Siri accusé d’espionnage : pourquoi Apple fait face à une action collective

Une action collective vient d’être été lancée en France contre Apple, ciblant son assistant vocal Siri. Ce recours, coordonné par une association de consommateurs, fait écho à une vaste procédure en cours aux États-Unis, où Apple a accepté de verser 95 millions de dollars pour mettre fin à une plainte accusant Siri d’enregistrements intrusifs. En toile de fond : des accusations d’écoutes illicites, d’usage commercial des données et de surveillance numérique déguisée.

Anton Kunin
By Anton Kunin Last modified on 14 mai 2025 7h36
Siri accusé d’espionnage : pourquoi Apple fait face à une action collective
Siri accusé d’espionnage : pourquoi Apple fait face à une action collective - © Economie Matin
95 millions de dollarsApple entend verser un total de 95 millions de dollars pour solder le contentieux.

Siri et les enregistrements fantômes : les griefs des plaignants

Si vous pensiez que Siri ne vous écoute que lorsque vous prononcez « Dis Siri », détrompez-vous. Les plaignants dénoncent des activations involontaires de l’assistant vocal, enregistrant des échanges intimes ou confidentiels sans le moindre consentement. Selon eux, ces données auraient été stockées, écoutées, transcrites… et parfois même transmises à des tiers.

L’origine du scandale remonte à 2019, lorsqu’un lanceur d’alerte a révélé que des sous-traitants d’Apple écoutaient des fragments d’enregistrements Siri. Des conversations médicales, des négociations contractuelles, voire des discussions de couple auraient été entendues. À l’époque, Apple avait reconnu les faits, suspendu temporairement son programme d’analyse vocale et promis une refonte de ses politiques internes.

Mais aujourd’hui, la confiance semble rompue. En France, l’association UFC-Que Choisir accuse Apple d’avoir violé le Règlement général sur la protection des données (RGPD) en activant Siri sans autorisation explicite. Une action collective inédite pour atteinte à la vie privée vient d’être engagée contre la firme californienne. « Il n’est pas admissible qu’un assistant vocal puisse capter nos propos à notre insu, et encore moins que ces données puissent alimenter un traitement tiers », s’insurge un juriste proche du dossier.

Siri et l'action collective en France : comment les utilisateurs peuvent se joindre à la procédure

C’est une première en France pour un produit aussi emblématique. L’action collective vise à obtenir réparation pour les utilisateurs d’iPhone, iPad, HomePod et autres produits Apple activant Siri. Les conditions ? Avoir utilisé l’un de ces appareils depuis 2015 et constater une activation non sollicitée de l’assistant vocal. Pour rejoindre l’action, il suffit de s’inscrire via le site de l’association à l’origine du recours. Aucun frais n’est requis. L’utilisateur devra fournir des preuves d’achat et témoigner d’au moins un épisode suspect d’enregistrement non désiré.

La procédure pourrait durer plusieurs mois, voire des années. Mais elle s’inscrit dans un contexte de prise de conscience croissante autour de la vie privée numérique, et pourrait faire date dans le paysage juridique européen.

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Siri dans le viseur aux États-Unis : un précédent à 95 millions de dollars

Outre-Atlantique, l’affaire Lopez v. Apple a fait grand bruit. Engagée en 2021 par une consommatrice californienne, la plainte dénonçait des écoutes indésirables, parfois exploitées pour du ciblage publicitaire. Siri aurait enregistré des échanges confidentiels, transmis à des annonceurs ou des sous-traitants à l’insu des usagers.

Apple, fidèle à son habitude, dément fermement toute infraction : « Apple nie toutes les accusations formulées dans la plainte et réfute avoir commis la moindre illégalité », peut-on lire sur le site officiel du règlement.

Malgré cela, la firme a préféré transiger : 95 millions de dollars pour solder le contentieux, sans reconnaissance de culpabilité. La procédure de réclamation est ouverte aux résidents américains ayant utilisé un appareil compatible Siri entre le 17 septembre 2014 et le 31 décembre 2024. Jusqu’à 100 dollars peuvent être versés par utilisateur, selon le nombre d’appareils concernés.

Espion numérique ou bug technique ? Apple tente de rassurer

Dans ses communications officielles, Apple insiste sur une politique stricte de confidentialité. Seuls les utilisateurs ayant explicitement donné leur accord participeraient à l’amélioration de Siri. Les données ne seraient ni revendues ni utilisées à des fins publicitaires. Et pourtant… « Nous n’utilisons pas les enregistrements Siri pour vendre des publicités, ni pour profiler nos utilisateurs », martèle Apple depuis Cupertino.

Mais le doute s’est insinué. Car si Siri enregistre sans qu’on le lui demande, même épisodiquement, que reste-t-il de la promesse de confidentialité ? La zone grise entre consentement, automatisation et analyse algorithmique devient un terrain miné pour les géants de la tech.

La double offensive judiciaire – en France et aux États-Unis – pourrait bien faire jurisprudence. D’un côté, un accord financier record, de l’autre, un recours fondé sur le RGPD. Dans les deux cas, c’est la même interrogation qui revient : qui contrôle réellement les assistants vocaux ? L’affaire Siri pose la question cruciale du consentement numérique à l’heure des appareils connectés omniprésents. Si les micros s’activent en silence, à qui appartient notre voix ?

Anton Kunin

Après son Master de journalisme, Anton Kunin a rejoint l'équipe d'ÉconomieMatin, où il écrit sur des sujets liés à la consommation, la banque, l'immobilier, l'e-commerce et les transports.

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