Commerce : vers un rapprochement entre UE et Royaume-Uni 4 ans après le Brexit ?

L’avenir des relations entre le Royaume-Uni et l’Union européenne pourrait connaître une évolution inattendue. Alors que le Brexit avait marqué un tournant dans les échanges commerciaux, une proposition récente vient relancer le débat. Quels enjeux sous-tendent cette initiative et comment est-elle perçue des deux côtés de la Manche ?

Paolo Garoscio
Par Paolo Garoscio Publié le 27 janvier 2025 à 7h30
Brexit Vote Nay No 1
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57%En 2023, 57 % des britanniques soutenaient un retour dans l'UE

Le 23 janvier 2025, lors du Forum économique mondial de Davos, Maroš Šefčovič, commissaire européen au commerce, a évoqué la possibilité pour le Royaume-Uni de rejoindre la Convention paneuro-méditerranéenne (PEM). Cette convention, créée en 2012, vise à faciliter les échanges commerciaux entre ses membres, incluant l’Union européenne, plusieurs pays européens et des régions limitrophes.

Cette proposition intervient dans un contexte où le Royaume-Uni, sorti de l’UE depuis le 1ᵉʳ janvier 2021, cherche à redéfinir ses relations économiques avec ses partenaires européens. Mais qu’implique réellement cette initiative, et quels sont les obstacles potentiels à son adoption ?

Une proposition européenne pour apaiser les tensions commerciales

La Convention paneuro-méditerranéenne : un pilier du commerce régional

Créée en 2012, la Convention paneuro-méditerranéenne (PEM) est un cadre multilatéral visant à harmoniser les règles d’origine des produits échangés entre ses 25 membres. Ces derniers incluent l’Union européenne, plusieurs pays d’Europe non membres de l’UE (comme la Norvège et la Suisse), ainsi que des nations d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient. Ce dispositif permet aux entreprises de bénéficier de tarifs douaniers réduits, voire nuls, sur les produits dont les matériaux proviennent de plusieurs membres de la convention, à condition qu’ils respectent les règles d’origine harmonisées. Par exemple, une voiture fabriquée en Tunisie avec des pièces provenant d’Espagne et assemblée en France peut être exportée sans droits de douane supplémentaires dans les autres pays membres.

La PEM ne se limite pas à l’élimination des barrières douanières. Elle vise également à faciliter les chaînes d’approvisionnement transfrontalières grâce à une meilleure coordination des formalités douanières et à des procédures standardisées. Pour les pays participants, cela se traduit par une augmentation des flux commerciaux et une compétitivité accrue sur le marché international. En outre, ce système favorise l’intégration économique régionale en stimulant la coopération entre des économies de tailles et de niveaux de développement divers.

L’adhésion à la PEM représente donc une opportunité pour des nations comme le Royaume-Uni, qui, depuis sa sortie de l’Union européenne, fait face à des coûts accrus et à des retards logistiques liés aux formalités douanières. En rejoignant cette convention, le Royaume-Uni pourrait simplifier ses échanges avec l’UE et d’autres membres, tout en minimisant les frictions liées au commerce post-Brexit. Cependant, cela impliquerait également de se conformer aux règles communes, ce qui peut soulever des débats politiques internes.

Pourquoi le Royaume-Uni pourrait intégrer la PEM ?

Le Royaume-Uni, bien que bénéficiaire d’un accord de libre-échange avec l’UE post-Brexit, subit encore les conséquences des nouvelles barrières commerciales. Intégrer la PEM pourrait permettre de réduire ces frictions, en particulier grâce à des réglementations sur l’origine des matériaux, essentielles pour les industries manufacturières.

La PEM : une bonne nouvelle pour l’économie britannique

L’idée d’intégration à la PEM a reçu un accueil favorable de la part des entreprises britanniques. Selon les déclarations de Maroš Šefčovič, cette initiative pourrait "stabiliser les chaînes d’approvisionnement et renforcer la compétitivité des entreprises britanniques sur les marchés européens". Cependant, Jonathan Reynolds, secrétaire d’État britannique aux entreprises, a tenu à rassurer que cette initiative ne remettrait pas en question les engagements du Brexit : "Cela n’impliquerait ni retour à l’union douanière, ni au marché unique". De quoi réduire à néant l’option d’un retour du Royaume-Uni dans l’Union européenne… en tout cas pour l’instant.

Néanmoins, des acteurs politiques au Royaume-Uni restent sceptiques, craignant une remise en cause des "lignes rouges" du Brexit. Cette prudence reflète la position officielle du Premier ministre Keir Starmer, qui privilégie une coopération renforcée tout en respectant l’indépendance du pays.

Les perspectives d’un rapprochement commercial des deux côtés de la Manche

Adhérer à la PEM offrirait des avantages concrets, notamment :

  • Une réduction des coûts douaniers pour les entreprises exportatrices.
  • Une simplification des échanges avec les pays membres de la PEM.
  • Une meilleure intégration dans les chaînes d’approvisionnement européennes.

Cependant, ces bénéfices économiques pourraient être tempérés par des résistances politiques internes. Certains conservateurs accusent le gouvernement travailliste de vouloir "courber l’échine devant l’UE", alimentant un débat houleux sur l’avenir des relations commerciales britanniques.

Pour l’Union européenne, l’ouverture de la PEM au Royaume-Uni reflète une volonté stratégique de maintenir des relations économiques stables avec son ancien membre. "La balle est dans leur camp", a déclaré Maroš Šefčovič, soulignant que l’UE attend une décision claire de la part des autorités britanniques.

Accord de libre-échange vs. Intégration à la PEM

Critères Accord actuel post-Brexit Adhésion à la PEM
Barrières douanières Présentes Réduites ou éliminées
Règles d’origine Complexes Simplifiées
Accès au marché européen Limité Élargi
Engagement politique Minimal Engagement renforcé

L’intégration du Royaume-Uni à la Convention paneuro-méditerranéenne pourrait représenter une opportunité majeure pour atténuer les conséquences économiques du Brexit. Toutefois, cette proposition met en lumière un dilemme persistant : comment renforcer les relations commerciales avec l’Union européenne sans compromettre les engagements pris lors du référendum de 2016 ?

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Paolo Garoscio

Rédacteur en chef adjoint Après son Master de Philosophie, s'est tourné vers la communication et le journalisme. Il rejoint l'équipe d'EconomieMatin en 2013.   Suivez-le sur Twitter : @PaoloGaroscio

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