Édouard Philippe, cette continuation de Hollande par d’autres moyens

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Par Eric Verhaeghe Publié le 5 juillet 2017 à 11h09
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56%La dépense publique de la France est de 56 % du PIB.

Le discours de politique générale tenu hier par Édouard Philippe a permis de vérifier que le quinquennat Macron sera la continuation de Hollande. Avec quelques allusions à Juppé, bien entendu.

On a un peu tout entendu sur Macron et sa fine équipe: libéralisme, modernité, et autres fadaises. Dans la pratique, entre le discours de Versailles et la déclaration de politique générale d’Édouard Philippe, on commence à être fixé sur ce que sera la philosophie au pouvoir pendant cinq ans. En voici les grands points.

La continuation de Hollande par l’absence de réformes systémiques

Le point le plus saillant de la déclaration tenue hier tient sans doute à l’abandon des grandes réformes évoquées un temps. On placera au premier rang de celles-ci la réforme systémique des retraites.

Pendant la campagne électorale, Macron avait annoncé un système par points. Dans la pratique, cette réforme semble abandonnée, au profit d’une démarche beaucoup moins ambitieuse, fondé sur un principe peu expliqué: qu’un euro cotisé donne le même droit pour tous.

On remarquera que l’expression « retraite par points » a disparu du langage officiel. Pourtant, cette idée avait un sens et méritait d’être creusée. Elle était probablement la grande réforme de structure, la seule au demeurant, qu’Emmanuel Macron ait amené dans sa campagne.

Mais on comprend aujourd’hui que l’époque ne sera pas aux réformes ambitieuses et que, comme sous Hollande, l’objectif du pouvoir sera de changer les vis et les boulons, au besoin sera de les serrer un peu plus ou un peu moins, mais certainement pas de changer de moteur.

La continuation de Hollande par l’étatisme

Pour le reste, Édouard Philippe a confirmé qu’il serait adepte de l’héritage de François Hollande. Oui, il préservera un niveau élevé de dépenses publiques, et un niveau élevé de prélèvements publics!

Dans le meilleur des cas, la dépense publique baissera de trois points de PIB à la fin du quinquennat. Elle est aujourd’hui à 56% de PIB. La France continuera donc à « mutualiser » des sommes colossales. Même avec 53% de PIB, la dépense publique française demeurera une exception loufoque dans le monde industrialisé.

Dans la pratique, Emmanuel Macron ne sera, en tout cas, pas l’homme de la révolution libérale tant dénoncée chez les insoumis. Sa différence avec Mélenchon consistera seulement à baisser un peu la part de la dépense publique dans la richesse nationale là où l’autre voulait fortement l’augmenter.

Mais sur le fond, on retiendra qu’il ne faut s’attendre à aucune décrue majeure de la technostructure en France. Elle est bien accrochée à la paroi et entend le rester.

La continuation de Hollande par l’impôt

Pour aller plus loin, on ironisera volontiers sur l’amour de l’impôt qu’Édouard Philippe a peiné à cacher.

Dans la pratique, et sans le dire clairement, le gouvernement reporte toutes les baisses de prélèvements qu’il avait laissé miroiter. En revanche, il mettra en oeuvre toutes les mesures de hausses qu’il avait prévues.

Ainsi, la CSG augmentera rapidement. L’impôt sur les sociétés baissera plus lentement. La taxe d’habitation aussi. On voit bien que le gouvernement, comme sous Hollande, est plus prompt à recevoir qu’à donner.

La continuation de Hollande par Juppé

Au-delà de ces grands éléments de stabilité, qui montrent que l’énarchie qui a définitivement pris le pouvoir dans ce pays gouverne de façon constante, Philippe a introduit une touche de juppéisme.

Partout, l’esprit de la sanction et de la pénalisation s’instaure. La France comptera bientôt plus de policiers, plus de places de prisons, et plus de peines en cas de faute. Les paquets de cigarettes coûteront dix euros.

Bref, la bonne bourgeoisie de province reprend ses droits, avec son manque d’ambition et son souci de taper dur chaque fois qu’on s’accorde une fantaisie. C’est tout cela, Macron. On avait rêvé un destin. On se retrouve avec un avenir.

Nous appliquerons la même méthode à la rénovation de notre système de retraite pour le rendre plus juste et plus transparent, pour qu’un euro cotisé ouvre les mêmes droits pour tous. Nous prendrons le temps du diagnostic, de la concertation et de la négociation et nous fixerons le cadre de la réforme fin 2018.

Mon objectif est de ramener le déficit sous la barre des 3 % dès 2017 et de conduire notre stratégie de finances publiques autour de trois règles simples : faire baisser la pression fiscale d’un point de PIB sur cinq ans, faire baisser la dépense publique de 3 points de PIB sur la même période, agir en donnant de la visibilité aux acteurs.

Les peines seront renforcées, tandis que d’autres incivilités pourront faire l’objet de contraventions plutôt que de procédures plus lourdes mais trop souvent dépourvues des faits.

Article écrit par Eric Verhaeghe pour son blog

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Né en 1968, énarque, Eric Verhaeghe est le fondateur du cabinet d'innovation sociale Parménide. Il tient le blog "Jusqu'ici, tout va bien..." Il est de plus fondateur de Tripalio, le premier site en ligne d'information sociale. Il est également  l'auteur d'ouvrages dont " Jusqu'ici tout va bien ". Il a récemment publié: " Faut-il quitter la France ? "

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