En France, l’obligation d’équiper les logements d’un détecteur de fumée existe depuis dix ans. Dix ans plus tard, le bilan montre des réductions sensibles du nombre de décès liés aux incendies domestiques — mais l’efficacité réelle des dispositifs dépend fortement de leur entretien et de leur renouvellement.
Logement : 10 ans après l’obligation des détecteurs de fumée, sont‑ils vraiment efficaces ?

Depuis l’entrée en vigueur de la loi du 9 mars 2010 — avec obligation d’installation dans tous les logements à compter du 8 mars 2015 — le détecteur de fumée est imposé dans les habitations. La question qui se pose désormais est la suivante : ces appareils sont-ils vraiment efficaces, dix ans après leur généralisation, pour prévenir les drames liés aux incendies domestiques ?
Bilan : l’impact des détecteurs de fumée sur la mortalité et les incendies
Selon un bilan récent, en 2025, l’équipement en DAAF (détecteur autonome avertisseur de fumée) concerne près de 87 % des logements français. Cette adoption massive s’accompagne d’une réduction notable de la mortalité liée aux incendies domestiques. Avant 2015, on recensait environ 800 décès par an. Depuis l’obligation et la diffusion des DAAF, ce chiffre aurait été divisée par deux.
Un argument essentiel tient dans le mécanisme même du détecteur : en cas d’incendie — particulièrement la nuit — la fumée constitue le danger principal, souvent plus mortel que les flammes. Le détecteur, en alertant dès les premières fumées, offre une chance de fuite ou d’évacuation, ce qui diviserait par dix les risques de propagation d'incendie.
Limites et fragilités : quand le détecteur n’est plus suffisant
Pourtant, l’efficacité des DAAF reste soumise à plusieurs conditions. D’abord, leur durée de vie est limitée : même conformes à la norme NF EN 14604, les détecteurs doivent idéalement être remplacés après dix ans. En 2025, de nombreux appareils installés en 2015 atteignent ou dépassent cette échéance — ce qui peut compromettre leur sensibilité.
De plus, l’entretien est impératif : il faut tester régulièrement le détecteur, surveiller l'état des piles, éviter l’accumulation de poussière, veiller à ce qu’il soit correctement fixé au plafond et bien positionné (idéalement dans le couloir menant aux chambres). Si ces recommandations ne sont pas respectées, le risque d’alerte tardive ou d’alerte manquée augmente fortement. Un détecteur peut sembler encore opérationnel — notamment s’il bip quand la pile faiblit — alors que le capteur de fumée ne réagit plus efficacement.
Enfin, malgré l’obligation depuis 2015, certains logements ne sont toujours pas équipés — les statistiques 2025 évoquent 87 % d’équipement, pas 100 %. Cela représente donc un nombre non négligeable de foyers encore vulnérables en cas d’incendie.
Assurance et incendie : qu’en est‑il si vous êtes équipé (ou pas) ?
La présence d’un détecteur de fumée — bien qu’obligatoire — ne conditionne pas à elle seule la prise en charge d’un sinistre par une assurance habitation. En effet, selon la réglementation actuelle, même sans détecteur, un assureur ne peut pas refuser de verser une indemnisation au titre de la garantie incendie.
Ainsi, l’absence de DAAF ne justifie ni majoration de prime, ni exclusion de garantie. Toutefois, en cas de location, le bailleur reste responsable de l’installation, l’entretien devant incomber au locataire selon la situation — ce partage de responsabilité peut avoir des conséquences juridiques en cas de sinistre.
Un cas extrême — un incendie tragique — a déjà conduit la justice à condamner un bailleur pour homicide involontaire, après un décès survenu dans un logement dépourvu de DAAF. Mais juridiquement, l’absence de dispositif n’automatise pas un refus d’indemnisation.