Multinationales sous Covid : la réalité du pouvoir

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Par Jacques Martineau Publié le 15 février 2021 à 7h45
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0,2%Les ETI représentent 0,2% du total d'entreprises en France.

Avec la crise sanitaire liée à la pandémie de la Covid-19 qui traverse le monde, le prétendu retour à la normale ne se fera pas sans mal et n'est pas pour demain. Les indicateurs nous ramèneront quelques années en arrière.

Deux tiers de l'activité économique française et de l'emploi salarié sont assurés en France par environ 35.000 entreprises de plus de 50 salariés, incluant les moyennes entreprises (ME), les moyennes industries (MI), les entreprises de taille intermédiaire (ETI) et les grandes entreprises (GE).

Le dernier tiers provient des PE, TPE et de l'artisanat et des professions libérales, représentant plus de 2.500.000 entités. Pour beaucoup la crise sanitaire sera peut-être lourde de conséquences. Cela pourra aller de la refonte de l'entreprise, à une reconversion, voire une cessation d'activité. Dépôts de bilan, faillites, fermetures, seront accompagnées de plans de licenciements. Les aides de l'État pour les « petits » ne seront ni éternelles, ni suffisantes.

Pouvoir et performance des « grands ensembles »

Les arguments et les moyens des « grands ensembles » sont surdimensionnés malgré les contraintes de la crise sanitaire, économique et financière, associée à un risque social. La mondialisation est à la « Une » de l'actualité. Ce n'est pas leur survie qui est à l'ordre du jour mais avant leur expansion nourrie par une concurrence acharnée. Les capitaux sont le nerf de leur lutte internationale, « tout terrain ».

C'est le sens même de la stratégie de ces multinationales qui leur permet d'appréhender la situation. Cet exercice du pouvoir, nous le vivons et le pratiquons au quotidien, à tous les niveaux, dans nos simples relations de travail. Entre responsables de très haut niveau, il implique une multiplicité de contacts alternatifs entre groupes et filiales. Plus ou moins formels ils sont des relations de pouvoir.

Elles sont gérées en termes de rapport de force, avec les actionnaires, les salariés et les pouvoirs publics, chacun craignant l'autre. Les relations de pouvoir ne peuvent pas se résumer à une lutte permanente plus ou moins feutrée qui s'apparente à la guerre de cent ans. Lorsque l'Union européenne s'en mêle en vertu de règles communautaires, cela peut aller jusqu'au blocage des transactions, en limitant les développements industriels au bénéfice de la France, sous les yeux d'un gouvernement à la botte de Bruxelles.

En cas de problème ou de crise, responsables, salariés et syndicats salariés concrétisent cette philosophie sécuritaire des relations de pouvoir de communication et d'autorité dans les organisations. Les habitudes sont un frein à la discussion. L'ingérence de l'État en situation de crise conforte d'abord le pouvoir des dirigeants. Combien sont alors réellement prêts à modifier leurs pratiques et leurs comportements d'autorité ? Peu en réalité.

Le pouvoir dynamique, qui a trait à la personne à la tête, passe mieux. Il est le reflet de son savoir, de son expérience et de la qualité de sa relation interpersonnelle, liée à l'image exportée de l'entreprise et de celui qui l'exerce dans le concret. C'est lorsque l'ensemble des partenaires s'impliquent que le champ d'action s'élargit. La performance est alors au bout du chemin, il n'y a pas lieu d'en douter.

Le pouvoir et l'argent

Un des aspects du pouvoir à ne pas ignorer, c'est celui de l'argent. Personne n'ignore son importance, surtout lorsqu'il s'agit d'investissement, de développement, de montages économiques ou techniques. L'augmentation en termes de fonds propres, l'ouverture à l'actionnariat sont autant de données qui vont modifier la relation au pouvoir. Les dirigeants sont astreints et contraints, dépendants eux-mêmes de leur relation à l'argent.

L'importance du pouvoir de l'argent va dépendre des actionnaires. Elle sera d'autant plus grande que leur influence sera décisive. Les multinationales en sont un bel exemple. La compétition n'est plus la même dès lors qu'elle se retrouve devant la réalité des marchés financiers.

Si le pouvoir d'achat baisse, les entreprises ferment, les multinationales délocalisent et la puissance financière continue à distribuer sans compter du crédit pour leurs projets, avec l'aide des pouvoirs publics en cas de crise. Grâce au chômage partiel et les perspectives d'un plan de relance dont ils peuvent profiter, leurs bénéfices ne cessent de croître, ce qui ne les empêchent pas de licencier au nom de structurations. La plupart des grands groupes ont des comptes à l'abri des mesures fiscales. Ce sont des « niches officielles » ou « paradis fiscaux » qu'aucun pouvoir politique ne peut et ne veut contrôler, surtout quand leur siège social se trouve à l'étranger. C'est le pouvoir de l'argent qui prédomine…

Un simple constat suffit pour comprendre

A tous les niveaux de l'entreprise, en particulier pour les « grands ensembles » le pouvoir de position et l'argent restent les seules références crédibles, aux yeux des actionnaires des partenaires internationaux et de l'État. Crise ou pas, ces multinationales ont apparemment sauvé leurs résultats pour 2020.

Combien de « fusion-acquisition » se sont faites ces dernières années ? Trois fois plus que lors des quinquennats précédents et ce toujours ou presque au détriment des entreprises françaises. Les acquéreurs s'en félicitent au nom de la mondialisation et au vu des résultats. Refonder une industrie ne se résume pas à un slogan salvateur, vide de sens et abusif.

La presse économique et financière se targue d'annoncer des bilans exceptionnels dans une atmosphère morose et incertaine. Grand nombre de géants français ont fini par s'autosatisfaire avec le plan prévisionnel de relance de l'État, des bénéfices suffisants et des dividendes en hausse…

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Après un long parcours scientifique, en France et outre-Atlantique, Jacques Martineau occupe de multiples responsabilités opérationnelles au CEA/DAM. Il devient DRH dans un grand groupe informatique pendant 3 ans, avant de prendre ensuite la tête d'un organisme important de rapprochement recherche-entreprise en liaison avec le CNRS, le CEA et des grands groupes du secteur privé. Fondateur du Club Espace 21, il s'est intéressé aux problèmes de l'emploi avec différents entrepreneurs, industriels, syndicalistes et hommes politiques au plus haut niveau sur la libération de l'accès à l'activité pour tous. Il reçoit les insignes de chevalier de l'Ordre National du Mérite et pour l'ensemble de sa carrière, le ministère de la recherche le fera chevalier de la Légion d'Honneur.

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