Le Grexit est la moins mauvaise des solutions

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Par Jacques Bichot Publié le 16 juin 2015 à 5h00
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284 milliards €La Grèce est endettée à hauteur de 284 milliards d'euros.

En janvier, j’avais proposé "Une solution simple pour la Grèce" : retour à la drachme, et conversion de la dette obligataire grecque en drachmes au taux utilisé lors du passage à l’euro. L’Europe s’est malheureusement acharnée à conserver la Grèce au sein de la zone euro, en multipliant les injonctions destinées à dire au gouvernement de ce pays ce qu’il devrait faire pour ne pas être mis en demeure d’effectuer des remboursements évidemment irréalisables.

Cinq mois ont été perdus, la situation a empirée, et la sortie de la Grèce du système monétaire européen n’est plus écartée. Il est regrettable d’avoir perdu beaucoup de temps pour faire ce qui est indispensable au redressement de ce pays ami, mais mieux vaut tard qu’encore plus tard : espérons que le Grexit va effectivement avoir lieu, et qu’il sera réalisé de façon intelligente – ce qui hélas n’est pas certain.

La nécessité du retour à la drachme

La nécessité du retour à la drachme vient de ce que les efforts que le peuple grec va devoir faire ne peuvent pas lui être imposés de l’extérieur, par une lointaine puissance bruxelloise ayant pour courroie de transmission un gouvernement en total désaccord avec elle. Tsipras, ses ministres, et les parlementaires qui le soutiennent, peuvent devenir un peu réalistes en se heurtant à la force aveugle des faits économiques, pas sous la pression d’un aéropage de politiciens qui leur ferait perdre la face. La chute d’une monnaie nationale, rendant très onéreuses les importations, est seule capable de remettre les Grecs au travail pour produire eux-mêmes ce qu’ils ne pourront plus acheter à crédit à l’étranger.

Les prix, les taux de change, la rareté des denrées, la raréfaction des aides en tout genre, constituent des incitations autrement efficaces que les pressions diplomatiques. Quand les Grecs ne pourront plus récriminer contre ces orgueilleux européens qui prétendent leur dicter leur conduite, ils retrousseront leurs manches et s’attaqueront aux problèmes avec leurs propres méthodes. Un peuple fier et rusé ne se pliera jamais à des diktats étrangers : si ses dirigeants disent oui du bout des lèvres, ce sera en attendant la première occasion pour faire le contraire de ce que des sots auront cru lui imposer.

La Grèce s'est appauvrie

La Grèce s’est appauvrie considérablement ces dernières années, mais la façon dont cela s’est passé laisse les Grecs imaginer que c’est l’Europe qui en est responsable : ils n’ont donc aucun scrupule à lui emprunter des sommes qu’ils ne rembourseront jamais. Couper ce cordon ombilical qui infantilise le peuple hellène, laisser la Grèce redevenir un majeur non soumis à une tutelle humiliante, c’est le meilleur service à lui rendre. La drachme chutera très fortement, la production et le tourisme reprendront, il y aura 5 ou 6 années très difficiles mais de progression, un peu comme en France de 1945 à 1951, et les efforts des Grecs – ceux qu’ils auront eux-mêmes décidés – finiront par porter leurs fruits.

Quant aux dirigeants européens, puissent-ils comprendre que leurs tergiversations, leur incapacité à trancher, est leur talon d’Achille dans de nombreuses affaires, dont la crise grecque n’est qu’un exemple parmi d’autres tels que l’Ukraine, le Moyen-Orient ou l’immigration !

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Jacques Bichot est économiste, mathématicien de formation, professeur émérite à l'université Lyon 3. Il a surtout travaillé à renouveler la théorie monétaire et l'économie de la sécurité sociale, conçue comme un producteur de services. Il est l'auteur de "La mort de l'Etat providence ; vive les assurances sociales" avec Arnaud Robinet, de "Le Labyrinthe ; compliquer pour régner" aux Belles Lettres, de "La retraite en liberté" au Cherche Midi et de "Cure de jouvence pour la Sécu" aux éditions L'Harmattan.

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