Franchises médicales : austérité oblige, le gouvernement va vous faire payer cher

La santé ne sera plus tout à fait un droit sans frais, ce qu’elle n’a jamais été puisque financée par les impôts. Mais le gouvernement prépare une réforme majeure qui pourrait bien bouleverser le quotidien des patients en alourdissant leur facture. Le tout pour faire faire des économies à l’État.

Paolo Garoscio
By Paolo Garoscio Published on 7 août 2025 6h06
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Franchises médicales : austérité oblige, le gouvernement va vous faire payer cher - © Economie Matin
227 MILLIARDS €Les dépenses de santé en France ont atteint 227 milliards d’euros en 2022

Les franchises médicales reviennent en force dans le débat public depuis la présentation du budget 2026. Cette fois, l’exécutif ne se contente plus d’ajustements techniques : il planifie une transformation profonde du système de participation des assurés. Objectif affiché : responsabiliser les patients et contribuer à l’effort budgétaire colossal lancé dans tous les secteurs de la dépense publique. Comment ? Simple : en faisant payer plus cher les malades.

Le gouvernement veut doubler les franchises médicales : que prévoit la mesure ?

Le gouvernement prépare un doublement de la franchise médicale, un mécanisme qui oblige les assurés à contribuer au paiement de certains soins et médicaments. Actuellement fixée à 1 euro par boîte de médicament, la franchise passerait à 2 euros, tandis que la participation forfaitaire de 2 euros par consultation grimperait à 4 euros, comme le rapporte Les Échos le 6 août 2025.

Ce durcissement ne s’arrête pas là. Le plafond annuel de franchises par assuré — aujourd’hui limité à 50 euros — serait également porté à 100 euros. Cette mesure pourrait entrer en vigueur dès novembre 2025, selon les documents préparatoires du Projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2026.

Cette refonte n’est pas anodine. Elle modifie en profondeur l’équilibre entre solidarité collective et responsabilité individuelle. Interrogée par Le Monde, la ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités, Catherine Vautrin, assume le changement de cap : « Il faut arrêter avec cette idée que l'Assurance Maladie, ‘c'est gratuit, j'y ai droit’. Il faut être vigilant, tous ensemble, sur nos dépenses. Nous voulons aussi que, demain, ces franchises soient payées au comptoir. »

Objectif : 2 milliards d’euros d’économies… sur le dos des patients ?

Selon les estimations du journal Les Échos, le doublement des franchises permettrait à l’État de réaliser plus de 2 milliards d’euros d’économies annuelles sur les dépenses de l’Assurance Maladie. Ce chiffre s’inscrit dans une trajectoire budgétaire beaucoup plus large : 43,8 milliards d’euros d’économies sont prévus d’ici fin 2026, toutes administrations confondues.

Le reste à charge pour les patients s’annonce donc bien plus lourd, malgré le maintien d’un plafonnement annuel. Pour les personnes souffrant de pathologies chroniques ou en ALD (Affection de Longue Durée), l’impact pourrait être majeur, surtout en cas de non-remboursement complémentaire ou d’absence de mutuelle.

La volonté du gouvernement est claire : réduire la consommation de soins jugée excessive et rétablir l’équilibre financier de la Sécurité sociale. Car, évidemment, il n’est pas question d’augmenter les impôts sur les ménages les plus riches, chouchoutés par Emmanuel Macron depuis son arrivée au pouvoir. Ce dernier a supprimé, entre autres, l’ISF, remplacée par l’IFI, ce qui coûte depuis 2018 environ 3 milliards d’euros à l’État chaque année en recettes fiscales non perçues.

L’austérité c’est aussi pour la santé

Si l’exécutif défend une politique de responsabilisation des patients, la mesure s’inscrit aussi dans une logique de rigueur budgétaire assumée. La franchise médicale, instaurée en 2008, n’avait jamais été revalorisée aussi brutalement. Ce relèvement simultané des montants et des plafonds pourrait transformer durablement le rapport des assurés à leurs soins.

Mais attention : la ministre a évoqué une piste encore plus sensible, selon le journal. Le paiement direct des franchises au comptoir de la pharmacie, ce qui pourrait rendre plus visible — et plus douloureuse — la participation financière des assurés. Pour l’instant, cette option n’est pas encore tranchée, mais elle fait partie des réflexions en cours au sein de l’exécutif.

Une réforme à fort impact pour les patients et la qualité des soins

Cette augmentation des franchises médicales, si elle est adoptée dans les délais annoncés, représentera un tournant majeur dans la gestion de l’Assurance Maladie en France. Elle combine hausse unitaire des franchises, relèvement des plafonds, paiement possible au comptoir, et objectifs d’économie ambitieux.

Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2026, qui doit être débattu à l’automne, intégrera ces propositions. La réforme pourrait s’appliquer dès la fin 2025 si les décrets sont publiés rapidement et si le gouvernement n’est pas censuré. Finalement, voilà que se profile une réalité : le coût des soins va grimper pour une partie importante de la population française. Et ça va pénaliser toujours les mêmes : les plus précaires.

Paolo Garoscio

Rédacteur en chef adjoint. Après son Master de Philosophie, il s'est tourné vers la communication et le journalisme. Il rejoint l'équipe d'EconomieMatin en 2013.   Suivez-le sur Twitter : @PaoloGaroscio

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