Wekiwi, Primagaz, JPME. Trois noms, trois avertissements graves. Contrats forcés, clients ignorés, paiements oubliés. Et malgré tout, aucune suspension, aucune exclusion. À croire que les règles sont là pour être contournées.
Énergie : pourquoi les fournisseurs sanctionnés restent en activité ?

Ils sont pointés du doigt, plusieurs fois épinglés, et pourtant toujours présents sur le marché. Quand les cartons rouges s’enchaînent sans conséquences concrètes, la question devient inévitable : à quoi sert vraiment l’alerte du médiateur de l’énergie ?
Un rapport accablant pour trois fournisseurs… mais sans sanctions immédiates
Le rapport annuel 2024 du médiateur de l’énergie, publié le 19 mai 2025, dresse un constat sévère : plusieurs fournisseurs continuent d’exercer malgré des pratiques commerciales jugées inacceptables. Wekiwi en tête, avec un troisième carton rouge consécutif. Le motif ? Des souscriptions non sollicitées, des démarchages abusifs et un flou total sur les tarifs. Le taux de saisine contre ce fournisseur atteint 0,81 %, soit 25 fois la moyenne nationale, selon le rapport officiel.
Primagaz n’est pas en reste : le fournisseur de gaz de pétrole liquéfié accumule les dysfonctionnements depuis l’automne 2023, après une migration informatique chaotique. Résultat : factures introuvables, livraisons ratées, et un service client souvent injoignable. Le nombre de plaintes a été multiplié par cinq en un an.
Quant à JPME, le tableau est encore plus alarmant. Ce fournisseur d’électricité photovoltaïque ne règle pas ses clients, petits producteurs d’énergie solaire. En 2024, 188 saisines ont été recensées. Et en 2025, déjà 250 de plus. Le médiateur a même réclamé le retrait de son autorisation d’achat. Mais pour l’instant, rien ne bouge.
C’est la question que tout le monde se pose. Comment expliquer qu’un fournisseur qui ne paye pas ses clients, ou qui signe des contrats sans accord explicite, puisse encore vendre de l’énergie en France ?
Le médiateur de l’énergie, Olivier Challan Belval, a alerté les pouvoirs publics. Mais ses recommandations n’ont pas de valeur contraignante. Il ne peut ni suspendre une autorisation, ni interdire l’activité d’un fournisseur. Tout repose ensuite sur l’intervention d’autres instances, ou sur de potentielles sanctions judiciaires. Un processus lent, souvent trop tardif pour les consommateurs déjà lésés.
Des avancées attendues… mais insuffisantes
En 2024, plus de 15 millions d’euros ont été restitués aux clients à la suite des médiations. Un chiffre record, qui prouve l’utilité de l’institution… mais aussi l’ampleur des litiges. À lui seul, Wekiwi concentre un quart des saisines liées aux prix.
Le médiateur plaide pour une interdiction du démarchage téléphonique sans consentement, actuellement à l’étude au Parlement. Un début de réponse, mais qui reste bien timide face à des dérives systémiques. Le site du médiateur permet déjà de consulter le taux de saisine par fournisseur : un indicateur précieux, mais encore trop peu connu du grand public.
Face à ces failles de régulation, les consommateurs n’ont d’autre choix que de redoubler de prudence. Lire les petites lignes, vérifier la réputation du fournisseur, et consulter les indicateurs de litiges sont aujourd’hui des réflexes indispensables avant de souscrire un contrat de gaz ou d’électricité. Car si les cartons rouges se multiplient, ce sont bien les foyers français qui encaissent les fautes.