La réforme du cadre réglementaire des micro-crèches annoncée par le gouvernement provoque un tollé dans le secteur de la petite enfance. Tandis que certains dénoncent un « plan social » déguisé, d’autres y voient une nécessité pour renforcer la qualité d’accueil des enfants. Mais qui dit vrai ? Que prévoit réellement ce projet de décret ?
Micro-crèches : vont-elles toutes fermer avec ce nouveau décret ?

Le 3 février 2025, les micro-crèches françaises ont lancé une vaste mobilisation contre un projet de décret gouvernemental qui durcit les règles d’encadrement et de qualification des professionnels de la petite enfance. L’objectif affiché du gouvernement : aligner les exigences des micro-crèches sur celles des crèches classiques. Mais pour les acteurs du secteur privé, cette réforme serait surtout synonyme de fermetures massives et suppressions d’emplois. Et laisserait de faite les familles sans solution pour la garde de leurs enfants, alors que les places en crèche sont rares.
Le projet de décret sur les micro-crèches : quelles nouveautés ?
Le texte en cours d’examen au Conseil d’État prévoit des mesures importantes qui modifieraient le fonctionnement des micro-crèches, ces établissements de petite capacité (moins de 12 berceaux). Jusqu’à présent, elles bénéficiaient de dérogations permettant d’employer un personnel moins qualifié que dans les crèches collectives. Ce cadre simplifié pourrait disparaître au profit d’un alignement sur les réquisits.
Mesure actuelle | Nouvelle mesure prévue (dès septembre 2026) |
---|---|
Personnel pouvant être titulaire d’un simple CAP Petite Enfance | Obligation d’avoir au moins un professionnel diplômé d’État (éducateur de jeunes enfants, auxiliaire de puériculture) |
Encadrement : possibilité d’accueillir jusqu’à trois enfants par un seul professionnel sans exigence de qualification avancée | Seul un professionnel diplômé de catégorie 1 pourra prendre en charge trois enfants |
Direction non soumise à des critères stricts | Un directeur ne pourra gérer que deux établissements maximum |
Selon la Ministre du Travail, de la Santé, des Solidarités et des Familles de France, Catherine Vautrin, cette réforme vise à garantir un accueil plus sûr et de meilleure qualité. « Il n’y a aucune raison acceptable que les conditions d’encadrement ne soient pas similaires entre structures de taille équivalente, » a-t-elle affirmé dans un courrier adressé aux élus.
Micro-crèches : un secteur vent debout contre la réforme
Si le gouvernement met en avant un alignement des pratiques sur les standards des crèches publiques, les acteurs privés crient à la catastrophe. Plusieurs fédérations professionnelles, dont la Fédération Française des Entreprises de Crèches (FFEC), alertent sur un risque de fermeture de nombreuses structures. « Cette réforme va détruire des dizaines de milliers d’emplois et autant de places d’accueil pour les familles » dénoncent les représentants du secteur.
Un mouvement de contestation a pris de l’ampleur, avec des manifestations et une opération « Crèches Mortes » lundi 3 février 2025 visant à symboliser l’impact du décret sur la pérennité des établissements. Des parents se joignent également à la mobilisation, inquiets de voir disparaître des solutions de garde souvent perçues comme plus accessibles et flexibles que les crèches classiques.
Une réforme des micro-crèches critiquée… mais aussi soutenue
Contrairement aux fédérations privées, la Fédération Nationale des Éducateurs de Jeunes Enfants (FNEJE) apporte son soutien au projet. Selon elle, les micro-crèches fonctionnaient jusqu’à présent avec des normes trop permissives, mettant parfois en danger la qualité d’accueil des enfants.
Un rapport de l’Inspection Générale des Affaires Sociales (IGAS) publié en 2024 a mis en évidence des lacunes en matière de sécurité et d’encadrement, soulignant que certaines structures employaient des personnels faiblement formés, avec des risques pour la prise en charge des enfants.
Le SNPPE (Syndicat National des Professionnel·le·s de la Petite Enfance) se positionne lui aussi en faveur de la réforme qui se transforme donc en guerre entre les acteurs historiques de l’accueil d’enfants et les nouveaux acteurs privés.
Réforme pour les micro-crèches : une mise en application trop brutale ?
Si personne ne conteste le besoin d’améliorer la qualité d’accueil des jeunes enfants, le calendrier et l’accompagnement du décret posent question. Actuellement, 60 % des employés des crèches privées sont titulaires d’un CAP Petite Enfance (contre 30 % dans le public). La réforme impose de remplacer 40 % d’entre eux par des auxiliaires de puériculture ou des éducateurs de jeunes enfants. Mais où trouver ces profils ?
Des solutions alternatives sont évoquées, comme la montée en compétences via des formations, mais les professionnels jugent les délais insuffisants. Si le décret entre en vigueur en septembre 2026, les micro-crèches auront moins de deux ans pour adapter leur personnel.