Jamais la France n’avait connu autant d’expulsions locatives. En 2024, plus de 24.500 ménages ont été contraints de quitter leur logement avec le concours de la force publique, un chiffre en hausse de près de 30% par rapport à 2023. Un record que l’ancien ministre du Logement Guillaume Kasbarian ne renie pas, bien au contraire.
Expulsions locatives : l’ex-ministre du Logement sous Attal salue le record

Impayés de loyer : une hausse inédite des expulsions en 2024
L’année 2024 s’impose comme celle de tous les records. D’après les chiffres du ministère de l’Intérieur, 24.556 expulsions ont été exécutées avec l’appui de la police ou de la gendarmerie, contre 19.000 en 2023. En dix ans, le nombre d’expulsions effectives a plus que doublé. La Fondation pour le Logement des Défavorisés (anciennement la Fondation Abbé-Pierre) parle d’un « symptôme d’une crise structurelle du logement » et rappelle que 171.000 commandements de payer ont été délivrés en 2024, soit 11% de plus qu’en 2023. Dans le même temps, environ 140.000 ménages ont reçu une notification de menace d’expulsion.
Cette explosion s’explique par un faisceau de causes : la flambée des loyers, la stagnation du pouvoir d’achat, la hausse du coût de l’énergie et, surtout, la réduction des dispositifs de prévention. De plus en plus de ménages basculent dans l’impayé, parfois après un simple accident de la vie. Les associations alertent sur une montée inquiétante de la précarité locative. Selon la Fondation Abbé-Pierre, un ménage sur trois a souffert du froid dans son logement durant l’hiver 2024, faute de pouvoir se chauffer correctement.
Expulsions locatives : Guillaume Kasbarian revendique une ligne de fermeté
Face aux critiques, Guillaume Kasbarian persiste et signe. « Ce n’est ni aux propriétaires ni aux contribuables d’assumer les impayés », a-t-il expliqué sur Franceinfo, estimant qu’« il faudrait aller plus loin » dans la rapidité des procédures d’expulsion. L’ancien ministre, aujourd’hui député Renaissance, défend ainsi la philosophie de la loi Kasbarian-Bergé, promulguée en 2023, qu’il avait lui-même portée à l’Assemblée nationale. Le texte vise à renforcer la protection des propriétaires contre l’occupation illicite des logements, mais il a également modifié les délais et les conditions d’expulsion pour les locataires en impayé.
Pour Guillaume Kasbarian, la hausse du nombre d’expulsions prouve que « la loi commence à produire ses effets ». Il considère que le respect du droit de propriété doit primer sur le maintien dans les lieux d’un locataire qui ne paie plus son loyer. Ses opposants, à gauche, y voient au contraire le signe d’un désengagement de l’État dans la lutte contre le mal-logement. « Ce record, c’est celui d’une politique qui préfère la répression à la prévention », a dénoncé la députée écologiste Sandrine Rousseau, tandis que plusieurs associations ont parlé d’une « fierté indécente ».
Une crise du logement qui s’aggrave
Derrière les chiffres se dessine une crise profonde. Le manque de logements accessibles, la hausse continue des loyers dans les grandes villes et la raréfaction du parc social alimentent la spirale des expulsions locatives. Les acteurs du secteur constatent également une saturation des services sociaux, incapables de reloger rapidement les ménages expulsés. La Fondation pour le Logement des Défavorisés estime que près de 330.000 personnes vivent aujourd’hui sans domicile fixe en France, un record historique.
De leur côté, les propriétaires affirment subir eux aussi les conséquences d’un système jugé trop lent et trop coûteux. Les retards de paiement, parfois sur plusieurs mois, peuvent déstabiliser les petits bailleurs, notamment ceux qui dépendent des loyers pour rembourser un crédit. Guillaume Kasbarian met en avant cet argument pour justifier sa politique : selon lui, la fermeté est la condition nécessaire pour « rétablir la confiance » et inciter à la mise en location de logements vacants.
Le débat sur l’équilibre entre droits des propriétaires et droits des locataires n’a jamais été aussi vif. Les associations réclament un renforcement des aides à la prévention des expulsions et un meilleur accompagnement des ménages en difficulté, tandis que le gouvernement reste attaché à une ligne de rigueur. En toile de fond, la question du logement continue de s’imposer comme un sujet social explosif, au cœur des tensions politiques.
