En France, un petit nombre de sites internet captent l’essentiel du trafic web. Parmi eux, Netflix se distingue, dévorant des parts de bande passante que l’on n’aurait pas imaginées.
La moitié de l’Internet français est concentrée dans ces cinq sites !

Dans son dernier rapport publié le 4 juillet, l’ARCEP confirme que les géants numériques, principalement les plateformes de streaming et les entreprises des GAFAM, concentrent près de la moitié du trafic internet en France. Parmi eux, Netflix se distingue avec 12,3 % du total des données échangées, plaçant la plateforme de streaming devant des acteurs comme Google, pourtant omniprésent dans nos vies numériques. Ce rapport ne se contente pas de détailler des chiffres : il soulève aussi des enjeux majeurs pour la régulation du numérique en France et en Europe.
Pourquoi ces sites sont-ils si populaires ?
L'explication de cette domination n'est pas simplement liée à l’accessibilité de ces services, mais à une véritable transformation dans nos habitudes de consommation. En 2024, les cinq géants du numérique - Netflix, Akamai, Meta, Google, et Amazon - représentent 47 % du trafic web français. Netflix, avec ses séries populaires comme Squid Game ou You, consomme à elle seule plus de 6 Tbit/s sur les 50,8 Tbit/s mesurés au total. Une vraie ascension qui va bien au-delà de la simple plateforme de streaming : elle s'inscrit dans un contexte où la vidéo, surtout en haute définition, a pris le dessus sur les autres formes de consommation d'internet.
Pourquoi un tel phénomène ? Netflix domine le trafic internet, non pas en raison de la fréquence de ses visites, mais bien à cause de la taille des fichiers qu’il diffuse. Un épisode de série en 4K peut consommer plusieurs gigaoctets en quelques minutes, tandis qu'une simple recherche sur Google ne représente que quelques kilooctets. Cette différence de taille de fichiers explique pourquoi les plateformes de vidéo en streaming captent tant de bande passante, malgré un usage quotidien limité.
Une course qui pourrait s’intensifier
Le rapport de l’ARCEP observe que Netflix, bien qu’il reste le leader d'Internet, a vu sa part de trafic diminuer de 15,3 % en 2023 à 12,3 % en 2024. Cette baisse est attribuée à plusieurs facteurs : l’optimisation des flux par Netflix pour compresser les données transmises, mais aussi l'arrivée de nouveaux acteurs dans le domaine du streaming, comme Disney+ ou Apple TV. Cependant, cette baisse de part de marché ne remet pas en cause la position dominante de Netflix dans l'écosystème numérique.
Dans le même temps, d'autres acteurs comme Akamai, un fournisseur de services de diffusion de contenu (CDN), captent 12,2 % du trafic d'Internet grâce à ses partenariats avec des plateformes comme Disney+ et d'autres services en ligne. Cela reflète une tendance plus générale : le streaming vidéo et les services cloud prennent le pas sur les simples activités de navigation web, et même sur les réseaux sociaux. Meta, par exemple, représente seulement 5,4 % du trafic.
Le défi pour les régulateurs
Cette concentration des données soulève des questions sur l'indépendance numérique. Comme l’indique l'ARCEP, la domination de ces cinquième géants crée des déséquilibres potentiels dans la concurrence. Cela pourrait nuire à l'innovation et à la diversité numérique en France et en Europe. Face à cette situation, la régulation européenne est plus que jamais au centre des préoccupations. Les régulateurs doivent s’assurer que ces plateformes ne deviennent pas des acteurs trop puissants, capables d’imposer des modèles économiques ou des pratiques qui étouffent la concurrence.
Les acteurs européens, à la traîne ?
Dans le contexte de cette hégémonie numérique américaine, la question de la régulation européenne est primordiale. Ces GAFAM dominent non seulement le marché français, mais aussi la plupart des pays européens, et ce, depuis plusieurs années. L'ARCEP alerte sur les risques de manipulation algorithmique, de biais, et de fermeture de l'information. L’intelligence artificielle générative, en particulier, pourrait renforcer cette emprise, car elle risque de centraliser encore davantage la distribution des contenus et des services numériques.
Les autorités européennes se trouvent donc dans l’obligation de garantir un écosystème numérique ouvert et compétitif. Un combat qui s'intensifie alors que des questions comme la neutralité du net et la protection des données personnelles sont plus que jamais au cœur des discussions politiques.
