Recrutement : « les profils techniques et scientifiques seront l’enjeu des décennies à venir », Julie Gay, DRH de Bertin Technologies

L’année 2023 a été une bonne année pour Bertin Technologies qui ne fait pas mystère des ses grandes ambitions européennes. Corollaire de ce développement espéré, des recrutements en France qui posent la question du vivier des candidats disponibles, alors que les filières de formation scientifiques ne suivent pas. Éclairage avec Julie Gay, DRH de Bertin Technologies

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Par Rédaction Publié le 14 mars 2024 à 17h00
Julie Gay 2024
90%Une femme attend d’avoir 90% des compétences pour postuler sur un nouveau poste.

Comment la croissance de vos sites se traduit-elle en termes de besoins de recrutement dans les prochaines années ?

Bertin est en forte croissance externe et interne. En interne cela se traduit par une politique ambitieuse de recrutement. Il s’agit d’une part de remplacer les personnes qui partent, même si nous avons un turn-over faible par rapport au secteur, mais aussi de créer des postes pour répondre à cette croissance. Nous prévoyons ainsi cette année au moins 120 recrutements pour CDI, alternants, stagiaires ; si nous continuons notre croissance, ce sera encore plus les prochaines années. Nous sommes aujourd’hui à 650 collaborateurs dans le monde, et nous recrutons sur l’ensemble de, nos sites et dans des domaines variés (ingénierie, production, commerce, fonctions transverses… )

Quel sont les profils des candidats que vous recherchez ? Quels sont les principaux critères de choix des candidats que vous rencontrez ?

Bertin recrute aussi bien des jeunes diplômés que des seniors. Nous proposons des CDI, des alternances, des stages et des VIE (Volontariat Internationaux en Entreprise). Nous recherchons à la fois des techniciens, des cadres, des docteurs, depuis la CAP jusqu’au bac+8.

Pour les recrutements sur des postes techniques nous sommes très ouverts. Quand certaines entreprises ne jurent que par les grandes écoles, nous recrutons tout type de formation : universitaire, BTS, écoles d’ingénieurs, grandes écoles d’ingénieurs… Ce qui est important pour nous, c’est la personne et ses compétences, et cela passe avant le nom de l’école sur un CV. Et nous ne cherchons pas des personnes qui ont forcément déjà 100% des compétences requises. Chaque profil a quelque chose à apporter à l’entreprise. Ce n’est pas grave si le candidat n’a pas toutes les hard skills de son poste car nous offrons de la formation interne. Ce qui est important pour nous, c’est la personnalité et l’état d’esprit, son adhésion aux valeurs de Bertin : l’esprit d’équipe, le courage, la confiance et le talent, auxquelles j’ajouterais la motivation et la curiosité.

Comment une ETI parvient-elle à se démarquer des grands Groupes vis-à-vis des candidats ? Qu’est-ce qui les motive chez Bertin ?

C’est clairement un de nos plus gros défis. Nous faisons du B2C, nous ne sommes pas gigantesques, et Bertin est surtout connu localement ou sur certains marchés très spécifiques. Nous n’avons pas la même notoriété, ni les mêmes moyens que les grandes entreprises technologiques françaises. Nous avons pourtant l’ambition d’accroitre notre notoriété, en particulier pour avoir plus de candidatures spontanées.

Notre force, c’est notre taux d’acceptation, une fois qu’on a pu attirer les candidats en entretien : ils accrochent assez vite à l’entreprise et c’est très positif. Nous avons très peu de personnes qui refusent nos offres lorsque nous faisons des propositions d’embauche. Quand nous arrivons vraiment à leur parler de nous (la société, le poste, les missions, le fonctionnement, les marchés) nous voyons naître leur passion et leur envie.

Le contact passe généralement très bien avec les candidats lors des entretiens. Nous ne cherchons pas à les mettre sur le grill, il n’y a pas de question piège, nous somme d’égal à égal, dans le cadre d’un échange. Nous essayons d’apporter un maximum d’éléments sur la société en toute transparence et en toute honnêteté : c’est important que le candidat puisse se projeter et voir si Bertin leur correspond.

Ce qui plait ensuite aux candidats, c’est l’intérêt et la diversité des missions. Cela ressort bien dans nos enquêtes de satisfaction avec 97% des collaborateurs satisfaits de l’intérêt de leur poste. Nous avons je trouve la bonne taille pour cela : dans les grands groupes, les postes sont parfois définis plus étroitement et dans les start-ups, à l’inverse, c’est souvent trop large. Nous avons la bonne taille pour à la fois proposer des missions qui correspondent aux gens, mais aussi pour varier les missions en question. Ajoutez à cela les responsabilités et l’accessibilité de la direction, demandée à la fois par les plus jeunes recrues qui aiment casser les codes et par les personnes avec plus de responsabilité qui peuvent directement avoir accès aux bons circuits décisionnels, et vous comprendrez ainsi mieux comment nous motivons les candidats à nous rejoindre !

Il y a des possibilités de mobilités internes ?

Oui, absolument. Nous avons de nombreux exemples de belles carrières en interne et nous nous efforçons de les mettre en avant. Pendant l’entretien professionnel annuel, les collaborateurs peuvent également formuler leur souhait d’évolution. Ces entretiens sont très précieux pour les RH car ils nous permettent de savoir qui a envie d’évoluer ou de changer de poste, de domaine.... En termes de déroulés de carrières, c’est une aide précieuse car nous avons une forte politique de promotion interne.

C’est également valable pour tous les postes à responsabilité : nous cherchons d’abord au sein de l’entreprise. Tous les postes ouverts sont diffusés sur notre intranet, pour donner à chacun la possibilité d’en prendre connaissance et de se positionner.  La plupart de nos managers sont ainsi issus de la promotion interne. A titre personnel, en 8 ans, j’ai eu 4 évolutions de carrière et je suis DRH du groupe aujourd’hui. Le président actuel de Bertin a commencé comme chef de projet il y a 20 ans. L’un de nos directeurs est arrivé en tant que stagiaire. Des exemples comme les nôtres, je pourrais en citer des dizaines !

Il y a évidemment des départs, et c’est naturel. Pour certains, Bertin est leur première entreprise, et ils veulent tout simplement voir comment ça se passe dans d’autres sociétés, ou voir d’autres manières de fonctionner. Parfois, ils partent par attrait pour le prestige d’une grande marque. Nous sommes ainsi un terrain de chasse pour les grands groupes d’ingénierie comme Thales, Safran, EDF ou encore la DGA, ce qui montre que nous avons des collaborateurs de grande qualité et que Bertin est reconnu sur le marché. Nous avons aussi des personnes qui partent pour faire complètement autre chose, dans des cas de reconversion totale. C’est plus fréquent aujourd’hui qu’auparavant, qu’il s’agisse d’ouvrir un magasin de surf ou une société de cosmétique. Et il nous arrive de plus en plus fréquemment que des collaborateurs reviennent vers nous, après une expérience intermédiaire. Cela n’a rien de surprenant car nous tenons à toujours nous séparer en bons termes avec nos salariés désireux de partir.

Quelle est aujourd’hui la place des femmes dans les filières et les recrutements d’une société à fort contenu technologique comme Bertin ? Comment y développez-vous la mixité ?

Bertin compte 30% de femmes dans ses équipes, notamment dans les fonctions supports, RH et marketing. Sur les postes d’ingénieurs, nous sommes limités par le nombre de femmes ingénieurs qui sortent des écoles. Mais pour nous, ce qui est important, c’est de prendre le meilleur candidat, homme ou femme, sans discrimination dans un sens ou dans l’autre. Nous essayons néanmoins de pousser pour avoir plus de candidates, et nous demandons à nos recruteurs de faire un effort en ce sens. La discrimination positive à outrance reviendrait à privilégier une personne qui n’a pas les compétences requises. On ne peut pas discriminer au détriment de la qualité, cela ne servirait pas la cause et n’aurait que des impacts négatifs

Mais il faut souligner que la société actuelle ne pousse pas les femmes à se positionner de manière pro-active pour exercer plus de responsabilités. Différentes études montrent ainsi qu’une femme attend d’avoir 90% des compétences pour postuler sur un nouveau poste, quand les hommes se lancent avec 50 ou 60% des compétences. C’est notre rôle en interne d’accompagner les femmes sur des candidatures à des postes à responsabilités, peut-être un peu plus que les autres.

Mais le problème remonte à plus loin. Au lycée, c’est déjà trop tard, c’est encore avant qu’il faudrait agir, en primaire et même dès la maternelle. C’est bien que les écoles d’ingénieurs communiquent dans les lycées et montrent qu’il y a des femmes ingénieurs passionnées par leur métier. Mais je pense que c’est déjà un peu tard, les centres d’intérêt se développent avant. C’est un problème sociétal face auquel il faut sans cesse mettre en avant et valoriser les carrières techniques des femmes. Mais pas seulement : les besoins des entreprises françaises en profils techniques et scientifiques seront l’enjeux des décennies à venir.

Comment les grands sujets sociétaux du moment - environnement, réchauffement climatique – sont-ils évoqués par les candidats ? Quelles sont les réponses et engagements de Bertin Technologies sur ces sujets, tant vis à vis des candidats que des collaborateurs ?

Lorsqu’ils postulent, les candidats se sont généralement déjà renseignés sur nos missions et nos actions. Ils ne sont donc pas surpris et savent que nous travaillons dans le nucléaire ou dans la défense notamment. Mais ce qui est important, c’est que nous développons des produits pour protéger les personnes et l’environnement. C’est cela qui anime les candidats. Ce n’est pas parce que nous travaillons dans le nucléaire que nous n’avons pas la fibre écologique, au contraire même. Il arrive que des candidats posent des questions sur notre positionnement ou notre rapport à la société, mais il n’y a pas de bonnes ou de mauvaises réponses. Il y a ce qu’est Bertin, son histoire et ses activités actuelles. L’essentiel reste d’être transparent vis-à-vis d’eux.

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