Loi El-Khomri : les Français y sont clairement opposés

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Par Nicolas Boudot Publié le 26 février 2016 à 8h54
Loi Travail Gouvernement Elkhomri Opposition Opinion France
40%Seuls 40% des Français veulent augmenter leur temps de travail sans compensation même en cas d'entreprise en difficulté.

Q1 : Seriez-vous prêt à augmenter la durée de votre temps de travail sans augmentation de salaire si la situation économique de votre entreprise l’exigeait ?

Sous total « oui » : 40%

Sous total « non » : 60%

Q2 : La loi El Khomri prévoit de limiter les indemnités de licenciement prévues aux prud’hommes à 15 mois maximum, même en cas de licenciement sans causes réelles et sérieuses. Approuvez-vous cette mesure ?

Sous total « approuve » : 33%

Sous total « désapprouve » : 67%

60% des salariés interrogés ne sont pas prêts à augmenter la durée de leur temps de travail sans augmentation de salaire en cas de nécessité.

67% des Français interrogés ne veulent pas d’un plafond aux indemnités de licenciement prononcées par les conseils de prud’hommes.

Une opposition puissante au texte… dans son propre camp.

L’opposition au projet de loi El-Khomri, qui n’a pourtant pas encore été dévoilé officiellement par la ministre du Travail, puisqu’il ne sera présenté au Conseil des Ministres que le 9 mars prochain, est particulièrement étendue et disparate. Il y a bien entendu les opposants attendus et que l’on peut presque qualifier de « classiques » :

les organisations syndicales contestataires qui dans leur rôle ont immédiatement appelé à la grève le jour de la présentation du texte au Conseil des Ministres.

Il y a également les opposants politiques qui sont devenus des opposants habituels depuis le milieu du quinquennat de François Hollande : la gauche de la gauche et les « Frondeurs », auxquels se sont associés pour l’occasion quelques intellectuels et la maire de Lille en exprimant publiquement leur mécontentement dans une tribune parue hier dans la presse.

L’opposition s’étend à l’opinion publique

Ces opposants classiques sont également rejoints ici par l’opinion publique sur deux des parties les plus emblématiques du projet de loi El-Khomri :

La possibilité de déroger à la durée légale du temps de travail pour faire face à une situation économique exceptionnelle de l’entreprise.

Le plafonnement aux prud’hommes de toutes les indemnités de licenciement, même sans cause réelle et sérieuse.

En effet, 60% des Français interrogés ne souhaitent pas augmenter la durée du temps de travail, sans augmentation de salaire en cas de circonstances exceptionnelles pour leur entreprise et 67% d’entre eux ne souhaitent pas de plafond aux indemnités prud’homales. C’est une mauvaise nouvelle en communication pour la ministre du Travail et pour tout le gouvernement. En effet, le gouvernement avait toujours pu s’assurer le soutien de l’opinion publique lors des derniers projets de loi qui avaient pu susciter l’opposition des catégories citées précédemment (loi Macron par exemple).

Il y a deux conclusions en communication à tirer de cette situation.

Une pédagogie insuffisante sur le projet de loi

D’abord que la « triangulation » qui est l’apanage des actions gouvernementales depuis l’année passée (loi Macron, réactions législatives après les attentats, déchéance de nationalité) trouve là sa première limite. En effet, le fait d’aller chercher dans les programmes ou idées de l’opposition politique, des éléments pour construire sa propre action et dans le même temps l’empêcher de critiquer ne fonctionne pas pour cette loi. Quand on cherche à surprendre en sortant de sa propre zone idéologique, il ne faut pas aller trop loin d’une part et donner des gages à sa majorité parlementaire d’autre part. Cette leçon, le gouvernement est en train de la payer. A un an de l’élection présidentielle, elle pourrait même le payer très cher.

Ce sondage montre d’ailleurs combien il est délicat pour le président de la République et le Premier ministre de réformer avec une majorité à l’Assemblée nationale construite en 2012 par la première Secrétaire du PS de l’époque… Martine Aubry.

Un calendrier peu lisible

Ensuite, que ces résultats sont induits par l’impréparation en termes de communication de la réforme. Sans doute à cause du calendrier législatif serré d’ici à 2017. Certes les rapports Badinter/Lyon-Caen d’abord, Combrexelle ensuite et Mettling enfin ont tracé des jalons et donné des pistes. Toutefois, depuis la remise de ces rapports à la fin de l’été dernier, il n’y a pas eu d’actions notables de communication sur la réforme du Code du Travail, à part l’annonce que celui-ci serait modifié.

En communication politique, toute réforme aussi impactante pour le quotidien des Français qu’une réforme du Code du Travail, doit faire l’objet d’un temps de préparation de la part de celui ou celle qui doit porter le texte. Il y a des passages de communication obligés pour faire réussir une réforme auxquels le gouvernement s’est soustrait.

Le risque d’une double défaite

L’absence de pédagogie sur un texte de cette ampleur se paye cash pour le gouvernement et c’est le risque d’une double défaite qui s’ébauche : - La première pour le gouvernement et le président de la République qui pourra difficilement capitaliser sur une réforme pourtant majeure de ce quinquennat - La seconde pour l’emploi, tant la volonté affichée du texte de Madame El-Khomri voulait faire du Code du Travail un Code du retour à l’Emploi.

Sondage exclusif TILDER/LCI/OpinionWay du 25 février 2016

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Directeur de Tilder

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