de la décision ; Lactalis en est l’actionnaire via la filiale. Cibem opérait des boîtes en bois, parfois avec des étiquettes imprimées par d’autres unités du groupe ou des partenaires, et souvent utilisées pour des produits tels que le camembert. À la fermeture, trois voies existent. Premièrement, la cession du site (ou d’une partie des équipements) à un repreneur spécialisé dans le bois alimentaire ou la petite caisserie. Deuxièmement, la démantèlement-vente d’actifs (dérouleuses, presses, agrafeuses, lignes de collage) pour d’autres industries bois. Troisièmement, la reconversion du foncier en activité artisanale ou logistique. La direction a indiqué avoir mandaté un cabinet pour rechercher un repreneur, ce qui laisse une fenêtre pour une solution de continuité.
Côté ressources humaines, l’entreprise annonce un accompagnement individualisé. Les salariés pourront activer, selon les accords, des dispositifs de reclassement interne au groupe, des passerelles vers des employeurs tiers et, le cas échéant, des formations ciblées. Les élus locaux multiplient les prises de contact pour coordonner l’offre d’emplois du territoire. Dans un contexte où l’industrie recrute sur des métiers techniques (maintenance, conduite de ligne, qualité), la mobilité intra-départementale et la valorisation des compétences bois/emballage constitueront des leviers concrets. À l’échelle de la filière fromagère, la redistribution des volumes de boîtes de camembert vers d’autres sites sera l’autre chantier prioritaire, avec un suivi qualité renforcé.
