Depuis janvier 2025, l’administration Trump a engagé une escalade tarifaire sans précédent. Avec des droits de douane moyens proches de 20 %, comparables à la loi Smoot-Hawley de 1930, le protectionnisme américain frappe tous azimuts. La Banque de France en dresse un tableau inédit, révélant la brutalité des choix politiques et leurs effets inégaux sur les partenaires commerciaux des USA.
Les droits de douane américains au plus haut depuis… 1930 !

Le 20 janvier 2025, Donald Trump reprend officiellement la présidence des États-Unis. À peine investi, il relance la stratégie protectionniste qui avait marqué son premier mandat. La Banque de France observe qu’entre janvier et septembre 2025, le taux moyen de douane américain a bondi de 14 points de pourcentage, pour atteindre 18 % à 20 %. Ce choc fiscal sur le commerce mondial, inédit depuis l’après-guerre, bouleverse l’équilibre fragile des échanges internationaux et fragilise la position de l’Europe.
États-Unis : droits de douane et escalade tarifaire depuis janvier 2025
La Banque de France souligne que la rapidité d’exécution distingue cette vague protectionniste. Dès mars 2025, la Chine est visée par un relèvement de 20 points de pourcentage, ce qui contribue à 2,5 points d’augmentation du taux moyen global. Dans la foulée, le Canada est frappé de +35 points et le Mexique de +25 points, au nom de la lutte contre le fentanyl. Ces mesures alourdissent le climat commercial en Amérique du Nord malgré l’existence de l’accord USMCA.
Les hausses ne se limitent pas aux partenaires frontaliers. L’acier et l’aluminium connaissent deux vagues de surtaxes de +25 points chacune. Les automobiles et intrants industriels subissent la même hausse, ce qui touche directement l’Europe et l’Asie. En août, l’administration Trump cible le cuivre avec une surtaxe spectaculaire de +50 points, étendue à plus de 400 produits manufacturés. Le 5 avril, des droits dits « réciproques » de +10 points sont appliqués à tous les partenaires, sauf le Canada et le Mexique, avant d’être ajustés en août à des niveaux hétérogènes de +10 à +41 points selon les pays. L’Inde et le Brésil figurent parmi les plus affectés, avec des relèvements de +50 points.
Quel est le taux réel des droits de douane appliqués par les Etats-Unis ?
La Banque de France distingue le taux « statutaire » des droits de douane, c’est-à-dire légalement applicable, du taux « effectif », mesuré via les recettes douanières réelles. En septembre 2025, le premier oscille entre 18 % et 20 %, tandis que le second atteint 9,7 %. Cet écart reflète plusieurs réalités :
- Les exemptions inscrites dans l’USMCA sur les automobiles nord-américaines ;
- Les exclusions pour des secteurs stratégiques comme l’électronique, la pharmacie et l’aéronautique (notamment avec l’Union européenne) ;
- Les reports de consommation vers des produits moins taxés, qui abaissent mécaniquement le taux effectif.
En comparaison historique, le niveau actuel rejoint celui de la loi Smoot-Hawley de 1930 (19,8 %) et dépasse de loin la moyenne de 1,4 % observée en 2017. Les travaux cités par la Banque de France (Douglas Irwin, Dartmouth College) rappellent que les États-Unis avaient déjà atteint 29,6 % en 1890, mais que cette trajectoire s’était inversée après 1945, dans un contexte de multilatéralisme. Le retour brutal en 2025 marque donc une rupture nette avec cette dynamique d’ouverture.
L’Europe et la France dans le collimateur de Donald Trump
La montée en puissance du protectionnisme américain se traduit concrètement par une hausse significative des droits de douane sur les exportations européennes. En septembre 2025, le taux appliqué aux produits français atteint 11 %, contre 1,5 % en janvier 2025. L’Italie est frappée à 13 %, l’Allemagne se situe au même niveau que la France.
L’impact est toutefois différencié : les exportateurs de semi-conducteurs (Taïwan, Singapour) et de pharmacie (Irlande) bénéficient d’exemptions, limitant l’effet des surtaxes. À l’inverse, les secteurs traditionnels comme le textile, l’agriculture ou la métallurgie sont particulièrement exposés, avec un renchérissement direct de leurs exportations vers les États-Unis.
Vers des droits de douane encore plus élevés ?
Une trêve fragile a été décrétée avec la Chine jusqu’au 9 novembre 2025, mais le « Tariff tracker » de la Banque de France anticipe une possible hausse supplémentaire de 2 points, portant l’augmentation cumulée à 16 points d’ici la fin de l’année. L’horizon demeure donc instable. D’après le Peterson Institute, la politique commerciale de Trump pourrait aboutir à un taux moyen pondéré de 24 %, soit douze fois plus qu’avant 2017.
Au-delà des chiffres, les économistes de la Banque de France insistent sur le caractère structurel de cette orientation : le protectionnisme n’est plus un instrument ponctuel de négociation, mais un pilier revendiqué de la politique économique américaine. Ses répercussions, en termes de compétitivité, d’inflation et de tensions diplomatiques, restent encore à mesurer pleinement.
