Un marché de l’art porté par des ventes record ?

Le marché des records

Le marché de l'art, souvent perçu comme une sphère élitiste, se trouve au cœur de transactions extraordinaires et de records spectaculaires. Lorsqu'on explore les dernières ventes aux enchères aux prix millionnaires, une image d’un marché inaccessible se dessine, façonnée par des noms célèbres et des cotes exorbitantes. Le 8 novembre dernier, chez Sotheby's à New York, le tableau « Femme à la montre » de Pablo Picasso a été vendu pour la somme impressionnante de 139,36 millions de dollars (frais compris), soit 126,7 millions d'euros. Ce chef-d'œuvre est l’œuvre d’art la plus onéreuse vendue aux enchères en 2023 et le deuxième tableau le plus cher jamais vendu par le légendaire artiste espagnol.

L’hôtel Drouot a également raisonné en records dans ses gazettes de début d’année, mettant en avant sur quelques pages les œuvres les plus coûteuses vendues au sein de l’hôtel. En première position, elle présentait fièrement l'œuvre d'Alberto Giacometti, « Oiseau, dit communément albatros » vendue à 3,96 millions d'euros. Ces hautes enchères deviennent de ce fait un atout commercial, démontrant le prestige d’une maison de vente. En effet, l’attrait indéniable des œuvres d'artistes renommés, souvent accompagnées d’un prix tout aussi percutant, fait l’objet de nombreuses presses.

L’entreprise Artprice, avec sa casquette d’observateur du marché de l'art, annonçait que l'artiste contemporain le plus coté sur l’année 2022/2023, comprenant des données entre le 1er juillet 2022 et le 30 juin 2023, est Jean-Michel Basquiat. Les œuvres de ce dernier ont en effet généré un total des ventes à 235 millions de dollars en seulement 235 lots vendus sur cette période, le meilleur résultat atteignant 67,11 millions de dollars. Tandis que ces performances exceptionnelles mettent en lumière un nouveau phénomène où tant les vendeurs que les acheteurs cherchent à constituer des ventes record afin de s’inscrire dans la légende, on en oublierait presque que le marché est l’art est un secteur vaste et accueillant, proposant des œuvres diversifiées et à des prix variés.

La réalité du marché : un constat nuancé

Derrière le glamour des ventes records et des artistes renommés se cache la réalité du marché de l'art. L'image de l'art réservé à une élite se dissipe lorsque l'on observe les autres dynamiques du secteur. Selon Artprice, entre le 1er juillet 2022 et le 30 juin 2023, les échanges ont connu une accélération significative pour les œuvres cotées à moins de 5 000 dollars. Près de 99 000 œuvres contemporaines ont été échangées dans cette tranche de prix, marquant un nouveau sommet pour le marché des enchères. Cette croissance remarquable témoigne d'une évolution majeure, indiquant que l'élargissement constant du marché de l'art ne se limite pas aux hautes sphères financières, mais embrasse un public plus vaste. Le segment des œuvres cotées à moins de 5 000 dollars se révèle être le plus porteur du marché, affichant un flux trois fois plus important sur la décennie. Ce record historique est un indicateur de l'accessibilité croissante du marché de l'art. Compte tenu de l’importance des ventes d'œuvres abordables, les transactions record des artistes contemporains les plus reconnus et les plus cotés apparaissent comme une part quantitativement limitée du marché. Après le pic historique de 372 lots en 2021/2022, les ventes d'œuvres d’art contemporain connaissent une légère baisse avec 290 lots pour la période 2022/2023, dont 11 ont été vendus à des prix supérieurs à 10 millions de dollars (chiffres d’Artprice). 

La majorité des ventes se faisant autour d'artistes plus abordables, souvent éclipsés par ces records, de nouveaux acteurs émergent afin de révéler cette facette du marché. Artransfer, une plateforme novatrice, défie les conventions en valorisant dans le marché de l’art toutes les œuvres et toutes les gammes de prix. Ce nouvel acteur bouscule les préjugés associés au marché de l’art, permettant à un public plus large de posséder une partie de l’histoire de l’art. Ces nouveaux acteurs sont cruciaux dans la transformation médiatique du marché de l'art en tant qu’espace plus inclusif, où l'appréciation artistique ne se mesure pas seulement à l'aune de la valeur financière d’une œuvre. Ces initiatives apportent une note d'équilibre, rétablissant l'harmonie entre la perception souvent élitiste et la réalité dynamique et accessible du marché.

Mathilde Lamezec pour Artransfer