L’OAT 10 ans à 3,590 % : la France paie plus que l’Italie pour s’endetter

La France emprunte désormais plus cher que l’Italie sur dix ans. Avec un rendement de l’OAT à 3,606 %, supérieur à celui du BTP italien à 3,551 %, les marchés obligataires sanctionnent la trajectoire budgétaire française et la démission du Premier ministre Sébastien Lecornu.

Paolo Garoscio
By Paolo Garoscio Last modified on 6 octobre 2025 10h50
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Vous avez sans doute commencé à entendre parler de Deepseek, une IA chinoise. Disons qu’elle fait au moins aussi bien que ChatGPT l’américain - © Economie Matin
115%La dette de la France a atteint 115% du PIB.

Début octobre 2025, les chiffres publiés par Investing.com ont confirmé un basculement inédit : le taux de l’OAT française à dix ans atteint 3,590 %, contre 3,551 % pour l’obligation italienne de même maturité. Cette inversion, symboliquement forte, signifie que la France paie désormais plus cher que l’Italie pour emprunter à long terme.

Quand l’OAT française coûte plus cher que le BTP italien

Ce franchissement est tout sauf anodin. Pendant des décennies, la dette française était considérée comme plus sûre que celle de l’Italie, bénéficiant d’un rendement plus faible. Or, en ce mois d’octobre 2025, cette hiérarchie s’inverse :

  • OAT France 10 ans : 3,590 %
  • BTP Italie 10 ans : 3,551 %

Ces données, issues du site de référence Investing.com, traduisent une perte relative de confiance envers la France. Le marché exige désormais une rémunération supérieure pour prêter à Paris plutôt qu’à Rome. Autrement dit, le risque perçu sur la dette française est jugé légèrement plus élevé que celui de l’Italie. Un tel différentiel, environ 0,5 point de base, peut sembler minime, mais il marque une rupture de tendance historique. L’Italie, souvent considérée comme le maillon faible de la zone euro en matière d’endettement, bénéficie aujourd’hui d’un regain de crédibilité. La France, à l’inverse, voit son statut de pays « core » de la zone euro fragilisé.

Les causes d’un renversement symbolique

1. Une défiance croissante envers la trajectoire française

Les marchés semblent sanctionner la situation budgétaire de la France. La dette publique dépasse 110 % du PIB, et les déficits restent supérieurs aux objectifs européens. À cela s’ajoute un climat politique incertain, avec un gouvernement fragilisé et des perspectives de réformes limitées.
Cette combinaison d’instabilité et de dérapage budgétaire renforce la prime de risque exigée par les investisseurs.

2. L’Italie rassure — à sa manière

Ironie de la situation, l’Italie récolte les fruits d’une gestion budgétaire perçue comme plus rigoureuse ces derniers mois. Sous le gouvernement de Giorgia Meloni, Rome affiche un déficit en réduction et un discours de stabilité. Les investisseurs apprécient également la visibilité sur les réformes structurelles, notamment sur la productivité et la maîtrise des dépenses publiques.
Résultat : le BTP italien à 10 ans, autrefois symbole de fragilité, inspire aujourd’hui davantage de confiance relative.

3. La démission de Sébastien Lecornu

Cette inversion des taux montre également la crainte d’incertitude politique qui s’est renforcée ce lundi 6 octobre 2025. Sébastien Lecornu, Premier ministre après la censure de François Bayrou, a démissionné moins de 24 heures après avoir nommé son gouvernement.

Les conséquences pour la France et pour l’Europe

Un rendement plus élevé signifie un coût d’emprunt accru pour l’État. Chaque dixième de point supplémentaire sur la dette à long terme représente des milliards d’euros de charges d’intérêts sur la durée. Cette situation réduit la marge de manœuvre budgétaire et accroît la vulnérabilité face à une remontée durable des taux. Sur le plan symbolique, voir la France emprunter plus cher que l’Italie envoie un message négatif aux agences de notation, aux investisseurs étrangers et aux institutions européennes.

Paolo Garoscio

Rédacteur en chef adjoint. Après son Master de Philosophie, il s'est tourné vers la communication et le journalisme. Il rejoint l'équipe d'EconomieMatin en 2013.   Suivez-le sur Twitter : @PaoloGaroscio

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